Présidentielle: Loufoques, tradi ou WTF... Les web-séries se payent la campagne
WEB•A l’approche du premier tour de la présidentielle le 23 avril prochain, on a regardé pour vous trois web-séries engagées politiquement...Laure Beaudonnet
Les web-séries se mettent à la politique et c’est assez réjouissant. Loufoques, humoristiques ou plus tradi, les mini-fictions sur le Net passent le monde politique à la moulinette de l’humour et n’hésitent pas à questionner nos convictions. A l’approche du premier tour de la présidentielle le 23 avril prochain, on a maté trois web-séries engagées, histoire de se mettre en condition avant de faire son choix dans l’isoloir. Très différentes tant sur le fond que sur la forme - quoiqu’elles partagent toutes le format court de moins de 10 minutes -, découvrons, Et toi, tu votes ?, Elysée moi et Face au fiable.
« Et toi, tu votes ? » met un coup de pression aux électeurs
Une bonne série d’anticipation un peu déjantée qui devrait motiver les plus hésitants à se précipiter dans les bureaux de vote le 23 avril. Ecrits avec le collectif Studio Ciné Magueule et coproduits par France Télévisions, les dix épisodes de deux minutes, diffusés depuis quelques jours, imaginent un monde où des lois complètement folles ont été votées : la retraite à 80 ans, le travail des enfants, la disparition de l’école publique… Chaque fois, les personnages sont confrontés à une énorme injustice : un salarié redevient stagiaire parce que son entreprise rencontre des difficultés, une conductrice se fait arrêter car les femmes n’ont plus le droit de conduire. Morale de l’histoire : si t’as pas voté, faut pas t’étonner. Efficace et intelligente, les dix pastilles réalisées par Amelle Chahbi forcent suffisamment le trait pour faire rire, même si leur petit côté moralisateur peut agacer parfois.
« Elysée moi » se paye la campagne présidentielle
Du grand n’importe quoi de deux minutes ultra-efficaces. Elysée moi détourne de vraies images du monde politique - Manuel Valls et sa charlotte sur la tête dans une usine, Stéphane Le Foll devant la CGT, François Hollande en pleine réunion de travail - ou des extraits de discours - François Fillon qui annonce continuer la campagne présidentielle malgré les affaires - pour en faire un objet vidéo non identifié au croisement de Mozinor [auteur du fameux « un cheeseburger et un coca » de Michael Jackson] et du ton décalé de feu le Zapping de Canal +. Repéré par Konbini, il est diffusé depuis le mois de février par Speech, la plateforme politique du site, sur la base d’une vidéo par semaine. Comme sur leur chaîne YouTube, les deux auteurs, Nicolas et Clément, fouillent les reportages diffusés par les télévisions ou sur le site des candidats à la recherche des plans « flottants », des scènes un peu inattendues de la vie publique. « On avait suivi les campagnes précédentes et il y a toujours un moment où les candidats se retrouvent à faire des trucs ridicules », explique Clément. C’est incisif et, surtout, ça fait rire. Voici un épisode, feat. Marine Le Pen, pour vous préparer avant dimanche.
« Face au diable » crée le débat
Avec Face au diable, on change de ton. Calibrée web-série haut de gamme, elle voit les choses en grand : un an de développement, un tournage en 4K et Henri Guybet à l’affiche. Produite par Morgane pour Studio 4 (la plateforme de France Télévisions qui diffuse aussi Les Textapes d’Alice ou Camweb), Face au diable imagine la rencontre entre Hugo, figure syndicale déchue, et Clémence, la petite-fille pas très farouche de Philippe Legrand, un leader d’extrême-droite. Tout les oppose et pourtant Hugo ne cesse de retomber dans les bras de la jeune fille -qui rappelle étrangement la petite-fille d’un certain Jean-Marie Le Pen- et d’entretenir une relation de plus en plus ambivalente avec le vieil homme aux idées extrémistes. On entre ainsi dans les coulisses d’un parti à l’idéologie raciste, antisémite, on découvre ses pratiques… A travers le personnage d’Hugo, la série interroge les limites des convictions. Peut-on s’aimer tout en étant opposés idéologiquement ? Que sommes-nous prêts à accepter par amour ? Si la série tombe parfois dans le manichéisme, elle a le mérite de créer un débat d’idées. Un ping-pong intellectuel plutôt agréable en cette période électorale.