Le musée du Quai Branly prend Jacques Chirac au mot
EXPOSITION•Une exposition est consacrée à l'ancien Président de la République, initiateur du projet muséal...Benjamin Chapon
Pour ses dix ans, le musée du quai Branly devientle musée du quai Branly - Jacques Chirac et consacre une exposition aux rapports que l’ancien président, amoureux et amateur des arts non-occidentaux, à l’origine de la création du musée, a entretenu avec les civilisations extra-européennes. Exposition-manifeste comme le fut, dix ans auparavant, D’un regard l’autre.
Jacques Chirac, le dialogue des cultures est plus complexe et moins bêtement hagiographique que son titre (et son horrible affiche) ne le laisse paraître.
Surtout, elle présente une sélection de chefs-d’œuvre mis en relation avec l’histoire du musée au sens large, retraçant la découverte par Jacques Chirac d’arts et civilisations qu’il a appréciés mais aussi les relations, toujours complexes, de la France et ses institutions savantes avec les peuples non-européens.
Ça me touche une statuette sans me bouger l’autre
Si l’exposition dresse le portrait d’un homme d’état courageux, ouvert, responsable, curieux et bienveillant, plutôt en adéquation avec la bonne opinion générale des Français à son égard depuis sa retraite politique, on peut s’amuser à mettre en relation certaines œuvres présentées avec les citations les plus marquantes de la carrière de Jacques Chirac.
« Un chef, c’est fait pour cheffer. (déclaration au Figaro Magazine, juin 1992) »
Cette grande coiffe de chef Sioux en feutrine et duvet d’aigle (même si Jacques Chirac préfère les buses) sied parfaitement à l’idée que l’homme politique se fait de la hiérarchie et de l’obéissance.
« "Ma femme est un homme politique". (dans L'avenir à bras-le-corps, 1996) »
Cette statuette Chupícuaro représentant une figure féminine est l’emblème du musée car elle fut le premier objet acquis par l’établissement public à sa création. Jacques Chirac ne s’est pas toujours distingué par sa politique en faveur du droit des femmes, cachant parfois sa misogynie sous des allures de galanterie bonhomme.
« "Les anciens savaient que la clé des songes est aussi celle de l’équilibre et du bonheur, et recommandaient la pratique de la sieste." (préface du livre Eloge de la sieste, 2005) »
Ce banc cérémoniel Taïno, taillé dans la masse d’un tronc de gaïac, était réservé aux élites et caciques. Amateur de sieste, Jacques Chirac aurait sans doute trouvé ce siège-là très inconfortable et trop petit. En revanche, le décor figurant un être hybride qui mélange des traits humains et félins colle parfaitement avec son amour des animaux en général et des félins en particulier.
« "J’apprécie plus le pain, le pâté, le saucisson, que les limitations de vitesse." (déclaration à Auto-Journal, août 1977) »
Cette cuillère à riz à usage cérémoniel chez les Dan est un bel hommage au mythique coup de fourchette de Jacques Chirac.
« "La timidité est l’un des patrimoines de l’homme." (dans Jacques Chirac, le 12e maire, 1977) »
Il est d’usage de dire que les hommes politiques portent un masque en permanence. Le si sympathique Jacques Chirac ne faisait, de son propre aveu, pas exception à la règle et sait apprécier à leur juste valeur la beauté mystique des masques de théâtre No Ko Omote.
« "Lorsque j’engage un combat, il ne me vient pas à l’idée que je puisse le perdre." (déclaration à L’Express, février 1978) »
Cette statue de Giacometti, un de ses Homme qui marche, illustre dans l’exposition, la longue et vaillante marche de Jacques Chirac dans sa quête de pouvoir puis pour imposer l’idée d’un musée dédié aux cultures non-occidentales. Elle évoque aussi le caractère intrépide qu’il aimait s’attribuer.