La France entière s'enflamme pour l'eSport
E-SPORT•C’est à Tours que s’installe une fois encore la Dreamhack, une des plus grandes compétitions e-sport au monde. La France qui accueille depuis plusieurs années certains des plus grands tournois pourrait devenir une nation phare.Jean-François Morisse
Après l’ESCW Call of Duty la semaine passée à Paris, la ville de Tours accueille ce week-end une des plus grandes compétitions e-sport de France et même du monde, la DreamHack. Une compétition récompensée par plus de 300.000 dollars (soit 265.000 euros environ) de « cash prize ».
Plusieurs dizaines d’équipes originaires du monde entier tenteront de décrocher le jackpot en s’affrontant sur des jeux comme Starcraft II, Counter Strike ou encore Heroes of the Storm. Mais Tours n’est désormais qu’une étape sur l’agenda des joueurs e-sports qui parcourent le monde entier avec plusieurs étapes majeures en France.
Les spécialistes d’e-sport ont dans l’Hexagone de nombreux rendez-vous incontournables. Outre Tours et la DreamHack, les joueurs se retrouvent au Lyon e-sport, au Toulouse Game Show (TGS), à la Gamers Assembly de Poitiers ou bien encore à Paris avec en point d’orgue les finales e-sports qui se tiennent lors de la Paris Games Week à la fin du mois d’octobre porte de Versailles. « La France est désormais une étape incontournable des plus grands circuits e-sports internationaux comme le témoignent les importants cash-prize proposés par les éditeurs et partenaires, détaille Jean-Christophe Arnaud organisateur de la DreamHack, l’enthousiasme du public français à se déplacer sur des événements tels que la DreamHack souligne cet engouement qui n’est pas près de disparaître ».
Ces disciplines ont leurs stars internationales et nationales comme Kayane, Gotaga ou encore Luffy, Broken… Des e-sportifs français dont la notoriété ne cesse de croître alors que les vidéos de leurs exploits rassemblent des dizaines de milliers d’internautes sur YouTube ou Twitch. Les e-sportifs sont là, le public aussi, mais pas que.
La future manne de l’e-sport attise les convoitises
Certains éditeurs comme Activision Blizzard s’intéressent par ailleurs aussi depuis longtemps au secteur. En rachetant en janvier dernier la ligue américaine d’e-sport, la MLG, son PDG Bobby Kotick déclarait alors vouloir créer « l’ESPN (cette célèbre chaîne 100 % sport) de l’e-sport ». L’éditeur vient d’ailleurs tout juste d’annoncer la création d’Activision Blizzard Media Networks, chaîne online de diffusion de contenus e-sport avec à sa tête l’un des anciens patrons d’ESPN, Steve Bornstein. On se doute que les velléités de l’éditeur de Call of Duty et Starcraft vont bien au-delà des Etats-Unis et que la ligue américaine pourrait bien être déclinée en France et que la diffusion de contenus e-sport devrait arriver par ce biais chez nous. De quoi motiver en France les politiques à se saisir du dossier e-sport avant que d’autres ne le fassent à leur place.
L’Etat français prend l’e-sport au sérieux
Preuve de cet intérêt, la création il y a quelques semaines de l’association France e-sport sous le parrainage de la Secrétaire d’Etat au Numérique, Axelle Lemaire, et regroupant tous les acteurs majeurs de la discipline dans l’hexagone. Une mission sénatoriale menée les députés Jérôme Durain (PS) et Rudy Salles (Nouveau Centre) a tenté, à la demande du premier ministre Manuel Valls, de définir le statut exact de ces sportifs d’un nouveau genre dans un rapport intermédiaire disponible en ligne.
Un rapport qui souligne néanmoins la jeunesse de ce secteur qu'« Il est certainement prématuré́ de reconnaître l’e-sport comme un véritable sport : le secteur du jeu vidéo compétitif apparaît en effet aujourd’hui trop peu structuré pour se constituer en une fédération agréée » et qui a porté ses fruits avec une loi encadrant le statut des e-sportifs votée le 2 mai dernier à l’assemblée. Grâce à cette loi, « la France est en avance sur toutes les législations en reconnaissant un statut aux joueurs professionnels » explique Matthieu Dallon en charge de l’ESWC, l’une des principales manifestations e-sport en France.
Encadrer pour mieux taxer
Une volonté d’encadrement qui, au-delà de la simple reconnaissance des joueurs, illustre le souhait du gouvernement de s’emparer du sujet dans une perspective fiscale afin que les rémunérations des joueurs, à cheval entre le salaire et les gains de jeux d’argent, n’échappent pas à l’impôt. Une espèce de pragmatisme fiscal en d’autres termes. L’amour du jeu vidéo a tout de même ses limites du côté de Bercy ou de Matignon. Le rapport des sénateurs en charge du dossier e-sport précise pourtant qu' « il n’est pas inenvisageable que la France devienne un leader » dans le secteur. De quoi motiver tous les acteurs du secteur. D’ici là, la Dreamhack de Tours devrait tout comme l’an passé avec plus de 7500 participants, illustrer à elle seule l’engouement du public français pour cette nouvelle discipline promise à un bel avenir.