Exit l’humour absurde de ses premiers albums! Désormais, Mathieu Sapin se consacre à la BD-reportage, genre dans lequel il excelle: après avoir relaté la vie au sein de la rédaction de Libération (Journal d’un journal, éd. Delcourt 2011) puis avoir suivi le candidat Hollande avant qu’il ne soit élu président (Campagne présidentielle, éd. Dargaud 2012), il s’est incrusté, un an durant, au palais de l’Élysée dont il révèle les secrets dans Le château. Retrouvez-en le détail à la suite de la preview ci-dessous. Bonne lecture!

Résumé: «Un petit bonhomme en mocassins de supermarché et costume en Lycra se présente à l’entrée de l’Élysée: «Bonjour, j’ai rendez-vous avec le président». C’est Mathieu Sapin qui, après avoir suivi la campagne présidentielle de 2012, est arrivé à s’incruster au «Château» en envoyant un SMS au président. S’ensuit un reportage trépidant (le premier du genre) sur le quotidien de l’Élysée. Un quotidien surchargé qui va de simples broutilles (on a paumé la maquilleuse du président) à des choses beaucoup plus lourdes : l’opération Serval, le scandale Cahuzac, la sécurité du président («il n’en a rien à foutre»), les déplacements officiels (Azerbaïdjan, Arménie et Géorgie en trois jours) et, pour finir, les tragiques événements de Charlie hebdo…»

L’interview intégrale de Mathieu Sapin: «L'Elysée ressemble à un musée»

«Quand on y est, c’est un endroit si impressionnant qu’on ne peut que s’y fondre», confesse Mathieu Sapin en parlant de l’Élysée. Et c’est précisément ce qu’il a fait pendant un an, jouant la «petite souris» dans les moindres recoins d’un lieu habituellement préservé du public. Et alors qu’on imagine que sa présence était tout de même relativement encadrée, il dément: «J’avais une liberté totale, on ne m’a absolument rien imposé ni même soufflé».

Un fonctionnement complexe

Résultat: une plongée captivante dans les coulisses d’un lieu «un peu mystérieux» où se jouent, finalement, toutes les décisions qui nous concernent. Outre la géographie de cet hôtel particulier érigé en 1720, on y découvre le fonctionnement des divers services (sécurité, cuisine, communication etc) qui y officient quotidiennement, mais aussi la complexité – parfois extrême — d’événements protocolaires. «La réception de la Reine d’Angleterre a, par exemple, nécessité six mois de préparatifs», révèle Mathieu Sapin.

Et la modernité, dans tout ça?

L’auteur affirme que sa motivation première était de comprendre comment un tel lieu pouvait influencer la politique qui y est menée. «Je n’aurais pas de réponse très claire à ce sujet car je ne suis pas un spécialiste, j’ai plutôt joué les candides», reconnait-il. «Mais j’ai trouvé que l’endroit était si fastueux qu’il figeait un peu les choses. Je suis persuadé que si le pouvoir était exercé dans un bâtiment plus moderne, conçu pour une efficacité optimale des services (comme Bercy, par exemple), la politique intérieure et étrangère française serait tout à fait différente».

La fonction fait l'homme

Si le lieu influence la politique, son principal locataire s’en trouve forcément affecté? «Pas tant que ça», corrige Mathieu Sapin, «François Hollande a bien changé, oui, dans le sens où il a désormais une attitude plus grave, plus solennelle, à l’image du décor dans lequel il évolue… Ça se voit même physiquement, il est plus marqué, plus tendu. Mais ça reste quelqu'un de très accessible, très affable, d'un abord et aux manières très sympathiques».

En posant sans cesse des questions à tout le monde, en restant continuellement à l’affût d’anecdotes ou de secrets d’alcôves, Mathieu Sapin révèle de vraies qualités journalistiques. Son immersion au long cours dans les coulisses du pouvoir revêt une indéniable valeur documentaire, d’autant qu’il la rapporte avec finesse, beaucoup d’humour et qu’il a le bon goût, en adoptant un discours ingénu, de s’adresser au plus grand nombre.

«Le château (une année dans les coulisses de l’Élysée)», de Mathieu Sapin - éd. Dargaud, 19,99 euros