MUSIQUEPlagiat: Pourquoi Pharell Williams et Robin Thicke n’auraient pas été condamnés en France

Plagiat: Pourquoi Pharell Williams et Robin Thicke n’auraient pas été condamnés en France

MUSIQUELa législation française sur le droit d'auteur est différente de celle des Etats-Unis...
Benjamin Chapon

Benjamin Chapon

Le monde de la musique tremble depuis la condamnation pour plagiat de Pharrell Williams et Robin Thicke. Les deux co-compositeurs du tube Blurred Lines vont devoir payer plus de sept millions de dollars aux héritiers de Marvin Gaye, qui les ont attaqués pour plagiat.

Pour de nombreux observateurs, si cette condamnation fait jurisprudence, des centaines de compositeurs pourraient, demain, être également condamnés pour plagiat. Notamment Marvin Gaye lui-même, qui s’est beaucoup «inspiré» de tubes de la Motown. Le jury a en effet statué sur une partition, et non un morceau enregistré, de Marvin Gaye.

Si les compositeurs américains sont inquiets, il y a peu de chance qu’un tel cas survienne en France. Et ce pour quatre raisons.

1. Le marché est plus petit

La condamnation de Pharrell Williams et Robin Thicke est surprenant par son montant. En France, les dommages et intérêts sont calculés sur les droits perçus sur les diffusions radio. Et quasiment aucun tube français n’a généré autant de droits dans l’histoire. L’un des plus gros litiges, concernant la chanson Si seulement je pouvais lui manquer de Calogero, a entraîné une condamnation, en première instance, à 80.000 euros de dommages et intérêts.

2. La plupart des litiges se règlent à l’amiable

Pierre Lautier, avocat spécialiste en droit de la musique, ne comprend pas que les artistes et la maison de disques «n’aient pas réglé ça à l’amiable. Cette condamnation est très mauvaise aussi en termes d’image pour ces artistes.» L’avocat explique qu’en France, une immense majorité des dossiers de plagiat ne vont pas en procès.

3. Ce sont des experts musicaux qui tranchent

Aux Etats-Unis, c’est un jury populaire qui a condamné Pharrell Williams et Robin Thicke. En France, un procès pour plagiat s’appuie sur le rapport d’expertise musicale d’experts. «Il s’agit de rapports très complets d’une vingtaine de pages établis par l’un des quatre experts judiciaires agréés auprès de la cour d‘appel de Paris, qui sont des musicologues émérites, explique Pierre Lautier. Ils analysent la mélodie, l’harmonie, la rythmique et les instruments joués. Leur travail est notamment d’écarter l’hypothèse du cas fortuit de plagiat.»

4. On garde fermée la boîte de Pandore

Contacté par 20 Minutes, l’un de ces experts musicaux explique pourquoi il y a si peu de cas de plagiats avérés qui aboutissent à une condamnation: «La musique pop et rock est ainsi faite que les morceaux qui reprennent tout ou partie d’une phrase musicale sont très nombreux. Si un tribunal commençait à condamner à tort et à travers, il condamnerait toute la filière et même un genre musical fondé sur la répétition des mêmes motifs harmoniques ou mélodiques. C’est l’essence même du tube que de puiser dans un répertoire commun.»