Festival d'Angoulême: «Cavanna nous a appris à chérir notre liberté»
AFFAIRE•Denis Robert, le journaliste à l'origine de l'affaire Clearstream, présente un documentaire sur Cavanna au festival d'Angoulême...Olivier Mimran
Tout le monde se souvient de Clearstream, un scandale politique à base de listings truqués et de manipulations politiques. Ce scandale avait été révélé par le journaliste Denis Robert, qui en tira plus tard une BD en quatre volumes, L'Affaire des affaires (dessinées par Laurent Astier). Présent à Angoulême pour promouvoir la toute récente intégrale de la série, Denis Robert y participera à la projection de L'Enquête, un film de Vincent Garenq qui est l'adaptation cinématographique de la BD. Et il présentera le documentaire qu'il vient lui-même de consacrer à Cavanna.
Une BD, un film et un documentaire. Vous savez amortir vos déplacements!
C'est vrai [rires]. Mais je suis d'abord à Angoulême pour faire la promotion de l'intégrale que Dargaud a fait des quatre tomes de la BD L'Affaire des affaires. J'en suis très satisfait parce que je savais dès le départ que la forme ultime de ce travail était un one-shot. Et puis aussi parce que l'ouvrage met en perspective de manière très particulière la France des années Sarkozy: cela dit quelque chose sur ce pays et cette époque. C'est peut-être immodeste, mais je réalise seulement maintenant que ça en fait un ouvrage de référence documentaire, non?
Le film de Vincent Garenq lui est-il fidèle?
Très! La BD a même été une sorte de bible pour le réalisateur de L'Enquête, même si le film est finalement une sorte de «clip» de la BD -sinon, cela aurait duré douze heures. Gilles Lellouche [qui interprète le rôle de Denis Robert ] m'a même confié qu'il ne serait jamais parvenu à rentrer dans le rôle sans avoir lu la BD préalablement.
Ce doit être troublant de «se voir» en héros de cinéma?
Oui, d'autant plus que le personnage que joue Gilles, et qui me représente, est en train de gagner la partie que j'ai moi-même en partie perdue, dans la réalité. Et quand je dis qu'il la gagne, c'est que 99% des gens qui le voient déclarent: «on a enfin compris cette affaire Clearstream qui nous semblait trop compliquée avant».
Vous présenterez aussi votre documentaire «Cavanna, même pas mort»...
...Consacré au grand Cavanna, oui! Je voulais le finir pour l'anniversaire de sa mort (le 29 janvier 2014) et je tenais vraiment à présenter à Angoulême. L'ironie, c'est que je n'arrivais pas à lui trouver de distributeur et que depuis les événements de Charlie Hebdo, ils se bousculent au portillon.
Comment ce projet est-il né?
Ça me trottait dans la tête depuis près de cinq ans, avant la disparition de Cavanna mais alors qu'il était déjà très affaibli... Le déclic, c'est qu'au cours d'une conférence que je donnais à des étudiants en journalisme, je crois, on m'a demandé quels étaient mes projets. Lorsque j'ai évoqué celui de Cavanna, 90% d’entre eux ne savaient pas qui il était ou le confondaient avec l'humoriste Anthony Kavanagh! On l'oubliait, donc c'était une nécessité urgente de rappeler à quel point il était important pour toute une génération. C'est quand même le co-créateur d'Hara-Kiri, de Charlie Hebdo, et il nous a appris à chérir notre liberté.
Intégrale «L’affaire des affaires», de D. Robert & L. Astier – éditions Dargaud, 34,90 euros
«L'enquête», un film de Vincent Garenq, sortie le 11 février
«Cavanna, même pas mort», de Denis Robert, sortie avril 2015