Preview BD: Découvrez les 10 premières planches de «Petit»
BD•Les éditions Soleil et «20 Minutes» ont le plaisir de vous présenter les douze premières planches de «Petit», qui revisite avec inventivité le mythe des ogres...Olivier Mimran
Les histoires d’ogres vous terrorisaient lorsque vous étiez enfant? Alors apprêtez-vous à retrouver ces sensations d’antan, toutefois remises au goût du jour par le scénariste Hubert (Le legs de l’alchimiste, Miss pas touche, Les yeux verts etc) et le dessinateur Bertrand Gatignol (Pistouvi), deux des auteurs de bande dessinée les plus doués de leur génération. Avec Petit, le duo s’empare en effet d’une des figures les plus sombres du conte de fées pour évoquer le thème, universel et intemporel, du déterminisme familial. Dans un entretien qu’il a accordé à 20 Minutes, Hubert a dévoilé les raisons (très personnelles) qui lui ont inspiré un tel récit. Retrouvez-les à la suite de la preview ci-dessous. Bonne lecture!
Les frères Grimm, Perrault, Andersen et consorts n’auraient certainement pas renié ce Petit qui emprunte à l’imaginaire qu’ils ont si brillamment développé. Mais si le conte de fées traditionnel véhicule souvent une morale, il soulève rarement, jeune public oblige, de questions existentielles. Un pas qu’ont franchi Hubert et Bertrand Gatignol en confrontant un jeune ogre au problème de la différence, comme à celui de l’inné et de l’acquis.
Un problème de taille
Né minuscule, considérant la taille habituelle des ogres, Petit est condamné à mort par son père, le Roi Ogre en personne. Mais sa mère le soustrait à ce verdict et le confie à une tante bienveillante, qui l’élève dans le respect de «l’autre». Sauf que les années passant, Petit, qui apprécie la compagnie des «simples humains», doit continuellement lutter contre sa nature pour exercer sa propre volonté. À quel genre doit-il ou veut-il vraiment appartenir?
«Si j’ai voulu écrire là-dessus», précise Hubert, «c’est suite à une maladie de ma mère qui m'a poussé à faire des recherches sur ma famille et à découvrir des tas de secrets enfouis depuis des années. Tout d'un coup, j'ai eu l'impression d'être une minuscule poupée russe dans une espèce d'emboîtement et j'ai fini par me demander dans quelle mesure je n’étais pas uniquement le produit d'une histoire familiale dont j'ignorais, en grande partie, les tenants et les aboutissants».
Le sempiternel rejet de la différence
C’est bien le dilemme qui habite Petit: quelle est la part de nos propres décisions et celle qui nous détermine? «Je me suis demandé où était mon libre arbitre dans les décisions qui m'avaient construit, et j'ai eu l'impression d'avoir finalement été programmé par tout un environnement familial», explique Hubert. «Mais Petit pose aussi la question de la différence. C'est d’ailleurs l'un des thèmes centraux de mes scénarii: comment réussir à se construire lorsque l'on se sent différent dans son environnement?»
Humanité vs bestialité
«La question du déterminisme me passionne car elle n'a jamais été tranchée jusqu'à présent, on ne sait toujours pas quelles sont les parts d'inné et d'acquis chez tel ou tel individu». Oui, enfin, un ogre reste un ogre, avec tout ce que sa nature suppose de bestialité, non ? «On a tous, en chacun de nous, un penchant pulsionnel qu'on essaie de contrôler. Pourquoi un ogre ne s’y essaierait-il pas?», nous rétorque Hubert.
On voit qu’on est loin des bouffonneries de Shrek dans ce magnifique (les dessins de Gatignol sont à tomber à la renverse) album de 152 pages, tout en bichromie, qu’il est fort conseillé de déposer au pied du sapin… mais plutôt dans les chaussons des grands que dans ceux des petits, qui risqueraient d’être choqués par la crudité –certaines scènes frisant le gore- de son passionnant propos.
«Petit», d’Hubert & Bertrand Gatignol - éditions Soleil, 26 euros