Le Renaudot pour Foenkinos: «J’étais aussi en lice pour rien»
CULTURE•Favori pour le prix Goncourt, David Foenkinos a finalement été couronné du Renaudot…Annabelle Laurent
Il était favori pour le Goncourt. Ce sera finalement le Renaudot, alors à sa descente du taxi, devant le restaurant Drouant qui retrouve son calme après la secousse de l’annonce du Goncourt, remis à Lydie Salvayre, difficile de ne pas lui poser la question perverse: déçu? «Oh non! C'est étrange comme question», dit-il tout sourire face aux caméras auxquelles il accorde, comme à son habitude, patiemment du temps. «C'est tellement un prix exceptionnel le Renaudot. J'ai eu Daniel Pennac au téléphone à 13h, qui avait eu le Renaudot par exemple, un auteur que j'aime et j'admire. J’étais en lice pour les deux prix, mais j’étais aussi en lice pour rien, je pouvais n’avoir aucun des deux».
Un hommage à Charlotte Salomon
Succédant à Yann Moix, David Foenkinos l'a emporté au 6e tour par 5 voix contre 3 à Jean-Marc Parisis et une à Kamel Daoud. L’auteur de la Délicatesse s’est aventuré avec Charlotte sur un thème plus grave que d’habitude, en rendant un hommage personnel, sous forme de vers libres, à l’artiste Charlotte Salomon, assassinée en 1943 à Auschwitz. Et les lecteurs ont suivi. Sorti fin août chez Gallimard, Charlotte a été écoulé à 180.000 exemplaires et se place dans le top 10 des ventes. Il est même numéro 1 dans le cœur des libraires. Le Renaudot devrait décupler ce succès, et l'éditeur Gallimard annonçait déjà ce mercredi une réimpression de 100.000 exemplaires.
«J’ai erré dans le parc de Bercy en attendant».
«Ce matin, j’avais envie d’être tout seul, j’ai erré dans le parc de Bercy en attendant. Ça a été pour moi un bonheur incroyable», a poursuivi David Foenkinos. «C’est la consécration suprême d’un travail de plusieurs années. Ce livre, je l’ai abandonné, repris. C'est un livre qui aurait pu être confidentiel par la forme, le sujet.» Tout est parti de la découverte des tableaux de Charlotte Salomon, «il y a huit ans. Ça a été vraiment un choc esthétique majeur dans ma vie, et ça ne m’a jamais quitté. J’ai mis des années à retrouver des documents, des témoins, à aller sur tous les lieux de sa vie, à savoir comment écrire ce livre surtout.»
Franz-Olivier Giesbert: «Je peux vous citer tous ses livres»
David Foenkinos a ses fans, mais aussi ses détracteurs, et le seul fait qu’il soit en lice pour les deux prix consternait certains. Pas les jurés du Renaudot. A côté de la petite salle de restaurant où ils déjeunaient dans un calme surprenant, Franz-Olivier Giesbert expliquait que pour une fois, «le choix était venu très vite.»
Est-ce une consécration pour un auteur de best-sellers? «Pour moi, il était dans la cour des grands bien avant. C’est un écrivain qui traite avec humour, drôlerie et légèreté de sujets importants comme l’amour ou moins importants comme le mal de dos… Il y a déjà une œuvre, La délicatesse, Je vais mieux, je peux vous citer tous ses livres», assure Franz-Olivier Giesbert. Quant au registre inhabituel de la gravité, «il l’avait déjà exploité dans Souvenirs, commente le juré. Là il y revient, mais j’espère qu’il reviendra vite aussi sur le registre de la légèreté.»