A Tokyo, les musiciens de demain tissent leur réseau
MUSIQUE•La Red Bull Music Academy accueille des jeunes musiciens du monde entier pendant un mois à Tokyo…Envoyé spécial à Tokyo, Benjamin Chapon
Tous les ans, pendant un mois, une ville accueille la Red Bull Music Academy. Après New York et avant Paris en 2015, Tokyo est jusqu’à mi-novembre la ville hôte de cet événement lancé en 1998. Si des concerts et autres événements artistiques sont organisés pendant un mois, la RBMA se distingue par sa partie privée. Soixante jeunes musiciens, tendance électro branchée, passent deux semaines en vase clos dans un immeuble de la ville où Red Bull a installé des studios remplis de matériel haut de gamme et où ont lieu des conférences données par des pointures de la scène musicale internationale.
Sous des apparences de coolitude absolue, la RBMA n’est pas la Red Bull Music Holidays. Les participants sont fortement incités à être présents chaque matin et à s’impliquer à fond dans l’idéal de partage que cultive Torsten Schmidt, cofondateur de l’événement. « Il n’y a que huit studios pour trente participants, ils sont obligés de travailler ensemble. Si vous avez énormément de talent, vous n’avez fait que la moitié du chemin avant d’être invité à la RBMA. Nous cherchons des artistes avec de grosses qualités humaines, des gens intelligents et ouverts». 6000 musiciens ont été candidats pour l’édition de Tokyo.
Pas de pression
«Ce sont eux qui sponsorisent le mieux la musique contemporaine aujourd’hui, explique la française Lafawndah qui ne ressent aucune gêne à l’idée de participer à une campagne marketing pour une marque. Ils ont été capables de créer des connexions entre pleins de super-artistes. La RBMA est devenue une institution.»
La jeune artiste confesse qu’elle aurait hésité à participer à une telle entreprise il y a dix ans. «Depuis, ils ont fait leurs preuves. Ça m’honore de faire partie de cette famille-là. Et puis ils ne m’ont jamais rien demandé.» Même son de cloche du côté de La Mverte, autre artiste français de la RBMA Tokyo: «Ils m’ont accueilli dans leur studio à Paris, gratuitement et sans aucune contrepartie. Ils sont vraiment cool avec ça.»
Pas de leçon
«C’est presque trop facile pour eux, rigole DJ Krush, confortablement installé dans un des nombreux fauteuils design de la RBMA. Moi, quand j’ai débuté, j’étais ouvrier sur les chantiers pour gagner ma vie. La musique électronique et le hip-hop n’existaient pas au Japon.»
Le mythique producteur a donné un concert exceptionnel, dans la cour du musée d’art national avec des musiciens traditionnels japonais, dans le cadre de la RBMA. Mais il n’a pas donné de cours: «Je n’ai aucun conseil à donner parce que je continue d’apprendre de la musique. Devenir musicien réclame d’avoir en soi quelque chose d’unique qui ne s’explique pas.»