L’ouverture des musées sept jours sur sept créé la polémique
MUSEE•Le Louvre, le musée d’Orsay et le château de Versailles vont inaugurer l’expérimentation de l’accueil du public toute la semaine...Benjamin Chapon
Passée relativement inaperçue au milieu de la communication du budget de l’Etat pour 2015, l’annonce de l’ouverture, sept jours sur sept, des musées du Louvre d’Orsay et du château de Versailles fait débat depuis plusieurs mois.
Fleur Pellerin, ministre de la Culture, a annoncé que cette réforme ne se ferait pas avant trois ans, le temps de mener des «concertations avec l’ensemble des partenaires» et des «études d’impact sur l’affluence et sur les recettes.» Mais en coulisses, la controverse est déjà violente.
L’exemple étranger
Pour justifier cette réforme, ses défenseurs rappellent que plusieurs grands musées anglo-saxons, de Londres à New York et Berlin, et certains musées espagnols, ouvrent déjà sept jours sur sept. Certains d’entre eux sont également gratuits (voir encadré).
L’ouverture sept jours sur sept fait partie d’une réflexion générale sur un meilleur accueil du public et un confort accru de la visite des musées. Les trois établissements sélectionnés frôlant la saturation. Or, les anti 7/7 craignent que cette réforme horaire n’améliore en rien les visites. Bien au contraire.
Ouvrir pour mieux fermer
«La difficulté majeure est le nettoyage des salles, reconnaît Anna Saunders, en charge de la logistique au British Museum. Nous fermons certaines salles au cours de la journée pour quelques heures.» Des salles sont également fermées, en cours de journées, pour permettre aux conservateurs le travail sur des œuvres, qu’il s’agisse de mouvements d’œuvres (prêts, restaurations, études…) ou d’études sur place.
Pour réaliser l’ampleur des travaux réalisés les jours de fermeture, il suffit de taper le mot-dièse #jourdefermeture sur Twitter où de nombreux musées, de toutes tailles, postent des images des agents au travail.
Le secret de la pyramide
Henri Loyrette, qui a largement développé l’activité de mécénat quand il était président du musée de Louvre, a rappelé que le mardi, jour de fermeture, était devenu le jour d’accueil des grands mécènes. Quasiment chaque mardi soir, la pyramide du Louvre est par ailleurs louée à prix d’or pour des événements privés.
Pour continuer d’assurer ce service payant essentiel à son économie, le Louvre devra fermer plus tôt. Un responsable au musée d’Orsay note d’ailleurs que pour des questions de gestions des ressources humaines, l’ouverture sept jours sur sept aura pour conséquence de faire fermer les musées plus tôt.
Les conservateurs échaudés
Enfin, vient la question de la conservation. Lumière et poussière forment un cocktail mortel pour les œuvres d’art, notamment les plus anciennes. De nombreux conservateurs craignent que sans le jour de fermeture, qui est un jour de repos pour elles, les œuvres ne se dégradent un peu plus.
«Exposer une œuvre, c’est l’abîmer mais la vocation d’un musée est de montrer ses œuvres», répond un conservateur du musée du Louvre qui se reconnaît minoritaire dans le débat interne.
Le mardi chinois
«Ouvrir sept jours sur sept, c'est contribuer à ce que Paris reste la première destination touristique au monde. C'est freiner la frustration de Chinois qui ne passent à Paris que 24 ou 48 heures et trouvent porte close», explique Michel Guerrin dans Le Monde.
Plutôt qu’accueillir mieux, l’abolition du jour de fermeture est perçue par beaucoup comme un moyen d’accueillir plus. Et d’augmenter les recettes de musées qui voient leurs subventions fondre inexorablement.