Eric Ruf veut «inscrire la Comédie-Française dans le présent»
THEATRE•Eric Ruf présentait ce mercredi son projet pour les prochaines années à la tête de la maison de Molière...S.L. avec AFP
Comédien, scénographe et metteur en scène issu de la troupe, Eric Ruf a exprimé ses quatre volontés pour l’avenir de la Comédie-Française: attirer de grands metteurs en scène étrangers, trouver la «salle modulable» dont rêvaient ses prédécesseurs, attirer de grands metteurs en scène étrangers, faire revenir la troupe au festival d’Avignon et propulser la maison de Molière «dans le présent».
Arrivé le 4 août dans le fauteuil de Muriel Mayette après une âpre guerre de succession, cet artiste de 45 ans, dont 20 passés à la Comédie-Française, a pour lui sa connaissance intime de la maison: «J’ai vu à quel point quand les gens ont des envies de réformes à coup d’épaule, ça ne passe pas». Il sait aussi qu’il arrive en période de disette budgétaire: «Il n’y a plus d’argent pour débaucher de grands metteurs en scène étrangers en leur promettant monts et merveille», a-t-il convenu, comptant sur son «opiniâtreté» pour les faire venir.
Répertoire moderne ou pièces marathon
Comme ses prédécesseurs, Eric Ruf va militer pour une nouvelle salle, modulable, permettant de placer les gradins autour de la scène (en «bi frontal» ou «quadri frontal»), de jouer un répertoire moderne ou des pièces marathon comme «Le soulier de satin» de Claudel. Cette salle, un projet de longue date, Muriel Mayette avait tenté de l’installer aux forceps en région parisienne à Bobigny en 2008, contre l’avis du directeur du théâtre local MC 93 Patrick Sommier, et sans consulter sa propre troupe. Un autre projet, sur une friche adossée à l’Opéra Bastille n’a pas non plus abouti, victime de la rigueur budgétaire.
Conscient de la difficulté, Eric Ruf parie sur un lieu de théâtre inutilisé ou un bâtiment ancien, «halle ou ancienne usine de type Eiffel, construite très solidement au début du siècle», plutôt que sur la construction d’un nouveau théâtre. Ainsi, la maison pourrait faire venir des troupes étrangères pour une sorte de «festival des troupes de théâtre», coproduire des spectacles à grande échelle, comme ce «Peer Gynt» que Ruf lui-même avait mis en scène au Grand Palais en 2012. Il rêve aujourd’hui de monter «Peer Gynt» dans la carrière de Boulbon du festival d’Avignon, avec lequel il veut renouer après 20 ans d’une «absence criante, dérangeante».
La saison qui commence ayant été concoctée par Muriel Mayette, il faudra attendre 2015-16 pour commencer à voir son empreinte. «Il faut des metteurs en scène qui soient capables d’une lecture du présent […] d’une vision et qui n’aient pas peur du spectacle», a souligné Eric Ruf, sans citer de noms. «Cette maison est aimantée vers son passé, vers sa mission patrimoniale, c’est normal parce que ses outils sont tellement beaux, mais il faut incessamment travailler pour l’inscrire dans le présent.»