Rentrée littéraire: On a lu... «Un monde flamboyant» de Siri Hustvedt
RENTREE LITTERAIRE (8/10)•Elle est l'un des auteurs les plus attendus de la rentrée littéraire: l'Américaine Siri Hustvedt revient avec un thriller intellectuel et féministe...Armelle Le Goff
Depuis le succès international en 2003 de son troisième roman, Tout ce que j’aimais, Siri Hustvedt est très attendue par ses lecteurs. Son nouveau roman, qui paraît le 2 septembre chez Actes Sud, nous plonge dans les coulisses de l’art contemporain new-yorkais.
>> Retrouvez par ici nos lectures de «L’amour et les forêts» d’Eric Reinhardt, «Peine Perdue» d’Olivier Adam, «Charlotte» de David Foenkinos, «Viva» de Patrick Deville, «Pétronille» d’Amélie Nothomb, «Oona & Salinger» de Frédéric Beigbeder et «Le Royaume» d’Emmanuel Carrère. Et pour conclure notre série des têtes d’affiche, bientôt sur 20 Minutes: Haruki Murakami et Laurent Mauvignier.
La première phrase: «Toutes les entreprises intellectuelles et artistiques, plaisanteries, ironies et parodies comprises, reçoivent un meilleur accueil dans l’esprit de la foule lorsque la foule sait qu’elle peut, derrière l’oeuvre ou le canular grandiose, distinguer quelque part une queue et une paire de couilles.»
En trois mots: Siri Hustvedt retrace la vie de Harriet Burden, une plasticienne fictive évoluant dans le monde de l’art new-yorkais.
Le pitch: Après la disparition d’Harriet Burden, un universitaire (I.V.Hess) cherche à comprendre son existence et son œuvre, considérée comme relativement mineure. Il découvre que «Harry», veuve d’un célèbre galeriste new-yorkais, bien qu’ayant proposé deux expositions en son nom, a ensuite utilisé des prête-noms masculins pour présenter ses travaux, persuadée que cela modifierait l’accueil de son travail. Mais le troisième «masque» masculin n’a pas respecté les termes du pacte artistique…
On lit… ou pas? Oui. La construction du livre, qui donne la parole aux différents cercles de Harriet Burden, est assez fascinante. Ils portent tous un regard sur l’artiste, nourri par ce que ce personnage fantasque et complexe leur a donné à voir. Il y a ce qu’ils savent et ce qu’ils croient savoir. Il y a surtout ce qui est dépeint de l’exigence de création face à la fatuité et la misogynie du monde de l’art new-yorkais. On pense naturellement à l’artiste new-yorkaise Louise Bourgeois. Et même à l’auteur, elle-même, new-yorkaise et épouse de l’écrivain Paul Auster (lire ci-dessous). Mais, même si l’écriture (et la traduction) est d’une grande subtilité, l’ensemble, très marqué par les théories psychanalytiques, est moins enlevé que Tout ce que j’aimais, l’un de ses plus beaux romans.
>> Par ici, toute la rentrée littéraire sur «20 Minutes»
L’anecdote: Siri Hustvedt est l’épouse de Paul Auster, et, on peine à ne pas lire dans ce portrait de femme torturée par le manque de reconnaissance artistique ses propres préoccupations. «Pères, maîtres et amants suffoquent la réputation des femmes. […] Avec les femmes, c’est toujours personnel, amour et saloperies, qui elles baisent», fait-elle dire à Harriet Burden.
L’enjeu: Auteur confirmé, Siri Hutsvedt reste peu connue par rapport à son mari Paul Auster, célèbre auteur de la Trilogie new-yorkaise, francophone et chouchou du public français. Pourra-t-elle s’imposer avec ce roman? On en doute… Car Un monde flamboyant reste peu accessible, évoluant dans le monde des artistes et galeristes new-yorkais.
Un bon livre pour… Ceux qui se posent des questions sur la création, s’intéressent au monde de l’art, à la psychanalyse et aux études de genre.
Une mauvaise idée pour… Ceux qui y sont allergiques.
Un monde flamboyant, Actes Sud, 402 pages. Sortie le 3 septembre 2014. Traduction Christine Le Boeuf.