MUSIQUEJeanne Cherhal: «Je suis une sauvageonne du piano»

Jeanne Cherhal: «Je suis une sauvageonne du piano»

MUSIQUELa chanteuse sort un quatrième album après quelques années de doute… Jusqu'au jour où survint Véronique Sanson...
Benjamin Chapon

Benjamin Chapon

En pleine crise d’inspiration, Jeanne Cherhal a retrouvé la foi dans sa plume à la faveur d’un concert hommage à Véronique Sanson. Remontée à bloc, elle a écrit et enregistré son quatrième album, Histoire de J., son plus intime et introspectif, mais aussi son plus beau.

L’album a été enregistré très rapidement, avec peu de musiciens. Pourquoi ?

Je ne sais pas, ça me semblait la manière la plus juste de procédé pour ces chansons là. J’ai enregistré avec trois musiciens que je connais bien. On a beaucoup répété en amont pour pouvoir enregistrer en situation de live. Sans jeu de mots, je voulais que ça sonne «vivant». On a trouvé un son spontanément.

Votre précédent album avait un format très pop. Et vous y jouiez de tous les instruments.

Avec le recul, je réalise que ce n’était pas ce qui m’allait le mieux. Mais je ne regrette pas, j’avais besoin de ça à ce moment là.

Pourquoi ?

«Charade», c’était mon egotrip. J’avais envie de me prouver que je pouvais le faire. C’est fait. L’avantage de pouvoir déléguer, comme je l’ai fait sur cet album, est que je peux me concentrer sur ma voix et, paradoxalement, chanter plus simplement. Sans boucle, sans empilement.

Cette esthétique là, conjuguée à des textes intimes donne l’impression d’un album très personnel.

Intime, oui. Personnel, je ne sais pas. Le titre de l’album, Histoire de J. est arrivé tout à la fin de l’enregistrement. Quand je l’ai trouvé, j’ai eu un sentiment de bien-être, un vrai truc physique de soulagement. Ce titre dit bien ce que je ressens sur ces textes.

C’est vous sans être vous ?

Les paroles d’une chanson osée comme «Cheval de feu», je serai incapable de les dire dans le quotidien. C’est la même chose avec «Comme je t’attends». Mon besoin d’enfant est un tabou absolu. Je n’en parle jamais.

Mais vous arrivez à chanter ses chansons devant des milliers de personnes.

Oui, c’est étrange, je sais. Mais c’est comme ça. En chansons, je peux tout dire.

Cet album fait également la part belle au piano, votre instrument de prédilection.

Moi, je suis une sauvageonne du piano, j’ai appris en autodidacte. Pour les besoins d’un concert en hommage à Véronique Sanson, à la Cité de la Musique, j’ai du beaucoup travailler. Je jouais ses morceaux en boucle tous les jours. Ça m’a fait redécouvrir ma relation avec l’instrument. Comme toute histoire d’amour, ça se travaille.

Vous avez fait cet hommage pour retrouver l’inspiration?

Oh non, pas au départ. Je l’ai fait par admiration et par amour. Je ne voulais pas attendre qu’elle soit morte pour le faire.

Avez-vous envisagée de faire un album et une tournée avec ces reprises?

Bien sûr, ma maison de disques me l’a proposé. Mais j’ai toujours peur qu’on analyse mal mes démarches. Quand je fais des chansons liées à l’actualité sur internet, je fais toujours attention à ce que ça le soit en dehors du marché. Je ne veux pas qu’on m’accuse d’opportunisme.

D’autres artistes, comme Daphné avec Barbara ou Jenifer avec France Gall, ont fait des albums hommage.

Dans mon cas, je crois que ça aurait été interprété comme une grosse panne.

Mais vous étiez en panne justement non ?

Euh, oui, mais c’était aussi bien que ça ne se sache pas trop (rires). J’étais en jachère totale, pas du tout en disposition de création. Découvrir le répertoire de Véronique Sanson, ça m’a remis le pied à l’étrier, ça a été comme un déclic.

Et à partir de là, tout a été plus simple?

Simple? Ah non, moi, je ne sais pas faire simple. J’étais assaillie par le doute. J’ai dû passer par beaucoup d’étapes. Heureusement, ma maison de disques ne m’a pas pressée.

Comment jugez-vous le résultat?

Je ne sais pas si j’en suis contente mais avoir fini ce disque me rend heureuse. Les premiers retours sont bons. Des gens m’ont dit qu’il était lumineux. Ça suffit à mon bonheur.