BDAstérix, un Gaulois qui a encore la cote

Astérix, un Gaulois qui a encore la cote

BD«Astérix chez les Pictes», 35e album de la série, sort ce jeudi et la BnF consacre une exposition au petit Gaulois...
Olivier Mimran

Olivier Mimran

À quelques jours de la sortie dAstérix chez les Pictes, 35e album de la série, et alors que la BnF a inauguré mercredi une exposition consacrée à son univers, l’irréductible petit Gaulois alimente toutes les conversations. Mais comment un simple héros de BD a-t-il acquis une telle popularité? Et pourquoi cela n’est-il pas prêt de cesser, alors même qu’il vient de changer de scénariste et de dessinateur? Eléments de réponses.

Le plus franchouillard des héros de BD ?

Depuis 1959, date de la création d’Astérix par René Goscinny et Albert Uderzo, les Gaulois sont perçus comme un peu naïfs, râleurs… mais surtout insoumis et bagarreurs. Et leurs descendants, dont certains restent marqués par l’occupation allemande, apprécient ce trait de caractère. «Astérix, c’est un peu "Les Français parlent aux Français"», confirme à 20 Minutes Pascal Ory, qui enseigne l’histoire à la Sorbonne et a écrit une biographie de Goscinny en 2007*. Avant de s’étonner: «Paradoxalement, le village gaulois s’est révélé un microcosme dans lequel se retrouvent aussi de nombreux lecteurs étrangers». Un caractère «national» que nuance pourtant Nicolas Rouvière, universitaire et critique de bande dessinée (qui a consacré deux ouvrages à Astérix **): «Astérix ne représente pas l’esprit français en tant que tel –un concept discutable– mais plutôt l’image stéréotypée que nous en avons. Et il la pousse à de tels excès de caricature que le lecteur s’en détache pour en rire. Tout cela doit être pris au second degré». De fait, la série est traduite en 111 langues. Le «sale» caractère d’Astérix serait donc plus universel qu’il n’y paraît.

La révolution entretiendra-t-elle le succès ?

Ceci explique peut-être le phénoménal succès commercial de la série, vendue à près de 350 millions d’exemplaires (Lucky Luke en totalise 250 millions et Tintin, 230 millions). Et c’est bien parti pour durer, selon Jean-Pierre Nakache, gérant de la librairie parisienne Bulles en tête: «Ça fait un moment que les clients nous demandent la date de sortie du prochain album, mais surtout des infos sur l’histoire! Ils sont nombreux à l’attendre fébrilement». Seule interrogation: la reprise de la série par Jean-Yves Ferri et Didier Conrad –Uderzo, 86 ans, se disant «fatigué»– sera-t-elle à la hauteur des attentes des lecteurs? Difficile à dire, tant règne l’opacité sur le livre (un blocus est savamment organisé par l’éditeur, mais quelques cases publiées sur le Net rassurent tout de même quant au respect de la «charte» graphique). «Hergé a refusé que Tintin lui survive. Et dans un premier temps, Astérix ne devait pas non plus survivre à ses créateurs», précise Pascal Ory, mais «des logiques commerciales sont entrées en jeu», que ne connaissent que quelques personnes dans le secret des dieux.

Toujours est-il que légitime ou pas, réussi ou non, ce passage de témoin a peu de chances d’éreinter la série (la reprise de Lucky Luke par Achdé et Laurent Gerra a même dopé les ventes du titre) tant plusieurs générations de lecteurs restent attachées à Astérix. Surtout que «son lectorat est divers –au contraire de celui de Tintin, essentiellement masculin–, et plutôt adulte. Mais ces adultes ne manquent pas d’initier leurs enfants à l’univers d’Astérix», selon Jean-Pierre Nakache. La relève semble donc déjà assurée.

* Pascal Ory - Goscinny. La liberté d’en rire (Perrin, 2007) 10 euros

** Nicolas Rouvière
Astérix ou les lumières de la civilisation (PUF, 2006) 24 euros
Astérix ou la parodie des identités (Champs Flammarion, 2008) 8,75 euros