CINEMAComment la comédie française a retrouvé le sourire

Comment la comédie française a retrouvé le sourire

CINEMAEn excellente forme selon les chiffres 2011, la comédie française s'est renouvelée ses dernières années. A l'occasion des 15 ans du Festival de film de comédie de l'Alpe d'Huez, 20 Minutes fait le point...
L'équipe du film «Plan de Table», de Christelle Raynal, qui a fait l'ouverture du Festival de l'Alpe d'Huez, le 17 janvier 2011
L'équipe du film «Plan de Table», de Christelle Raynal, qui a fait l'ouverture du Festival de l'Alpe d'Huez, le 17 janvier 2011 - PLV/SIPA
Charlotte Pudlowski

Charlotte Pudlowski

De notre envoyée spéciale à l'Alpe d'Huez

Intouchables : 18 millions d’entrées. Les pirates aux yeux charbon et reporters à houppette peuvent se rhabiller. Mais avec Rien à Déclarer, Les femmes du 6e étage, Case Départ, Les Tuche, les comédies françaises ont réuni en 2011 plus de 31 millions d’entrées. Pendant ce temps-là, Hollywood fait des remakes…

Libérer les acteurs

Au Festival du film de comédie de l’Alpe d’Huez, qui fête ses quinze ans, l’enthousiasme est palpable. «Avant la comédie c’était ringard, c’est devenu un genre respecté, respectable et financé!» se réjouit Stéphane Freiss, venu présenter son court-métrage It is Miracul’House. «Les acteurs ont subi une frustration pendant une période. On ne nous donnait pas les rôles dont nous avions envie. Le cinéma était accaparé par un cénacle qui ne semblait plus croire aux acteurs». Lui qui a joué sous la direction d’Agnès Varda dans Sans Toit ni Loi se souvient dans un sourire que la réalisatrice «préférait chercher un amateur qui souffrait plutôt qu’un acteur qui allait exprimer la souffrance»

Cette frustration de ne pouvoir «ni voir les comédies qu’ils voulaient, ni avoir les rôles qui leur faisaient envie, a incité les acteurs à réaliser eux-mêmes», explique Stéphane Freiss. Dans la comédie française, les casquettes d’acteurs ou de réalisateurs se mélangent en effet. Géraldine Nakache, Jean-Paul Rouve, ou Gilles Lellouche, qui préside le jury du festival, en sont la preuve.

A bas la caricature

«Les comédies ont connu un creux pendant les années 90», juge Romain Lévy, 34 ans, qui présente au Festival son premier film, Radiostars, avec Manu Payet. «On allait au cinéma et on se disait: moi ma vie c’est pas ça. »

Les réalisateurs se sont donc échinés à faire des films plus en phase avec leur époque. «C’est toujours séduisant de voir des personnages qui sont vraiment dans leur époque. C’est le cas pour Les Petits Mouchoirs, qui a cartonné par exemple», suggère Arié Elmaleh, à l’affiche de Plan de Table, qui a fait l’ouverture du Festival.

Finie l’image d’une France d’un autre temps et d’autres mœurs? «Par exemple les femmes ont plus de place dans la comédie, elles sont moins des faire-valoir», se réjouit Audrey Fleurot, présidente des Etats-Unis dans Mais qui a retué Pamela Rose?, film pour lequel l’actrice assure avoir eu «carte blanche». «Il y a aussi de plus en plus de femmes qui écrivent, et c’est une très bonne nouvelle». Elle cite les deux auteures de la série «Vous les femmes» : Judith Siboni et Olivia Côte. Mais Géraldine Nakache ou Lisa Azuelos sont d’autres exemples. Le festival de l’Alpe d’Huez s’est ouvert avec Plan de Table, signé Christelle Raynal. «Quand les filles écrivent pour elles, elles ne sont pas là pour mettre en valeur les mecs ou jouer le dindon de la farce» se félicite Audrey Fleurot.

Stand-up, télé, ciné

En même temps que les métiers se décloisonnaient, les médias aussi. Pour Jérémie Imbert, auteur de Les Comédies à la française (au Cherche Midi), c’est notamment Internet qui a permis un brassage général des talents, depuis une dizaine d’années. «Auparavant, on avait par exemple Les Nuls qui venaient de la télé mais c’était de la parodie, des films référentiels. Aujourd’hui il y a un échange d’idées et d’univers assez forts». «Il y a notamment une nette influence du stand-up dans la comédie actuelle», renchérit Arié Elmaleh. Scène, télé, ciné se sont en effet partagés par son frère Gad Elmaleh, ou Jean Dujardin, Omar Sy… Pauline Lefèvre, passée du Grand Journal au grand écran, acquiesce: «C’est important d’avoir un autre réservoir de tronches et de talents: ça décuple les possibilités».

Or ces autres mondes ont des traditions moins «élitistes» avance Romain Lévy, qui a écrit pour le petit écran, par exemple pour le Burger Quiz sur Canal +. «La télé, tu as le sentiment que tu seras moins difficilement jugé. Et c’est une école de l’humilité: même si tu fais un truc génial, le lendemain, c’est oublié. Et l’idée c’est de faire des choses simples, grand public, moins de mettre ton identité artistique, voire ton nombril en avant. Forcément après, c’est plus facile ensuite d’appliquer le mot d’ordre de Hitchcock qui disait que l’art du cinéma, c’est celui de remplir les salles…»

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