un poème très inspiré
•beau mélo « Poetry », du Coréen Lee Chang-dong, prix du scénario à Cannes, fait chavirer les cœursStéphane Leblanc
Lee Chang-dong, poète envers et contre tout. L'ancien romancier coréen offre avec Poetry un film éblouissant d'humanité, en dépit de tous ses handicaps. Car il n'est pas seulement question ici de poésie, mais aussi d'Alzheimer, de viol, de suicide… Pour résumer, disons que l'héroïne est une vieille dame qui s'initie à la poésie au moment où elle commence à perdre la mémoire et qu'une succession de drames éclate dans sa vie.
« Pas qu'une jolie petite fleur »
Malgré un prix du scénario à Cannes pour son récit subtil et audacieux, le film a fait un bide en Corée. « Avant même de tourner, on m'avait prédit un échec commercial, ironise le réalisateur d'Oasis et de Secret Sunshine. Mais j'avais envie de relever ce défi. »
Pour autant, Poetry n'est pas un film « poétique » à proprement parler : rien de méditatif ou d'onirique dans cette histoire qui déploie toute la palette des sentiments humains. « La poésie n'est pas qu'une jolie petite fleur, prévient Lee Chang-dong. Pour moi, c'est le monde, la vie. Malgré la saleté, la laideur extérieure, il y a toujours quelque chose qui est beau à l'intérieur. »
A la comédienne Yun Jung-hee, ancienne star des années 1960-1970, le cinéaste a demandé de « se mettre dans la tête d'un élève naïf qui pense qu'un maître est si parfait qu'il n'a pas besoin d'aller aux toilettes ». Résultat, le film ne manque pas de candeur et d'excentricité. « La poésie est partout, et surtout en chacun de nous », se justifie Lee Chang-dong. Comme une lueur d'espoir dans un mélo qui, par délicatesse, refuserait de faire couler trop de larmes, trop facilement.