Sur la route des grands départs estivaux, un couple se déchire. C’est le point de départ de Feux rouges, adapté d’un roman de Georges Simenon. Le livre a tellement marqué Cédric Kahn qu’il a souhaité transposer sa « première impression de lecteur, très forte » sur grand écran. Avant même que ses héros prennent place dans leur voiture, il fait monter subrepticement la tension. Jean-Pierre Darroussin, amoureux transi de sa femme, tente d’oublier dans la bière qu’il la trouve trop bien pour lui. Carole Bouquet, froidement belle, s’affaire, entre travail et maison. Le réalisateur de L’Ennui les présente séparément avant d’embarquer le spectateur dans l’habitacle réduit de leur véhicule. Là, les mots durs fusent jusqu’à ce que la femme, exaspérée, décide de poursuivre le voyage en solitaire. Il serait dommage d’en révéler davantage sur le parcours du couple tant les rebondissements de ce suspense intimiste sont habilement dosés. « J’ai été fasciné par l’omniprésence de la route, la quête du personnage principal, le fait de suivre un homme qui semble aller droit dans le mur, mais qui, au fond, cherche à se reconstruire, à se réconcilier avec son entourage et avec lui-même », explique le réalisateur. Jean-Pierre Darroussin a rarement été aussi touchant que dans la peau de ce Monsieur tout-le-monde qui se cherche dans l’ivresse. Carole Bouquet livre également une prestation subtile, idéal féminin dont la profonde fragilité apparaît au fil du récit. Ils traduisent parfaitement le cheminement douloureux de gens ordinaires que la confrontation à des événements hors du commun fait sortir des droits chemins. Caroline Vié