Mathieu Kassovitz: «Michael Haneke nous faisait la bise le matin»
FESTIVAL DE CANNES•Mathieu Kassovitz joue le frère d’Isabelle Huppert dans « Happy End », film qui s’amuse à faire imploser de l'intérieur une grande famille bourgeoise.Propos recueillis à Cannes par Stéphane Leblanc
Mathieu Kassovitz n’est pas le genre de type à faire des compromis. Ni à garder sa langue dans sa poche. 20 Minutes a rencontré l’acteur et réalisateur en tête à tête au Festival de Cannes.
Il est comment, Michael Haneke, quand on le côtoie tous les jours ?
Il fait la bise le matin. Ce n’est pas un Autrichien froid qui reste dans son coin. Il aime la vie. Il aime la bouffe. Il aime les femmes… il aime sa femme, déjà ! C’est généralement ceux qui ont le plus d’empathie pour les gens qui critiquent le mieux la société. Sinon on ne peut pas. Si c’est juste pour cracher sur les gens, ce n’est pas intéressant.
Et sur le tournage ?
Il est très méticuleux, mais on ne se rend pas toujours compte de ce qu’on tourne. Lui essaie de saisir la bonne expression, au bon moment et on attend souvent longtemps, que le maître ait capté précisément ce qu’il voulait, même si toi tu ne sais pas de quoi il s’agit. Isabelle (Huppert) me disait parfois qu’elle n’en pouvait plus. Mais en voyant le résultat, elle ajoutait que c’était tellement fort qu’à la fin elle y revenait toujours.
Et toi, tu voudras revenir s’il te rappelle ?
Sans problème ! Son œuvre est intègre, elle est pure, elle n’est pas compromise. Quand j’étais débutant avec Gaspar Noé, on regardait des films gore, des films fantastiques, des films de Verhoeven, des films de Cronenberg et des films de Michael Haneke !
Happy End a été hué par une partie de la critique et des festivaliers… ça t’inspire quoi ?
Oh ! Moi, je m’en fiche… Au contraire de Michael qui lui est très sensible à la critique. Il veut plaire au public, il veut être reconnu. Moi j’ai une vision différente. Quand on a dit que j’étais le pire cinéaste de ma génération avec Assassin(s) après avoir dit que j’étais le meilleur deux ans plutôt avec La Haine, ça veut dire quoi ? De toute façon je m’en bats les couilles. Si tu aimes c’est super, si tu n'aimes pas, c’est encore mieux : on apprend plus des critiques négatives que des bonnes.
Et qu’apprends-tu de la déferlante de commentaires qui arrive sur ton fil Tweeter ?
Tweeter, j’essaie de m’en servir avec humour. Quand je m’en prends à Dupont-Aignan, mon insulte se met à son niveau. Sans lui donner la moindre ouverture pour discuter. Les politiciens ont horreur de ça…