Gilles Marchand: «La forêt est un endroit où l’on va pour se retrouver mais où on peut se perdre»
THRILLER•Les bois sont des personnages à part entière pour «Dans la forêt», conte vénéneux de Gilles Marchand...Caroline Vié
Gilles Marchand emmène le spectateur dans les bois avec un papa et ses deux fistons. Dans la forêt angoisse en douceur quand le trio perdu dans une cabane au milieu des arbres s’éloigne doucement de la civilisation sans qu’on sache s’ils la retrouveront un jour.
Jérémie Elkaïm, en papa écolo et possessif, fait monter la tension autour de ses gamins qu’il retient près de lui. Est-il dangereux ou pas ? « Je voulais qu’on sente qu’il est capable de tout », explique Gilles Marchand à 20 Minutes.
Un univers protecteur et menaçant
« La forêt est un endroit où l’on va pour se retrouver mais où on peut se perdre, insiste Marchand. C’est ce contraste qui m’intéressait. » Il y a comme une présence qui se dégage de ce décor sauvage enrobant les héros dans un univers à la fois protecteur et menaçant. « Les arbres les regardent : ils étaient là avant eux et seront sans doute là après. » Le réalisateur de Qui a tué Bambi ? (2003) et L’autre monde (2010) joue aussi avec sa bande-son pour inquiéter un spectateur qui retrouve ses peurs d’enfant en même temps que les héros.
Retour à la nature
C’est en Suède que Gilles Marchand, qui fut aussi scénariste pour Dominik Moll, a tourné ce conte sombre sur fond de paternité douloureuse. « C’est un pays que l’on cite souvent en exemple pour son côté civilisé mais qui recèle des coins restés complètement sauvages. » Tandis que la forêt est, petit à petit, grignotée par les humains qui la détruisent, ce père s’y enfonce profondément en entraînant ses fils. « Le retour à la nature poussé à ce point a quelque chose d’inquiétant que je voulais souligner », insiste le réalisateur. Deux jeunes acteurs remarquables, Théo Van de Voorde et Timothé Vom Dorp, soutiennent efficacement la performance de Jérémie Elkaïm.
L’étoffe des cauchemars
« Tous se sont laissés envoûter par les bois, leurs parfums et leur mystère », se souvient Gilles Marchand. Cette histoire qui flirte avec le fantastique, joue sur les sens de son public, libre d’interpréter à sa guise chaque action du papa souffrant d’être séparé de ses enfants. « Je me suis très librement inspiré de ma situation avec mon père », avoue Gilles Marchand. C’est peut-être parce que Dans la forêt s’appuie sur un socle autobiographique que le film dérange autant. Sans faire couler une goutte de sang, cette œuvre vénéneuse est de l’étoffe dont on fait les cauchemars.