Le jury du Festival de Cannes explique pourquoi il a couronné Audiard
JURY•Le jury des frères Coen a justifié ses prix devant les journalistes...De notre envoyé spécial à Cannes, Stéphane Leblanc
«La décision de remettre la palme d’or à Dheepan a été rapide, nous étions tous enthousiastes par rapport à ce film que nous avons trouvé magnifique ». Ethan Coen n’a pas tari d’éloges sur le film de Jacques Audiard. Et Jake Gyllenhaal a enfoncé le clou : « Il y a dans ce film trois étrangers qui ne se connaissent pas et qui deviennent une famille et qui vont s’aimer, malgré l’adversité. Je n’avais personnellement jamais vu un film sur l’immigration ou les migrants qui présente les choses de cette façon-là et ça nous a beaucoup touchés. »
« Comment ne pas être touché par le destin de ces gens que nous voyons dans la rue et dont nous ne savons rien », confirme Rossy De Palma. « Qu’il s’agisse d’un sujet d’actualité n’est pas entré en ligne de compte, nuance Rokya Traore : c’était juste notre film préféré. »
L’émotion provoquée par « Le Fils de Saul »
Dès lors, le reste du palmarès est apparu plus disputé. « Lorsque nous sommes sortis de la projection du Fils de Saul, il a fallu beaucoup attendre avant de pouvoir nous parler », raconte Xavier Dolan apparemment encore ému. Tout comme Sienna Miller qui n’avait « jamais vu le sujet périlleux [des camps de concentration] traité de cette façon-là, à travers le point de vue d’une seule personne ».
C’est Joel Coen qui a défendu Assassin, le film de sabre médiéval chinois de Hou Hsiao-hsien, « un film remarquablement réalisé, que nous avons récompensé pour des critères esthétiques », tandis que Guillermo Del Toro a estimé que Cronic, de son compatriote mexicain Michel Franco, était « une façon merveilleuse de parler de la mort sans sombrer dans le mélodrame, avec un personnage, incarné par Tim Roth, inouï dans sa façon de se reconstruire. » Xavier Dolan a aimé « la façon dont le script était construit, sa précision ».
Impossible de donner le prix d’interprétation à trois actrices
Sur les « oubliés » du palmarès, les questions n’ont évidemment pas manqué de fuser. Pourquoi Cate Blanchett, la moitié du duo lesbien de Carol qui a vu Rooney Mara recevoir un prix ex aequo avec Emmanuelle Bercot, a-t-elle été privée de palmarès ? « On ne pouvait pas donner le prix à trois actrices », justifie Ethan Coen. Et les Italiens, complètement absents ? « C’est dommage qu’il n’y ait pas de prix pour les seconds rôles, regrette Rossy De Palma : l’actrice qui joue la mère de Nanni Moretti dans Mia Madre l’aurait mérité. »
Ethan Coen reconnaît que « ces mêmes films présentés à d’autres personnes que nous auraient donné des résultats tout à fait différents ». « Au moins tous les films que nous avons défendu sont au palmarès. », précise son frère Joel. Et Guillermo Del Toro de conclure : « Un palmarès est par nature insatisfaisant, mais nous avons fait de notre mieux. »