«Hyena»: Comment rendre passionnant un héros lâche et corrompu
CINEMA•Ce polar brutal tourne autour d'un flic peu recommandable dont le réalisateur fait émerger l'humanité...Caroline Vié
Gerard Johnson n'a vraiment gâté le personnage principal de Hyena, prix du Jury au Festival du film policier de Beaune. Ce flic corrompu ne fait vraiment pas honneur aux forces de l'ordre. Drogué, vendu, lâche et mal embouché, ce sale bonhomme se retrouve envoyé comme taupe chez des gangsters albanais encore plus pourris que lui, des ordures qui pratiquent la traite des blanches et liquident brutalement ceux qui dérangent leur commerce. Voici un extrait du film:
Un pourri au milieu des salauds
«Je trouvais intéressant d'essayer de rendre attachant ce type qui n'a absolument aucune morale et qui est prêt à trahir ses proches si cela doit lui permettre de se tirer d'affaires», explique le cinéaste qui ne prend pas de gants pour filmer des scènes incroyablement brutales. Viol, découpage de cadavre et passages à tabac mortels sont au programme. «Pour que le personnage prenne toute son ampleur, il était indispensable que le spectateur comprenne qu'il n'évolue pas dans un milieu d'enfants de chœurs», insiste-il. Les frères mafieux qu'il poursuit et rackette sont parmi les bandits les plus terrifiants qu'on a vus depuis longtemps.
Un acteur complice
Après avoir donné le rôle d'un tueur en série dans son premier long-métrage Tony (2009), le réalisateur a de nouveau confié le rôle principal à Peter Ferdinando, vu dans Les poings contre les murs (2014) de David MacKenzie. «Peter a cela d'étonnant qu'il parvient à rendre intéressant un parfait salaud. Même lorsqu'il se conduit de façon inexcusable, le public prend le parti de son personnage». Gerard Johnson n'est pas le premier à mettre en vedette une ordure. Le récent Hard Day de Kim Seong-Hun faisait de même en rendant sympathique un policier ripoux, mais ce film à l'humour très sombre n'avait pas le côté réaliste propre à Hyena.
Des choses qu'on ne peut montrer au cinéma
«Je n'ai pas voulu mettre la police sur la sellette, précise Gerard Johnson, mais plutôt jouer sur l'ambiguïté des sentiments d'un spectateur plongé brusquement dans un univers dont les codes lui sont étrangers». Après s'être livré à des recherches sur la mafia des pays de l'Est, le cinéaste avoue être resté en deçà de la réalité. «Il se passe des choses vraiment atroces dans ces gangs qu'il est absolument impossible de montrer au cinéma. On comprend que les flics qui infiltrent leurs rangs perdent la boule», dit Johnson. Une scène finale culottée laisse sur les charbons ardents renforçant le processus d'identification du spectateur pour un homme confronté à un choix terrible.