Roy Andersson, un cinéma du froid à découvrir d'urgence
CINEMA•Avec «Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence», Roy Andersson signe un film aussi tordant que singulier...Caroline Vié
Quiconque imagine que le cinéma suédois est sinistre comme une pub pour chewing-gum au goût étrange n'a jamais vu un film de Roy Andersson. Avec Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l'existence, ce maître de l'absurde a décroché le Lion d'or de la Mostra de Venise en signant un film tordant sur les petits travers de ces concitoyens. 20 Minutes explique pourquoi son cinéma est à découvrir au plus vite...
Ces personnages sortent vraiment de l'ordinaire
Dans Un pigeon..., le réalisateur a choisi comme fil rouge deux représentants en farces et attrapes amorphes vendant des gags ringards dont un dentier de vampire hideux. Au gré de leurs visites, le duo patibulaire croise des êtres aussi paumés que lui, brocardant impitoyablement l'espèce humaine. «D’une certaine manière, cela provient de mon enfance, des membres de ma famille qui vendaient des choses, explique le cinéaste. Le vendeur est universel, la vie peut se résumer plus ou moins à ça».
Ses films sont immédiatement indentifiables
De longs plans fixes dans lesquels les personnages évoluent comme des pierrots lunaires sont la marque de fabrique du réalisateur. On est constamment bluffé par la beauté de ses cadrages évoquant des tableaux animés. Le défilé d'une bande de marins payant une serveuse de bar d'un baiser est emblématique d'un style très personnel lui a valu d'être honoré au MoMA de New York. «Cette façon de travailler me permet de situer les personnages dans l’univers qui les entoure au lieu de les isoler», dit-il.
Son humour noir est un pur régal
Le cinéaste s'amuse comme un petit fou à multiplier les gags macabres. Ce dernier volet de ce qu'il appelait la «Trilogie des Vivants», entamée avec Chansons du deuxième étage (2000) et Nous, les vivants (2007), présente trente-neuf saynètes où le rire grince dans la gorge. Une première séquence autour de morts subites donne le ton. «Au fond, peu importe la position qu’on a dans la société, les gens sont sensibles et vulnérables, estime-t-il. C’est principalement ça que je cherche à illustrer dans mon travail.»
Il y en aura encore...
Roy Andersson a finalement annoncé qu'il envisageait de tourner un quatrième volet sur l'humanité et ses tares. «Mon prochain film sera encore plus fou, prévient-il. Mais je n'abandonnerai jamais le probable et le possible. Mon cinéma doit être attaché à un certain pragmatisme, une sorte de réalisme stylisé.» Espérons que, contrairement aux précédents opus, il ne faudra pas attendre sept ans pour découvrir le prochain épisode.