CINEMA«Il n’est pas facile d’être un dieu»: Le chef d'oeuvre ultime d'un cinéaste russe

«Il n’est pas facile d’être un dieu»: Le chef d'oeuvre ultime d'un cinéaste russe

CINEMACette fresque intensément belle est à découvrir dans les salles, tandis que la Cinémathèque française rend hommage à son réalisateur disparu en 2013...
Caroline Vié

Caroline Vié

Réalisateur de Mon ami Ivan Lapchine (1984) ou de Kroustaliov, ma voiture (1998), Alexeï Guerman (1938-2013) n'est connu que d'une poignée de cinéphiles. La sortie en salles de son ultime chef-d'œuvre Il est difficile d'être un dieu, assortie d'une rétrospective à la Cinémathèque, devrait remettre ce grand cinéaste à sa place: au firmament des grands réalisateurs russes.

Un duo gagnant

«Il y a une heure et demie d'introduction sur trois heures de projection, déclare Svetlana Karmalita, veuve du cinéaste et coscénariste d'Il est difficile d'être un dieu. Je comprends les spectateurs qui auront du mal. Mais on gagne souvent avec Alexeï, car j'ai constaté peu de départs dans les salles où je l'ai présenté». Il serait mensonger de qualifier cette magnifique fresque en noir et blanc, inspirée d'un roman d'Arcadi et Boris Strougatski, d'œuvre facile. Les aventures d'un homme sombrant dans la folie alors qu'on le prend pour une divinité dans un monde extraterrestre aux allures médiévales sont aussi envoûtantes que déroutantes.



Un génie éblouissant

Svetlana Karmalita est admirative de l'œuvre de son compagnon. «J'ai du talent, mais lui avait du génie, dit-elle. Je comprenais le scénario quand nous travaillions ensemble mais, très vite, plus personne ne parvenait à le suivre sur le tournage». Le fait que les prises de vue se soient étendues sur plusieurs années n'a pas aidé à clarifier la vision de l'équipe. Cette fable foisonnante est si puissante et si riche qu'on ne sait plus où donner des yeux et que le spectateur a l'impression de plonger dans le cerveau du maître. Mouvements de caméra vertigineux, gros plans et scènes délirantes, parfois très gore font bon ménage dans cet univers de chaos.

Un succès en Russie

«Lorsque Alexeï a montré le film terminé à l'équipe, nous étions tous sidérés, se souvient Svletana Karmalita, non parce que nous doutions de lui, mais parce qu'il était encore plus fort que ce que nous attendions». Contre toute attente, et à la grande surprise de ses producteurs, Il est difficile d'être un dieu a attiré de nombreux spectateurs en Russie.«Le public doit être plus intelligent qu'on l'imagine», s'amuse la septuagénaire qui continue à assurer son rôle de productrice tandis que leur fils, Alexeï Guerman Jr, a pris la relève en signant Under Electric Clouds, présenté cette année au Festival de Berlin.