Festival de Sundance: Les abus sexuels des fondamentalistes mormons cibles d'un documentaire choc
CINEMA•Amy Berg dénonce dans un documentaire les agressions sur les enfants et abus sexuels commis par les fondamentalistes mormons...Alice Coffin
Une réalisatrice américaine, qui s'était déjà penchée sur le cas de prêtres catholiques pédophiles, s'est intéressée aux abus sexuels de fondamentalistes mormons dans Prophet's prey (La proie du prophète), un documentaire projeté cette semaine à Sundance.
Le film précédent de la réalisatrice américaine Amy Berg, Délivrez-nous du mal, se focalisait notamment sur un prêtre déplacé de paroisse en paroisse aux Etats-Unis dans les années 70 pour tenter de dissimuler les viols qu'il avait commis sur des dizaines d'enfants. Prophet's prey braque cette fois les projecteurs sur les abus sexuels pratiqués contre des enfants dans une branche radicale de l'église mormone, l'église fondamentaliste de Jésus-Christ des Saints des Derniers jours (FLDS), qui a fait scission de la principale église mormone, l'église de Jésus-Christ des Saints des Derniers jours (LDS), au début du vingtième siècle.
C'est le second documentaire présenté cette année à Sundance qui dénonce les dérives de sectes, après Going Clear, sur la Scientologie. Prophet's prey s'est notamment inspiré des recherches de Sam Brower, auteur d'un livre éponyme, et de celles du journaliste Jon Krakauer.
Le film s'intéresse en particulier à Warren Jeff, prophète autoproclamé de l'église FLDS, condamné à la prison à perpétuité en 2011 pour détournement de mineurs et complicité de viols. La réalisatrice Amy Berg dit avoir été fascinée par son personnage après avoir entendu l'un de ses sermons. «Je n'ai pas compris (...) Il a une voix monotone, aucun charisme, ses chemises sont trop grandes, il n'est rien de ce qu'on aurait pu attendre d'un leader religieux. J'ai eu envie d'en savoir plus».
La FLDS compte environ 10.000 membres et a récemment ouvert de nouvelles antennes dans le Dakota du Sud, avec des communautés établies en Oklahoma, Floride, Colorado, Texas et en Arizona près de la frontière avec le bastion mormon de l'Utah (ouest des Etats-Unis). Ses adhérents pratiquent toujours la polygamie et lors du tournage se sont montrés hostiles envers l'équipe du film. «Chaque fois que nous arrivions, nous étions suivis par des camions blancs, des gens nous lançaient des bouteilles d'eau, a raconté la réalisatrice. Mon directeur de la photographie a même été heurté au visage par une pierre, on se demandait ce qui se passait. C'était fou!».
Distinguer église et fondementalistes
Dans le documentaire, d'anciens membres de la secte racontent les mariages de mineurs, les accusations de viols, les règles totalitaires qui régissent le groupe. Amy Berg fait une claire distinction dans son film avec la branche principale de l'église mormone. «J'espère que nous serons soutenus par l'église LDS car ce film montre qu'ils sont différents (...) et que la LDS n'a plus rien à voir avec la polygamie », a-t-elle déclaré. «Là, il s'agit d'agression sur des enfants, d'abus de pouvoir, d'avidité et de manipulation de gens, de lavage de cerveau», a énuméré la réalisatrice qui entend élargir sa recherche à la façon dont «la violence et les abus peuvent toucher la société toute entière. C'est une histoire importante qui a une connotation plus large que la seule communauté des mormons», a-t-elle souligné.
Au moment de la projection du film au festival de Sundance, qui se termine ce week-end dans les montagnes de l'Utah (ouest des Etats-Unis), des chefs de l'église LDS tenaient non loin de là, à Salt Lake City, une rare conférence de presse sur la question des homosexuels et des droits religieux. Ils ont notamment appelé à passer des lois pour protéger dans tout l'Etat les homosexuels et lesbiennes contre toutes formes de discrimination à l'emploi et au logement... Tant que de telles mesures ne mettent pas en danger la liberté religieuse.