Bordeaux : « Il faut que le RER métropolitain soit notre métro »
INTERVIEW•En plein débat sur les mobilités, « 20 Minutes » a interrogé le président de Bordeaux Métropole Alain Anziani, qui revient sur le développement des cars express, et la montée en puissance du RER Métropolitain, qui doit suffire pour absorber le flux de nouveaux voyageursPropos recueillis par Mickaël Bosredon
L'essentiel
- Après Bordeaux-Créon, Bordeaux Métropole va créer cinq nouvelles lignes de car express, dont la première vers Blaye.
- Le RER Métropolitain continue sa montée en puissance, et atteindra bien une fréquence d’un train tous les quarts d’heure, mais pas avant une dizaine d’années.
- Alain Anziani milite par ailleurs en faveur d’une tarification unique, avec un billet qui doit permettre de prendre à la fois le RER, le tram et le bus.
Que faire face au « mur des mobilités » qui attend Bordeaux Métropole à l’horizon 2030 ? Alors que les débats sur les déplacements sont de plus en plus électriques, que les défenseurs d’un métro à l’échelle de l’agglomération sont de plus en plus nombreux, 20 Minutes a interrogé le président de Bordeaux Métropole Alain Anziani, qui maintient que le schéma des mobilités adopté en 2021, doit suffire à absorber les nouveaux voyageurs attendus sur le réseau ces dix prochaines années.
Bordeaux Métropole vient d’adopter le renforcement du réseau de cars express autour de l’agglomération. En quoi cela consiste-t-il ?
La première ligne de car express, entre Bordeaux et Créon, a été un véritable succès. Avec 750 voyageurs par jour, c’est nettement supérieur aux estimations qui avaient été faites. On a fait une étude nous montrant que l’on peut faire le même type de transport entre Bordeaux et Blaye, puis l’ouest de l’agglomération, le Médoc, le bassin nord et le Val de l’Eyre. Ce sont des projets que l’on porte avec la région Nouvelle-Aquitaine, le département et Nouvelle-Aquitaine Mobilités (NAM). Il nous faut un aménagement routier de cinq branches, à des coûts relativement modestes, de l’ordre de 60.000 euros par ligne. La plus simple c’est Bordeaux-Blaye, pour qui on vise une mise en service en septembre 2023. Pour les autres ce sera certainement entre 2024 et 2025.
Un projet plus structurant à venir, c’est celui du RER Métropolitain, qui a démarré avec la ligne Libourne-Arcachon. Où en est-on ?
Beaucoup de gens pensent que le RER est un projet qui va arriver dans l’avenir, alors qu’effectivement il a bel et bien commencé avec la ligne Libourne-Bordeaux-Arcachon. Cela démarre aussi entre Saint-Mariens et Langon. La projection sur Libourne-Arcachon c’est 30.000 voyageurs par jour et de l’ordre de 21.000 pour Saint-Mariens-Langon. C’est quand même significatif. Progressivement, nous augmentons le nombre de trains sur ces lignes-là. Ensuite, toute l’ambition repose sur l’amélioration de la cadence et de la régularité, pour arriver à un train toutes les demi-heures, et dans une dizaine d’années à un train tous les quarts d’heure.
Le but est bien d’atteindre une fréquence d’un train tous les quarts d’heure sur les branches du RER ?
C’est certain, et on est bien d’accord avec la SNCF : pour que ce soit efficace, le RER doit atteindre un train tous les quarts d’heure. Il faut que ce soit notre métro à nous.
La plupart des observateurs reconnaissent l’utilité de ce RER, mais pour beaucoup il n’est toutefois pas à la hauteur des enjeux de mobilité sur la métropole à l’échéance de 2030, et certains soulignent même que créer des lignes diamétrales qui vont d’un bout à l’autre du département, sans changement à Bordeaux, a relativement peu d’intérêt. Que leur répondez-vous ?
L’intérêt de la diamétralisation, c’est qu’il n’y ait plus de changement de train à Bordeaux. Une fois que l’on a mis cela en place, effectivement l’objectif ne sera pas nécessairement de faire du Saint-Mariens-Langon ou du Libourne-Arcachon, mais on pourra faire des portions de trajet, de Cenon à Pessac par exemple, sans changement de train. On gagne en rapidité. Sur le volume, moi je souligne que pour l’instant les trains ne sont pas complets, il y a donc de la capacité. Mais il faut mettre en place une politique de communication autour de ces déplacements en train, qui n’est pas à la hauteur aujourd’hui. Mais il faut surtout régler les problèmes tarifaires : mon combat est d’obtenir un titre unique de transport, qui permette de prendre le RER, le tram et le bus, comme à Paris. Mais ce sont des discussions très lourdes avec la Région et la SNCF.
Et le métro ? L’association Métro de Bordeaux continue de militer en sa faveur, ainsi que les maires de droite de Bordeaux Métropole. Vous y êtes toujours opposé ?
Un métro c’est uniquement à l’intérieur de l’agglomération, quand le RER va bien au-delà. Or, une grande partie des gens qui circulent dans l’agglomération, arrivent de l’extra-métropole. L’autre question, c’est : est-ce qu’on peut tout payer ? Deux milliards d’euros pour un métro, en plus du RER ? Et si on fait un métro, cela bouleverse complètement le paysage urbain, il faut des emprises considérables. En général, on fait un métro avant le tramway. Le faire après, cela veut dire reformater tout le paysage urbain…
Malgré tout, y aura-t-il une étude sur le métro, réclamée notamment par les maires de droite ?
On peut faire une étude, mais elle-même va coûter très cher, et ça va être très long. Est-ce nécessaire et utile de faire un métro, alors qu’on est passé à autre chose ? Je rappelle quand même que le métro avait été enterré par Alain Juppé et ses amis, c’est quand même étonnant qu’aujourd’hui ces derniers viennent le réclamer à nouveau…
Pour vous, les réponses qui sont en train d’être mises en œuvre aujourd’hui, seront donc suffisantes pour affronter ce « mur des mobilités » qui attend l’agglomération en 2030 ?
Il n’y a pas de solution miracle. Regardez à Toulouse, il y a un métro et ils ont quand même des embouteillages considérables. Il faudra donc une pluralité de solutions, et parmi elles je souligne que la mise à deux fois trois voies de la rocade va enfin se terminer. Je crois beaucoup au RER Métropolitain, au tram, et nous allons étudier les possibilités de l’améliorer, et au bus dont il faut améliorer la vitesse commerciale. L’objectif restant d’offrir une alternative à la voiture.
Notre dossier sur les transports
Et où en est le projet de téléphérique ?
On est dans la phase de concertation, et après il faudra prendre une décision pour son implantation, entre Lormont-Cenon d’un côté, et du côté de la Cité du Vin ou plus proche du centre-ville, de l’autre. Ce n’est ni anecdotique, ni folklorique. C’est une vraie solution pour passer d’une rive à l’autre, même si, évidemment, elle ne réglera pas à elle seule tous les problèmes ! Mais enfin, ce sera quand même 15.000 passagers par jour.