Gironde : Que pense le public du projet de parc solaire Horizéo ?
ENVIRONNEMENT•La commission nationale du débat public a échangé avec le public entre septembre 2021 et janvier 2022 sur le projet de plateforme bas carbone d’HorizéoElsa Provenzano
L'essentiel
- Le projet Horizéo, plateforme d’énergies renouvelables porté par Engie, Neoen et RTE, comprend notamment le défrichage de 1.000 hectares de forêt en Gironde pour l’installation d’un parc solaire.
- La Commission nationale du débat public a été mandatée par l’Etat pour organiser des échanges sur ce projet d’ampleur.
- Elle a présenté son bilan à la presse ce mercredi, et le porteur de projet devra proposer une version amendée dans trois mois.
C’est un des plus gros projets de parc solaire en Europe à l’heure actuelle. Un projet de plateforme d’énergies renouvelables porté par Engie, Neoen et RTE à Saucats en Gironde, comprend notamment l’installation d’un parc solaire sur 1.000 hectares de forêt à défricher. De septembre 2021 à janvier 2022, la Commission nationale du débat public (CNDP), saisie par l’Etat, a organisé des échanges sur le sujet avec les habitants et les acteurs locaux. La mission de la Commission nationale du débat public est de produire « une photographie de ce que pense le public », tient à préciser Chantal Jouanno, sa présidente. « On doit mettre sur la table l’ensemble des critères de décision », ajoute Jacques Archimbaud, président de la commission particulière du débat public sur le projet Horizéo.
Une soixantaine d’initiatives ont été organisées par la CNDP pour rencontrer et échanger avec le public et environ 3.000 personnes y ont participé. Plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont informées via des plateformes, vidéos et réseaux sociaux mobilisés pour l’occasion. Le porteur de projet est qualifié « de bonne foi » et a répondu aux différentes sollicitations de la commission.
L’équité territoriale en question
Il ressort de ce débat que ce n’est pas le principe du photovoltaïque qui soulève des oppositions mais sa localisation. « On sent tous qu’on a besoin de beaucoup de photovoltaïques, et d’énergies renouvelables au sens large, on va le sentir encore plus dans les mois et années à venir au vu de l’actualité, mais la question c’est avec quelle équité sociale territoriale ? », rapporte Jacques Archimbaud, insistant sur le sentiment du public que l’effort doit être partagé. Etat et collectivités territoriales sont sommés par le public de rapidement évoquer la répartition des efforts sur les énergies renouvelables.
En plus de sa localisation, c’est la taille du projet, jugé industriel pour la commune périurbaine de Saucats, qui inquiète les participants. Il ressort que le public a le sentiment que les attributions se font au coup par coup au gré des opportunités foncières, sans stratégie politique énergétique globale alors même que les objectifs en matière d’énergies renouvelables sont ambitieux et vont forcément nécessiter de prendre des espaces (naturels, agricole etc. )
Changer nos consommations ?
« Auparavant la question de la sobriété était assez peu portée par le grand public et cela a émergé dans ce débat, observe Chantal Jouanno. On est en train de comprendre que si on veut faire la transition énergétique, il va falloir d’abord penser sobriété avant de penser production énergétique ».
Pour la première fois, souligne la présidente de la CNDP, un data center a été mis en débat public et cela a fait apparaître des questions liées au numérique responsable. Et il est aussi qualifié de « maillon faible du projet », résume Jacques Archimbaud, puisque c’est le seul élément du projet qui n’est pas démontable.
Des recommandations à prendre au sérieux
La CNDP recommande notamment au maître d’ouvrage d’ouvrir un site d’information sur le sujet, d’associer le public et les acteurs locaux au suivi des études et d’organiser des réunions publiques. Elle lui enjoint de réaliser des études complémentaires sur les risques incendie, inondation, biodiversité etc. Mais aussi, à communiquer davantage sur le déploiement concret des compensations et sur les retombées possibles pour les Saucatais. Il est à noter que le public serait rassuré par l’entrée au capital et ou à la gouvernance du projet d’un acteur public.
Le porteur de projet a trois mois pour dire ce qu’il retient de ce débat public et ce qu’il choisit de modifier. « Dans 58 % des cas, les projets sont modifiés après un débat public », pointe Chantal Jouanno. La CNDP s’assure que sa réponse est complète et argumentée, sans se prononcer sur le fond. Des garants seront désignés par la commission pour suivre l’avancée du projet. Suivront études environnementales et les demandes d’autorisation de rigueur auprès de l’Etat jusqu’à l’enquête publique. « D’expérience, quand on n’écoute pas les enseignements majeurs d’un débat public, il y a peu de chance que ça aille au bout », avertit Chantal Jouanno. Des exemples comme Notre-Dame-des-Landes et EuropaCity sont là pour en témoigner.