Bordeaux : « Ce n’est pas à un ancien maire d’inaugurer la place Gambetta » lance Nicolas Florian
POLITIQUE•L’ancien maire LR Nicolas Florian a organisé dimanche une inauguration officieuse de la place Gambetta, histoire de pousser le maire Pierre Hurmic dans ses retranchements
Mickaël Bosredon
L'essentiel
- Leader de l’opposition de droite, l’ancien maire de Bordeaux Nicolas Florian a voulu faire un coup politique en organisant un rassemblement de militants et d’élus autour de lui, dimanche place Gambetta.
- Héritage de l'époque Juppé, la rénovation de la place Gambetta avait été combattue par l'actuel maire Pierre Hurmic, lorsqu'il était dans l'opposition.
- Plusieurs associations se sont par ailleurs invitées à ce rassemblement, rappelant le combat qu’elles avaient mené contre l’abattage de dix-huit marronniers sur cette place.
Du monde, une banda… Et même des opposants venus contre-manifester. La « célébration » de la place Gambetta à Bordeaux par l’ancien maire Nicolas Florian (LR) avait tout d’une inauguration officielle, même si ce n’en était pas une.
Peu importe, l’ambition du leader du groupe d’opposition Bordeaux Ensemble était bien de... couper l'herbe sous le pied à son adversaire, et réaliser un coup (politique) à plusieurs bandes. Nicolas Florian (LR) souhaitait à la fois sonner le rassemblement de militants et d’élus autour de lui, alors qu’il ne cache pas son ambition de reconquérir la mairie, et tenter d’enfermer Pierre Hurmic dans une position de « militant » coincé dans sa « posture »…
Une manifestation « pas très correcte » ni « très démocratique » estime Nicolas Florian
« Cela fait bientôt un an que cette place a été rouverte, après deux ans de travaux et près de dix millions d’euros d’investissement, a rappelé Nicolas Florian dans son discours. L’ambition était d’en faire un jardin à l’anglaise. Effectivement, il y a eu des arbres qui ont été abattus, on le regrette tous, mais il y a en a eu 77 de plantés et aujourd’hui c’est un succès. Alain Juppé qui avait lancé ce projet dès 2014 aurait d’ailleurs aimé être avec nous, mais il est au Québec. »
Hué par des membres d’associations opposantes qui s’étaient invitées sur place, pour rappeler leur combat contre l’abattage de dix-huit marronniers, Nicolas Florian a estimé que ce n’était « pas très correct » ni « très démocratique. » Et il a pu dégainer ses attaques contre son adversaire. « Ce n’est pas à un ancien maire d’inaugurer cette place, a-t-il lancé à la foule, il aurait été normal que la municipalité actuelle le fasse ».
« Quand je redeviendrai maire en 2026… »
Il n’a pas manqué de rappeler que Pierre Hurmic, alors dans l’opposition, avait donné de sa personne contre ce projet. « On se souvient tous de ces images d’un maire - à l’époque il ne l’était pas - enchaîné aux arbres accompagné de quelques-uns de ses amis… Mais la continuité républicaine, le sens des responsabilités quand on est maire de toutes les Bordelaises et tous les Bordelais, aurait été de saluer le travail qui a été fait. »
Interrogé peu après, Nicolas Florian pense que Pierre Hurmic « est prisonnier de son équipe, et de sa posture, or il est maire de Bordeaux maintenant. » « Quand je redeviendrai maire en 2026, a ajouté le leader de l’opposition, j’inaugurerai des choses que Pierre Hurmic aura lancées. »
« Cette place est un contresens écologique » assure l’adjoint à la nature
Contacté par 20 Minutes, Didier Jeanjean, adjoint au maire en charge de la nature, évoque pour sa part la « cohérence politique » pour justifier que la majorité n’a pas souhaité organiser d’inauguration officielle. « Cette place est très esthétique, oui il y a du monde qui la fréquente ce qui est normal d’ailleurs, mais c’est un contresens écologique, assure-t-il. On a abattu dix-huit marronniers de 70 ans, c’est irremplaçable, et c’était totalement inutile, on a supprimé une mare de 500 m2 qui accueillait de la biodiversité… Moi, ce que je regrette, c’est que l’on désinforme et que l’on essaie de faire un coup politique autour de cette place. »
Membre du Groupe national de surveillance des arbres, Valérie Bernede explique de son côté qu' « en 1950, lorsque la place "d’avant" avait été aménagée, les Bordelais se plaignaient déjà que le centre-ville était trop brûlant, et qu’ils avaient besoin de fraîcheur et de nature. Et qu’a-t-on fait pour remédier à cela ? On a enlevé dix-huit arbres qui sont des capteurs de carbone et des centres de fraîcheur, alors qu’ils étaient matures et au summum de leurs bienfaits écosystémiques. C’est une aberration… »
« On veut donner une image de carte postale à Bordeaux »
Pour Philippe Bourglan, membre d’Aux Arbres Citoyens, l’aménagement de la place « a été réalisé en dépit du bon sens, avec une fontaine en pierre, des bordures bétonnées… Certes c’est joli, ça délimite bien, mais ça manque de verdure. Cette inauguration aujourd’hui est décalée. » « On veut donner une image de carte postale à Bordeaux, très propre, ajoute Valérie Bernede. Il ne faut pas que les arbres, ni l’herbe, ne dépassent. Chaque chose à sa place. Mais on y vit à Bordeaux, et on a besoin d’espaces naturels. »
Maire LR de la ville voisine du Bouscat, Patrick Bobet était aussi du rassemblement aux côtés de Nicolas Florian, en qualité d’ancien président de la métropole. « J’ai beaucoup poussé pour que ce qu’Alain Juppé avait lancé se concrétise, et c'est un succès, assure-t-il. J’ai moi-même eu il y a douze ans la même histoire autour de la place Gambetta au Bouscat. Lors des travaux, il a fallu déplanter une quinzaine d’arbres, cela a été très contesté, mais on en a replanté, et douze ans plus tard tout le monde est ravi, nous avons tous oublié cet épisode. Les arbres naissent, vivent et meurent, je pense que ces dix-huit marronniers, ce n’est pas le vrai sujet, dans dix ans tout le monde aura oublié. » Et en 2026 ?