INTERVIEWLa métropole de Bordeaux « pas anti-voiture » mais « anti-bouchons »

Bordeaux : « Je ne suis pas anti-voiture, je suis anti-bouchons et anti-pollution » lance le vice-président aux mobilités de la métropole

INTERVIEWLe nouveau vice-président de Bordeaux métropole en charge des mobilités et maire de Bègles, l’écologiste Clément Rossignol-Puech, fait le point pour « 20 Minutes » sur la stratégie de déplacements envisagée ces prochaines années
Mickaël Bosredon

Propos recueillis par Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • Clément Rossignol-Puech n'enterre pas le tramway, mais prévient qu'on « ne pourra pas continuer d'étendre ce réseau à l'infini ».
  • Le maire de Bègles n'exclut pas par ailleurs de proposer une nouvelle étude sur le métro.
  • Sa priorité reste de diminuer le trafic routier, pour cela il compte beaucoup sur les autoroutes à vélos.

Maire de Bègles, Clément Rossignol-Puech (EELV) a été propulsé à la faveur de l’élection d’une nouvelle majorité de gauche à la métropole, vice-président en charge des mobilités. Fonction hautement stratégique, au regard des enjeux pour les dix prochaines années sur l’agglomération.

Clément Rossignol-Puech, mairie EELV de Bègles, vice-président de Bordeaux Métropole en charge de la mobilité
Clément Rossignol-Puech, mairie EELV de Bègles, vice-président de Bordeaux Métropole en charge de la mobilité - Mickaël Bosredon/20Minutes

Où en êtes-vous de votre réflexion sur l’avenir du tramway sur la métropole : stop ou encore ?

Le tramway a un avenir radieux sur la métropole. Nous avons le plus grand réseau de tram de France, et personne ne parle de fermer des lignes. En revanche, on ne pourra pas continuer d’étendre ce réseau à l’infini. Concernant les projets de prolongement jusqu’à Saint-Médard-en-Jalles et jusqu’à Gradignan, nous nous sommes engagés à mener des études complémentaires dont nous aurons les réponses dans les prochaines semaines. Il faudra comparer avec la possibilité de bus à haut niveau de service (BHNS), qui sont aujourd’hui très performants. Je comprends les maires qui défendent leurs territoires, mais un bon maire n’est pas forcément un maire qui amène le tramway sur sa commune. Il faut rester raisonnable. Parallèlement, nous menons une réflexion plus globale pour voir s’il n’y a pas d’autres corridors prioritaires qui pourraient émerger, comme une liaison circulaire sur les boulevards.

Et il y a aussi le projet de RER métropolitain, qui est peut-être plus compliqué à mettre en œuvre que prévu, non ?….

Il y a quand même aujourd’hui une vraie volonté de développer les RER métropolitains en France, et Bordeaux est la métropole la plus avancée. La première diamétrale Libourne-Arcachon via la gare de Bordeaux commencera à entrer en service à la mi-décembre. Et même s’il y a de gros travaux à faire, l’infrastructure est là avec notamment les 18 gares de l’agglomération qu’il va falloir transformer en 18 pôles multimodaux, pour avoir des TER cadencés au quart d’heure. Bassens-Pessac se ferait ainsi en quelques minutes. On parle de trois lignes de diamétralisation d’ici à 2028, ce qui représenterait 60.000 voyageurs/jour, même si je pense que c’est sous-estimé. Et ce sont des voyageurs pris sur l’automobile, ce qui peut avoir un effet très fort sur les pénétrantes et sur la rocade.

Et le métro, le projet est-il définitivement enterré ou pas ?

Je n’ai pas de dogmatisme, il ne faut rien exclure. Il y a eu une première étude d’un ingénieur qui a passé quatre mois dessus, je pense qu’il faut se pencher à nouveau sur ce dossier, et pourquoi pas relancer une nouvelle étude plus complète, qui manque peut-être. Cela représente un budget conséquent d’1,4 milliard d’euros, mais pour 100.000 voyageurs par jour quand même ! Même s’il s’agirait principalement du report des voyageurs du bus et du tram vers le métro.

Alors que votre priorité est de capter des automobilistes ?

Oui, mais je ne suis pas anti-voiture, je suis anti-bouchon et anti-pollution. Personne ne se satisfait que Bordeaux soit dans le top 3 des villes les plus embouteillées de France. Il faut donc donner des alternatives aux automobilistes. Cela passe aussi par le vélo : il va falloir avoir un peu de courage politique pour réaliser ces autoroutes à vélos à l’échelle de la métropole dont on parle depuis des années, même si cela va prendre de la place sur le stationnement et sur les infrastructures. Il faut notamment réussir la liaison campus-Bordeaux, car les étudiants ne sont pas assez sur le vélo, il y a un potentiel énorme.

Quels sont les premiers retours que vous avez des pistes cyclables provisoires, installées après le confinement ?

Entre les deux confinements, on a doublé le nombre de cyclistes sur les pistes. Concernant la circulation automobile, aux heures de pointe, cela bouchonne un peu plus sur les boulevards, mais on est de l’ordre de deux-trois minutes de perte de temps sur un trajet. En revanche, il va falloir faire attention aux itinéraires malins empruntés via Waze par les automobilistes dans les petites rues des communes limitrophes, notamment Le Bouscat et Talence.

L’un des prochains grands chantiers sera aussi la transformation de la motorisation des bus de la métropole, pour aller vers des énergies plus propres…

Quelque 70 % du parc fonctionne déjà au GNV, le Gaz naturel de ville. Notre objectif est de faire disparaître les bus diesel et hybrides pour aller vers une flotte 100 % propre, en transformant le GNV en biogaz, et en passant une partie du parc à l’électrique et l’hydrogène, sachant que la ligne de BHNS Bordeaux-Saint-Aubin sera 100 % électrique.

Le Bluebus de Bolloré est en test sur la Liane 15 du réseau TBM à Bordeaux.
Le Bluebus de Bolloré est en test sur la Liane 15 du réseau TBM à Bordeaux. - M.Bosredon/20Minutes

Toujours sur l’électrique, qu’allez-vous faire des bornes de recharge pour voitures laissées par Bolloré qui a arrêté le service BlueCub ?

On a un accord : sur les 240 bornes, 170 resteront accessibles aux particuliers pour de la recharge moyennant un abonnement. Les stations pourront aussi être utilisées pour les vélos et trottinettes en libre-service, et l’autopartage également, qui peut être une autre solution avec le covoiturage pour diminuer le trafic routier. Il n’y aura pas une réponse à apporter, mais un schéma « multimobilités » à mettre en œuvre ces prochaines années.