Bordeaux: Avec le boom du nombre de cyclistes, la cohabitation dans la rue devient explosive
DEPLACEMENTS•Selon la dernière étude sur les mobilités présentée lundi, la métropole a vu le nombre de cyclistes sur son territoire augmenter de 50 % en quatre ans…Mickaël Bosredon
L'essentiel
- Le vélo est devenu le mode de déplacement principal pour 17 % des Bordelais.
- Alain Juppé s’inquiète toutefois de la cohabitation entre les différents modes de déplacements qui ne se passe pas bien.
- L’association Vélo-Cité souligne pour sa part la marge de progression en termes d’aménagements, même si elle reconnaît que des efforts ont été faits.
C’est une des pistes d’amélioration des conditions de déplacement sur la métropole : encourager la pratique du vélo. Et ça marche. Selon un rapport présenté lundi à la métropole de Bordeaux, on enregistre + 50 % de cyclistes sur l’agglomération bordelaise depuis 2014. Presque un tiers des Bordelais « fait du vélo régulièrement » dont « 17 % l’utilisent comme mode de déplacement principal. »
Sur certains axes, les chiffres sont impressionnants : en septembre dernier, 3.659 cyclistes/jour ont été comptabilisés cours de Verdun à Bordeaux, soit une augmentation de 20 % en un an. Avenue de la République, la hausse est de l’ordre de 30 % et monte à 39 % boulevard Antoine-Gautier.
Mais c’est surtout sur le pont de pierre, désormais fermé aux véhicules, où les compteurs s’affolent : plus de 12.000 passages par jour en septembre (+ 21 % en un an). Et aussi 7.000 piétons quotidiens. Selon la métropole, « 11 % des cyclistes et 13 % des piétons sur le pont sont d’anciens automobilistes » ce qui représenterait « 3.150 franchissements de la Garonne en voiture évités chaque jour. »
Automobilistes, cyclistes, piétons… Ça coince
La hausse a beau être impressionnante, elle ne contribue pas, pour l’instant, à faire diminuer la part modale de la voiture sur la métropole. Surtout, cet afflux soudain de cyclistes dans les rues n’est pas sans poser des problèmes de cohabitation.
Le président de la métropole Alain Juppé le reconnaît lui-même : « La situation ne se passe pas bien. » Lundi, il a demandé ainsi à ce que l’on « reprenne une campagne de sensibilisation pour qu’on respecte le code de la rue » et il en appelle « au respect mutuel entre les automobilistes, les cyclistes de plus en plus nombreux et qui ne respectent jamais (sic) la signalisation routière, les trottinettes, qui constituent un phénomène assez stupéfiant depuis quelques mois, y compris les trottinettes électriques qui roulent à 25 km/h sur les trottoirs, et les piétons, qui ne respectent pas davantage la signalisation. »
« Et les voitures qui stationnent sur les pistes cyclables, on en parle ? »
20Minutes a demandé à ses internautes ce qu’ils pensent de la situation. Une grande majorité met effectivement en avant le manque de respect du Code de la route de la part des cyclistes. Mais il n’y a pas que cela. « C’est bien beau de toujours blâmer les cyclistes, mais les voitures qui stationnent sur les pistes cyclables, on en parle aussi ? » s’agace Anthony Volders.
Cet internaute ajoute : « D’ailleurs en parlant de piste cyclable, il faudrait peut-être penser à entretenir celles-ci de temps à autre, car des crevaisons toutes les semaines voire deux fois dans la même journée, il y en a marre ! » Même constat de la part de Cécile Guichard : « Je vais au travail à vélo, départ Pessac arrivée rue Georges-Mandel. Tout d’abord il faudrait entretenir les pistes cyclables (sol élevé par les racines des arbres) et sécuriser le tronçon des boulevards qui est très dangereux entre les bus, les camions poubelles, les voitures et les motos ou scooter qui roulent sur les pistes cyclables. »
Manque d’éclairage la nuit, feux rouges grillés, circulation sur les trottoirs…
Coordinatrice de l'association Vélo-Cité, Oriane Hommet estime effectivement qu’il y a encore « beaucoup de communication à faire pour que chacun se respecte davantage » même si elle rappelle que « c’est aux plus lourds, donc les plus dangereux, de protéger les plus faibles. »
Elle admet toutefois que la question du respect du Code de la route de la part des cyclistes peut-être problématique. « La question de l’éclairage la nuit est un point noir, et au niveau de l’association nous faisons beaucoup de pédagogie là-dessus. Il y a aussi le problème des feux rouges, même si certains feux sont équipés d’un petit triangle qui autorise le vélo à passer en cédant le passage, cela beaucoup d’automobilistes ne le savent pas. Enfin, il y a la question de la circulation des vélos sur les trottoirs, même si on ne peut pas la dissocier de celle des aménagements : c’est souvent pour se protéger lui-même que le cycliste monte sur le trottoir, où il va gêner le piéton. »
Des secteurs encore à améliorer
Les aménagements. Qu’en est-il sur l’agglomération bordelaise ? Dans une brochure distribuée lundi aux journalistes, la métropole se félicite « d’aménagements qualitatifs » et de l’arrivée, « bientôt », des premiers tronçons d’autoroute du vélo.
Pour Oriane Hommet, « des aménagements ont certes été mis en place mais il y a aussi des retards. » Elle énumère ainsi « la piste cyclable sur les quais qui ne permet plus d’absorber les flux de cyclistes et de piétons » et les boulevards, « véritable point noir ». Pour l'instant il n'y a pas de piste cyclable identifiée rue Lucien Faure mais la métropole explique qu'il est prévu d' en installer une, raison pour laquelle les trottoirs sont aussi larges. Les cyclistes peuvent aussi circuler sur la voie centrale empruntée par les bus, même si les marquages au sol ne sont pas encore réalisés, précise l'institution.
La coordinatrice de Vélo-Cité pointe aussi « des incohérences », comme « la suppression de la piste cyclable sur le pont François-Mitterrand » qui oblige les cyclistes « à faire un détour de dix kilomètres. » Cette suppression a toutefois permis à la métropole d’ouvrir une nouvelle voie de circulation aux voitures, ce qui aurait diminué les bouchons à cet endroit.
Nouveau projet à l’étude sur les boulevards
Vélo-Cité se réjouit aussi de certaines décisions, à commencer par la fermeture du pont de pierre aux voitures. « Sur les boulevards, un nouveau projet est à l’étude » et l’association espère qu’il se réalise rapidement. Comme la création d’une bande cyclable avenue Beaudésert à Mérignac, demandée en octobre 2017 et livrée en août dernier. A cet endroit, assure la métropole, « 333 cyclistes/jour ont été comptabilisés, dont 62 % déclarent avoir abandonné la voiture suite à la réalisation de cet aménagement. »
La métropole a voté en décembre 2016 un plan vélo de 70 millions d'euros, qui court jusqu'en 2020, et comporte de nouveaux aménagements, mais aussi de nouvelles places de stationnement, et le développement des VCub, notamment les VCub électriques qui arriveront début 2019.