Vignes grêlées en Gironde: Le désarroi d'un viticulteur qui a perdu toute sa récolte
INTEMPERIES•Alors qu’environ 7.000 hectares ont été frappés par la grêle dans le Bordelais, la moitié du vignoble des Côtes de Bourg a été touchée. Hervé Descouvières, viticulteur sur cette appellation, a perdu l’ensemble de sa récolte à venir…Elsa Provenzano
L'essentiel
- Après le violent épisode de grêle, l’interprofession estime qu’environ 7.000 hectares ont été détruits. Parmi les appellations les plus touchées celle des Côtes de Bourg.
- Un vigneron des Côtes de Bourg, installé à Samonac, a perdu l’ensemble de sa récolte à venir.
- Pour lui, il faudrait autoriser une plus grande capacité de stockage et valoriser les prix pour aider les viticulteurs sinistrés.
La mine dépitée, Hervé Descouvières, propriétaire du château Macay dans les Côtes de Bourg, montre l’étendue des dégâts provoqués par la forte vague de grêle qui a frappé la Gironde samedi, au milieu de ces pieds de vignes. Les feuilles sont abîmées et les rameaux cassés.
« Hier ils étaient encore un peu verts mais deviennent marron à toute vitesse, soupire-t-il. Tout va se dessécher et tomber, on se croirait au mois d’octobre ». Sur l’appellation Côtes de Bourg, la moitié du vignoble a été ravagée. Hervé Descouvières a lui perdu l’ensemble de sa récolte à venir, sur 26 hectares de parcelles.
Les viticulteurs des Côtes de Bourg, avec ceux des Côtes de Blaye et du Haut Médoc ont été les plus touchés par le violent épisode de grêle. En seulement 15 minutes, l’interprofession bordelaise estime que 7.000 hectares de vignes ont été dévastés sur le Bordelais.
Un retour à la normale pas avant 2020
C’est un coup dur pour cet exploitant, qui emploie cinq personnes, et n’a pas d’assurance pour ce genre de situation. « Ces assurances sont trop chères pour nous, on ne les prend pas, explique-t-il. les prix auxquels on doit vendre nos vins ne nous le permettent pas ». En moyenne, il produit 180.000 bouteilles à l’année, qu’il vend entre 3 euros HT et 8 euros HT, soulignant que la grande distribution dicte les règles du jeu, sans laisser la possibilité aux viticulteurs d’ajuster leurs prix en fonction des aléas climatiques. Pour s’assurer, il lui faudrait débourser des centaines d’euros à l’hectare.
Après le gel de l’an dernier qui avait provoqué une perte de récolte de l’ordre de 20 à 25 % de sa production et la mauvaise année 2013, très pluvieuse, cela commence à faire beaucoup pour ce vigneron. « Tous les ans, il y a quelque chose de significatif et ces répétitions posent problème », se lamente-t-il. Et pour se relever de cette perte de récolte cela va prendre du temps. « Si en 2019, on récolte sur 50 à 60 % des parcelles on sera content, pointe-t-il. Et cela va demander beaucoup de travail manuel, cela va prendre du temps et coûter cher ». Un possible retour à la normale n'est pas envisageable avant 2020.
Le stockage et les prix de vente en leviers?
L’interprofession régule les capacités de stockage des exploitants. « Et nos stocks ne suffiront pas pour avancer l’argent afin de cultiver l’année prochaine, sans avoir de récolte cette année », s’inquiète Hervé Descouvières. Il estime que cela aiderait les viticulteurs de pouvoir faire des réserves plus importantes, « comme en Champagne ». Pour se remettre à flot, il faudrait qu’il puisse sortir un an et demi de trésorerie, soit de 8.000 à 9.000 euros l’hectare.
Pour faire face au sinistre, il estime aussi que les prix devraient être valorisés. « Le Négoce de Bordeaux va devoir faire des efforts », estime-t-il. Il attend avec impatience les annonces d’aides du gouvernement, se montrant néanmoins sceptique sur leur efficacité. « On subit des pertes d’exploitation pures et lourdes alors ce ne sont pas des mesurettes qui vont régler les problèmes, lâche-t-il. Qu’est-ce qui va se passer si on n’a rien à vendre ? »
Ancien cadre commercial dans l’industrie, il s’est reconverti dans la viticulture en 2012. « Je n’aurais peut-être pas dû… » lâche-t-il, amer, tout en faisant remarquer la beauté de son domaine vallonné.