Bordeaux: Le simulateur de conduite, un outil essentiel pour prévenir les accidents sur le réseau de tram
TRANSPORTS•Keolis s'est doté d'un simulateur de conduite du tramway, pour former ses conducteurs et effectuer des stages de perfectionnement, alors que l'accidentologie sur le réseau bordelais est de plus en plus problématique...Mickaël Bosredon
L'essentiel
- Ce simulateur recrée à l'identique la cabine de tramway des rames de Keolis.
- Des scénarios sont soumis aux conducteurs, qui reconstituent des scènes de collisions.
- L'outil permet aussi de revenir sur des accidents qui se sont réellement produits, afin d'améliorer la sécurité du réseau.
Une hausse des accidents impliquant un véhicule motorisé a été enregistrée sur le réseau de tramway de la métropole au premier trimestre 2018. Avec notamment 12 accidents rien que pour le mois de mars. « Dans 98 % des cas, le conducteur du tramway n’est pas responsable », insiste Hervé Lefèvre, directeur de Keolis Bordeaux.
Pour essayer de comprendre le quotidien des conducteurs de tramway du réseau bordelais, 20 Minutes s’est rendu dans la salle de simulation de conduite de Keolis, situé au centre de maintenance à la Bastide. Un bel outil qui reconstitue à l’identique la cabine de tramway des rames d'Alstom. Avec ses trois écrans il offre une vue panoramique au conducteur, et intègre même le montant des cabines, qui peut constituer un angle mort pour le conducteur. En revanche le réseau urbain qui défile à l’écran n’est pas (que) celui de Bordeaux, mais un mélange de plusieurs réseaux de Keolis en France.
« Certains scénarios que l’on reconstitue sont évitables, d’autres pas »
Laurent Ligonniere, ancien conducteur de tram, est désormais l’un des six formateurs de Keolis Bordeaux. La formation d’un conducteur dure 25 jours, entre les phases sur simulateur et celles sur le terrain à bord des voitures école. Outre la formation des nouveaux conducteurs, le simulateur sert aussi à des stages de perfectionnement.
L’objectif principal du simulateur est bien la prévention des accidents. « L’avantage de cet outil est qu’il nous permet de recréer des scènes de collision, souligne Laurent Ligonniere. Certains scénarios que l’on reconstitue sont évitables, d’autres pas. C’est fait exprès, pour voir comment est géré le coup de poing, ce bouton qu’il faut actionner en cas d’accident, et qui va couper toute l’alimentation électrique au cas où une personne se retrouverait coincée sous la rame, et ceci afin d’éviter tout risque d’électrocution, étant donné que le réseau bordelais fonctionne en partie avec une alimentation par le sol. Il faut que ce soit un réflexe chez nos conducteurs. »
« Nous devons faire face à de plus en plus de comportements très aléatoires »
La formation porte également beaucoup sur le regard. « Nos conducteurs doivent travailler sur leur regard au loin, avoir une vision d’ensemble y compris sur les côtés, et en même temps trouver le regard d’une personne qui se trouve en approche de la voie, pour s’assurer qu’elle a bien vu le tramway, et ralentir s’ils sentent un danger potentiel tout en actionnant leur gong. »
« Avec l’utilisation de plus en plus fréquente des écouteurs, des téléphones, nous devons faire face à de plus en plus de comportements très aléatoires où des gens peuvent se mettre à traverser d’un coup. Avec les cyclistes, il faut être très vigilant aussi. Concernant les véhicules motorisés, ce qui est important c’est d’avoir une vue panoramique. »
« Deux ou trois freinages d’urgence par jour en moyenne »
Pour le formateur, il n’y a pas forcément plus de collisions ces dernières années, « mais elles sont souvent plus graves ». « Et nos conducteurs évitent tous les jours des accidents, effectuant deux ou trois freinages d’urgence par jour en moyenne », poursuit Laurent Ligonniere, « ce qui représente beaucoup de stress ». Pour le gérer, les phases de conduite ne doivent pas excéder trois heures, avec une coupure de minimum 25 minutes. « Au-delà de trois heures, la vigilance retombe. »
Les sessions de perfectionnement sur le simulateur sont, elles, davantage concentrées sur les zones accidentogènes : rond-point René-Coty à Mérignac, secteur Doyen Brus, ou encore Arts et Métiers. « Tous les ans nous avons des retours d’expérience sur les accidents, et nous revenons sur chacune des situations. Depuis peu les tramways sont également équipés de caméras, qui nous permettent de déterminer si l’accident était évitable ou pas. »
Pour chaque extension de réseau ou création de nouvelle ligne, une reconnaissance de la nouvelle voie est effectuée sur le terrain par chaque conducteur. Pour la ligne D qui doit être mise en service en 2019, Keolis espère même pouvoir bénéficier d’une reconstitution complète de la ligne sur son simulateur.