VIDEO. Bordeaux: «Il faut être un peu fou pour tenir un vidéo-club en 2017»
INSOLITE•Jean-Luc Peyre tient le magasin Yoyo Vidéo, dans le quartier du Grand-Parc à Bordeaux depuis plus de 30 ans. Tous ses concurrents ont fermé boutique et ce passionné se retrouve le dernier gérant de vidéo-club de la ville…Elsa Provenzano
L'essentiel
- Jean-Luc Peyre, dit Yoyo, tient la dernière boutique de locations de vidéos de Bordeaux.
- Ce passionné a su créer une ambiance conviviale dans son magasin qui compte 20.000 références et est fréquenté par des habitants de toute l’agglomération bordelaise.
«Bonyour », est le premier mot qui vous accueille à l’entrée de Yoyo Vidéo, la dernière boutique de locations de vidéos de Bordeaux et rien ne peut faire plus plaisir à Jean-Luc Peyre, gérant des lieux, que de l’entendre de la bouche de clients fidèles qui passent sa porte.
Installée depuis un peu moins d’un an dans des locaux neufs à quelques pas de son ancien emplacement dans le quartier du Grand-Parc, la boutique existe depuis 1984 et résiste au streaming et au téléchargement grâce à la passion du maître des lieux.
a1.000 à 1.200 films loués en permanence
Quel est son secret pour durer ? « Il faut être un peu fou pour tenir un vidéo-club en 2017, plaisante-t-il. Mais, je vendrais des patates ce serait pareil je pense, j’aurais des anecdotes sur toutes les différentes sortes de patates. » C’est vrai que Jean-Luc Peyre dit Yoyo est un passionné. Ouvert de 9 h 30 à 20 h tous les jours et de 17 h à 20 h le dimanche, il se sent chez lui au milieu de ses DVD et n’a pas du tout l’impression de travailler. Quand il ne conseille pas ses clients, il anime douze pages Facebook, qui parlent de ciné bien sûr mais aussi de la vie du quartier dans lequel il est né ou il fait de la photographie, sa première passion.
Entre 1.000 à 1.200 films sont loués en permanence dans sa boutique qui compte 20.000 références au total. Il fait rentrer une vingtaine de nouveautés chaque semaine pour étoffer ses rayons. « Je ne choisis pas du tout en pensant que cela peut avoir du succès, je préfère prendre des films qu’on ne peut pas s’attendre à trouver dans un vidéo-club, explique-t-il. Et ensuite certains clients avec des recherches très spécifiques n’en reviennent pas que j’ai telle ou telle référence ».
« Monsieur cinéma »
« Ici je peux tout trouver, s’enthousiasme Lucie, 55 ans, qui fréquente les lieux depuis 10 ans. Quelquefois je ne me souviens ni du titre du film que je veux voir ni des acteurs mais en racontant une scène marquante ou en donnant un détail, il me trouve le film ! » Elle fait le trajet depuis Le Bouscat, où elle vit, « jusqu’à deux fois par semaine entre octobre et avril ». Cinéphile, elle considère aussi la boutique comme une occasion de visionner tout ce qu’elle n’a pas pu aller voir sur grand écran. Et pour orienter ses choix elle compte sur Yoyo qu’elle n’hésite pas à qualifier de « Monsieur cinéma » à Bordeaux. Parmi les clients du vidéo-club des habitants de Pessac, de Mérignac et parmi eux des gros consommateurs qui ont fait le choix du forfait 100 films pour 100 euros, non limité dans le temps.
Son activité ne permet pas à Yoyo de dégager de vrais revenus, puisqu’il gagne seulement 300 à 400 euros par mois. Mais peu importe, cela lui suffit : « Je travaille le week-end comme ça, je ne dépense pas d’argent, plaisante-t-il. Et ma femme travaille. »
Pour cet optimiste la seule ombre au tableau c’est le projet de réaménagement du secteur par Incité, qui pêche, selon lui, par un manque d’éclairage public et un nombre de places de parking insuffisant, aux abords de son magasin. Quatre commerces ont déjà fermé boutique et ceux qui restent constatent « une baisse de 20 % de leur fréquentation ». Jean-Luc Peyre espère pouvoir encore accueillir à coups de « bonyour » de nombreux clients dans « son univers », comme il l’appelle.
Il estime à environ douze le nombre de vidéo-clubs (des commerces dont c’est l’activité principale) qui existent encore en France.