A quoi ressemblera Bordeaux en 2050 ?

Villes du futur: A quoi ressemblera Bordeaux en 2050 ?

#2050A l'occasion des Journées nationales de l'architecture le 13 octobre, «20 Minutes» a décidé de se projeter en 2050. Entre science-fiction et perspectives réalistes, à quoi ressembleront nos villes dans 33 ans ?...
Mickaël Bosredon

Mickaël Bosredon

L'essentiel

  • La rocade deviendrait un « parc paysager » avec des transports en commun dessus.
  • Le vélo électrique deviendra le moyen de transport le plus courant.
  • On se baladera sur la Garonne comme dans la rue.

A l’occasion des Journées nationales de l'architecture, ce vendredi 13 octobre, 20 Minutes s’intéresse à l’évolution de nos métropoles d’ici à 2050. Nous sommes allés à la rencontre de Patrick Baggio, architecte urbaniste à l’agence Baggio-Piechaud, de Paul Marion, de l’agence d’architecture King Kong, de Jean-Marc Offner, directeur de l’agence d’urbanisme de Bordeaux Métropole Aquitaine (A’-Urba), et de Stephan de Faÿ, directeur général de Bordeaux-Euratlantique, qui nous livrent leurs analyses.

Des nouveaux quartiers dans la ville-centre. « Le Bordeaux de 2050 il est déjà en grande partie là avec les projets urbanistiques lancés récemment aux Bassins à flot, à Euratlantique, au Lac et sur la rive droite, et qui ne seront totalement achevés que dans vingt ans, indique Jean-Marc Offner. Et on a la chance que cela se passe dans la ville-centre. C’est assez rare en France que les friches industrielles et ferroviaires à réhabiliter se situent dans le centre. »

Jean-Marc Offner, directeur de l'agence d'urbanisme Bordeaux Métropole Aquitaine
Jean-Marc Offner, directeur de l'agence d'urbanisme Bordeaux Métropole Aquitaine - Fabien Cottereau

« On ne fait plus l’erreur du passé avec des cités déconnectées du réseau urbain, analyse Paul Marion. Toutes les opérations qui se feront à Bordeaux seront directement connectées à la ville. Dans 30 ans, il y aura des multi-centres dans Bordeaux, avec une mixité de fonctions dans chaque quartier. »

L'architecte Paul Marion, de l'agence bordelaise King Kong
L'architecte Paul Marion, de l'agence bordelaise King Kong - M.Bosredon/20Minutes

« Le Bordeaux de 2050, c'est maintenant qu'il faut commencer à s'en soucier, assure Stephan de Faÿ, car s'il n'y a pas de vision, ce sera une accumulation de petites décisions. Je pense qu'une grande question qui va se poser, et notamment à Bordeaux, c'est la place de l'industrie dans la ville. De l'industrie de demain, comme l'impression 3D. C'est un très gros défi par rapport aux risques de pétrification de la ville, car le danger qui nous guette c'est de vivre dans une magnifique ville-musée, sans place pour les activités productives, alors qu'il faut un mouvement conjoint. »

Stephan de Fäy, directeur général de l'établissement public d'aménagement Bordeaux Euratlantique
Stephan de Fäy, directeur général de l'établissement public d'aménagement Bordeaux Euratlantique - M.BOSREDON/20MINUTES

Un nouveau type de logements évolutifs. « Ces nouveaux quartiers bordelais proposeront une offre de logements originale, au sens où il y aura du collectif imaginatif, assure Jean-Marc Offner. Bordeaux a une spécificité avec une plus grande part de maisons individuelles que dans les autres villes de même taille, et le collectif n’est pas si habituel que cela ici. Le pari de ces quartiers est de proposer un habitat collectif comprenant ce que l’on recherche dans l’individuel, à savoir des balcons, des loggias, des locaux mutualisés pour bricoler… Il s’agit de réinventer le modèle de l’échoppe. On le voit sur le projet de Brazza notamment, avec des « volumes capables » à terminer soi-même. »

Le projet d'échoppes du XXIème siècle, dan sle futur quartier Brazza, à Bordeaux
Le projet d'échoppes du XXIème siècle, dan sle futur quartier Brazza, à Bordeaux - Y.TOHME ARCHITECTS&ASSOCIES

« La notion de volume capable, ça existe depuis des années, rappelle Patrick Baggio. C’étaient les lofts aux Etats-Unis. Le réintroduire dans le marché c’est intéressant, et ça va se développer car il y a une envie d’être impliqué dans le projet immobilier, pour des problèmes économiques mais aussi parce que c’est agréable. De plus en plus de gens voudront faire des choses à la main. Et spatialement, je pense que l’on aura des choses intéressantes, notamment lorsqu’il n’y aura plus de prises électriques dans les maisons. »

L'architecte bordelais Patrick Baggio
L'architecte bordelais Patrick Baggio - M.Bosredon/20Minutes

Pour Stephan de Faÿ, il faut insister sur la mixité des habitations, « avec des immeubles comprenant un étage consacré aux bureaux, un autre à l'artisanat, un autre aux logements... »

Quelle place pour la voiture ? « Je pense qu’il faut décider d’une manière radicale qu’il n’y ait plus de voiture en ville, avec des balises en entrée de ville où on vient garer sa voiture. Cela se fait déjà mais il faut aller plus loin » estime Paul Marion. « Evidemment qu’il faut sortir nos bagnoles de la ville » clame Patrick Baggio : « la question de la pollution sera centrale et ce qu’on recherchera ce sont les villes les moins polluées. Toutefois, il faudra maintenir une offre diversifiée de moyens de transport, car le choix c’est la liberté. »

Jean-Marc Offner pense, lui, « que la voiture sera toujours là, mais il y aura une plus grande diversité. On va passer de l’automobile individuelle à l’automobile publique et partagée. » Stephan de Faÿ espère, lui, « que l'on sera aidés par les mutations en cours dans le monde de l'automobile, et notamment avec la voiture sans chauffeur, ce qui changera le rapport à la propriété, et donc au stockage de la voiture en ville. »

Du vert, du vert, du vert. L’un des grands enjeux de 2050, ce sera « d’avoir plus de nature en ville, car l’aspiration c’est d’être proche de la ville et de la campagne, assure Jean-Marc Offner. A Bordeaux et sur la métropole c’est un discours crédible, car il y a beaucoup de nature autour. »

Le projet d'immeubles d'habitation du groupe immobilier Pichet dans la ZAC Bastide-Niel, quai de Queyries à Bordeaux
Le projet d'immeubles d'habitation du groupe immobilier Pichet dans la ZAC Bastide-Niel, quai de Queyries à Bordeaux - Groupe Pichet-MVRDV

« Les voiries seront de plus en plus paysagères, poursuit Patrick Baggio, et je vois bien la rocade devenir une espace de parc paysager avec un transport en commun qui roulera dessus. » « On se dirige vers la construction de la ville sur elle-même, et sur la construction de la campagne sur la ville », ajoute Paul Marion, qui imagine aussi la rocade « comme une coulée verte, une ceinture verte entourant la ville, avec tout un tas de transport en commun dessus. Là où il y avait de la pollution on remet de l’oxygène ! »

« Il y aura aussi un énorme travail à faire sur la réhabilitation des lotissements dans le périurbain – où la nature va peut-être reprendre le dessus, et sur la mutation des centres commerciaux » complète Patrick Baggio. Paul Marion confirme : « Il faudra réfléchir à l’avenir des centres commerciaux, où l’on ne se rendra plus forcément en voiture, et à la transformation de ces surfaces colossales de parking et de bitume en jardins et en parcs. »

Le boom du vélo électrique. « Quand le vélo électrique est arrivé à Bordeaux il y a dix ans, tout le monde a rigolé, se souvient Patrick Baggio. Regardez aujourd’hui le nombre de magasins qui en vendent ! Il a fait doubler les distances parcourues et les âges des utilisateurs. Quelqu’un de 60 ans peut facilement aller de Mérignac à Bordeaux-centre sans problème. Et quand ils seront équipés de pile à hydrogène ce sera formidable. » « ll y aura une offre diversifiée de moyens de transport avec sans doute un boom du vélo électrique » confirme Jean-Marc Offner.

Des paquebots à voile sur la Garonne et un transport vers Lacanau. « Il y a une polémique actuellement sur la pollution des grands bateaux qui entrent dans Bordeaux. Mais demain on aura des paquebots à voile ! Et la Garonne ce sera un fleuve de transit, on va se balader dessus » anticipe Patrick Baggio.

Le paquebot du futur par STX Europe
Le paquebot du futur par STX Europe - STX

« La question des déplacements vers la côte va se poser aussi. Est-ce qu’il ne faudra pas réhabiliter une ligne de chemin de fer vers Lacanau ? Moi, je ne donne pas dix ans avant qu’il y ait un transport en commun vers Lacanau. »