Lot-et-Garonne: On respire l'air des ruches pour soigner l'asthme
SANTÉ•L’effet peut durer plusieurs semaines…Laetitia Dive
L'essentiel
- Cette pratique a été importée d’Ukraine.
- L’apiculteur a deux postes d’inhalation et propose des séances de 30 minutes.
Dans le Lot-et-Garonne, les personnes atteintes d’asthme peuvent aller respirer l’air des ruches. Littéralement. A quelques encablures d’Agen, Patrice Percie du Sert a installé dans son centre de bien-être une structure qui permet aux asthmatiques d’apaiser les symptômes grâce au travail des abeilles.
Un traitement connu en Ukraine
La pratique est encore très peu connue en France, d’ailleurs, c’est en Ukraine que l’apiculteur l’a découverte : « En 2013, je me suis rendu à Kiev pour un congrès. Dans la salle des expositions, il y avait un monsieur qui vendait des petites cabanes avec quatre ruches intégrées à l’intérieur. Les gens s’allongeaient dedans et y passaient entre une et deux heures pour respirer l’air chaud qui sortait des ruches ».
Intrigué, il s’approche du vendeur qui lui explique que cette technique est le traitement le plus répandu contre l’asthme en Ukraine. « A l’époque, ça n’était pas scientifique du tout. Selon lui, cela venait de l’énergie des plantes qui était transmise aux abeilles ! »
S’il trouve le raisonnement poétique, Patrice Percie du Sert compte bien vérifier par la science si cette méthode fait ses preuves. A son retour en France, il se rend à l’INRA où on lui fournit des dizaines de documents compilant les différentes études faites sur les ruches. « J’ai passé 600 heures à tout lire, c’était comme un roman policier pour moi ! »
Une histoire de larves et de phéromones
En étudiant les textes, il se rend compte que ça n’est pas la reine qui gouverne la ruche mais les larves, autrement dit les abeilles en devenir : « Elles expriment leurs besoins par des émissions de phéromones. Les plus petites ont par exemple besoin de beaucoup de pollen pour grandir. Lorsqu’elles l’expriment, cela augmente de façon fulgurante le travail des ouvrières ».
Au total, il répertorie onze phéromones émises par les larves de la ruche. Parmi elles, le méthyl palmitate, une substance testée sur des souris. Les cobayes avaient été volontairement rendus allergiques au blanc d’œuf. Lorsqu’on leur en donnait, cela entraînait de l’asthme chez eux. En les aspergeant de méthyl palmitate, les chercheurs ont constaté que les souris allaient beaucoup mieux, l’effet étant comparable à de la prise de cortisone.
Pour Patrice Percie du Sert, la phéromone est en grande partie l’explication du sentiment d’amélioration chez les personnes atteintes d’asthme. Mais il estime qu’elle n’est pas la seule : « Je pense qu’il y a aussi une synergie entre les différentes molécules. Les autres phéromones présentes ont encore été très peu étudiées ».
Une odeur « végétale »
Aujourd’hui, il propose des séances d’une demi-heure dans son centre… sauf exceptions : « Nous avons quatre ruches pour le traitement. Si l’une des reines ne pond pas, il y aura moins de larves et donc moins de phéromones. On augmente donc le temps d’inhalation ». La séance coûte 25 euros après trois essais offerts.
Et comment cela fonctionne ? Les personnes atteintes d’asthme placent leur nez et leur bouche à l’intérieur d’un masque et respirent l’air provenant des ruches qui est pulsé via un tuyau. « C’est une odeur végétale, un peu comme quand on rentre dans un grenier à foin ».
Pour l’instant, l’apiculteur a installé deux postes d’inhalation mais il pourrait en prévoir d’autres prochainement. D’autant que l’air des ruches pourrait soigner d’autres maux. « En Allemagne, c’est un traitement contre les migraines. »