Sur le site des Ultramarines, l’onglet « En vert et contre tous » figure sur le haut de la page, comme pour annoncer aux visiteurs que le lien qui unit les supporters bordelais et leurs homologues des Magic Fans fait partie intégrante de l’identité du groupe d’ultras.

« Cette amitié existe depuis 1988, raconte Romain Manci, supporter bordelais. Elle est née lors d’un tournoi intersupporters : les deux groupes se sont bien entendus et au fil des générations, on a réussi à faire perdurer le lien. »

Déplacements en commun

A tel point qu’il n’est pas rare de voir un drapeau des Magic Fans flotter parmi les banderoles bordelaises. L’inverse se produit également : « Comme cette année on ne joue pas la Coupe d’Europe, il y a des ultras de chez nous qui ont suivi les matchs de Sainté. »

C’était le cas en février : alors qu’environ 3.000 supporters stéphanois faisaient trembler Old Trafford, quelques Bordelais se fondaient dans la vague verte qui déferlait sur Manchester.

Au-delà des stades

Depuis quelques années, ce lien transcende même le football : « Chez les Stéphanois j’ai des amis avec qui je peux passer le Nouvel an, des anniversaires, il y a même eu des mariages ! »

C’est le cas de Cindy : membre des Ultramarines depuis 1993, elle vit depuis dix ans à Saint-Etienne avec son compagnon, rencontré chez les Magic Fans. « On a une petite fille de cinq ans ensemble », explique la supportrice.

Diplomate, celle-ci se défend de choisir entre les deux équipes (et donc ses deux parents) : « Ici, elle soutient Saint-Etienne mais quand on va à Bordeaux, elle est pour les Girondins ! »

Fidèles à leur équipe

Malgré sa famille et son installation dans la Loire, Cindy reste une fervente supportrice des Girondins : « Avant d’avoir ma fille, je passais parfois au local des Magic. Mais ensuite je rentrais regarder le match de Bordeaux ! »

La semaine dernière, elle a fait la route jusqu’à Dijon avec Maxime, un autre Bordelais établi à Saint-Etienne. Lui reste abonné au Virage Sud de Bordeaux mais « en fait profiter les autres » lorsqu’il ne peut s’y rendre. « Mon arrivée à Sainté n’a rien changé, raconte-t-il. C’est aussi plus facile de défendre mes couleurs ici que dans une autre ville. »

Et quand on leur demande si la rivalité sur les terrains (notamment dans la course à l’Europe ces derniers temps) ternit parfois les relations avec leurs amis stéphanois, tous deux assurent que non : « On va faire l’avant-match ensemble et puis on va se séparer… L’amitié est là, mais quand il y a un match, on regarde le match. Ensuite on se retrouve à la fin ! », explique Cindy.

« Une journée noire »

En cette 36e journée, les festivités devraient néanmoins être ternies : les Green Angels, l’autre kop stéphanois, ont appelé au boycott du match en mémoire de la catastrophe de Furiani qui a fait 18 morts après l’effondrement d’une tribune bastiaise le 5 mai 1992.

Si les Magic Fans et les Ultramarines seront présents, ils n’entonneront pas de chants : « ça sera un match sans ambiance, explique Romain Manci. Mais il faut montrer à la Ligue que ça n’est pas normal qu’on joue ce jour-là. C’est une journée noire pour le foot français ».