Présidentielle: Philippe Poutou, le candidat NPA «trois jours en campagne et deux jours à l'usine»
ELECTIONS•Le syndicaliste CGT qui a lutté au sein de l'usine Ford de Blanquefort, pour y défendre les emplois, se présente comme le porte-voix des salariés et des précaires, revendiquant son statut de non-professionnel de la politique...Elsa Provenzano
Souriant et décontracté, le candidat NPA (Nouveau parti anticapitaliste) à la présidentielle, Philippe Poutou a gentiment taquiné les journalistes présents à sa conférence de presse bordelaise, ce jeudi, sur son manque de couverture médiatique, encore plus criant qu’en 2012 selon lui. « Des gens dans la rue m’ont même demandé si j’étais candidat ! Ou alors, ils pensent qu’en étant antisystème, je ne veux pas m’exprimer dans les médias », déplore-t-il.
Un effet Mélenchon ?
L’explication est notamment à chercher selon lui du côté des primaires qui accaparent beaucoup l’attention médiatique. Interrogé sur l’impact de la candidature de Jean-Luc Mélenchon à la tête du mouvement la France Insoumise, il lui reconnaît une « dynamique » mais « ce n’est pas pour ça que nous ne devrions pas exister, nous n’avons pas les mêmes choses à dire et c’est un politicien, un ancien ministre du gouvernement Jospin ».
« La différence entre lui et nous, c’est son rapport aux institutions, pour nous il n’y a pas d’arrangement possible. Et nous sommes aussi favorables à un internationalisme des travailleurs », souligne Monica Casanova, élue du NPA à Lormont. S’il y a des différences politiques entre eux, Philippe Poutou souligne qu’il ne s’agit pas d’un « vrai adversaire » comme peut l’être Macron, « l’énarque qui se présente comme antisystème » ou l’extrême droite, dont il faut « contrecarrer la propagande ».
A peine 200 parrainages rassemblés
Le parti a des difficultés à rassembler les 500 parrainages d’élus requis pour pouvoir présenter la candidature de Philippe Poutou, en totalisant à peine 200 à ce jour. « On est toujours à la limite mais là, c’est un peu plus dur que les fois précédentes », reconnaît le candidat, ajoutant que beaucoup de maires se décident au dernier moment en janvier et février. Les nouvelles règles régissant les parrainages, et les rendant notamment publics, rendraient les élus locaux plus hésitants, car exposés à davantage de pressions. Monica Casanova parle d’une « faille démocratique » dans ce fonctionnement qui favorise les candidats des grands partis qui « ont des arrangements institutionnels ».
Un candidat-ouvrier
Leader syndicaliste (CGT) des luttes pour la sauvegarde des emplois dans l’usine Ford de Blanquefort, Philippe Poutou revendique son statut de non-professionnel de la politique. De janvier à mars, il a un arrangement avec sa direction pour travailler à temps partiel. « Je suis trois jours en campagne et deux jours à l’usine, explique le candidat NPA. Le 20 mars, si les parrainages sont rassemblés, j’aurais cinq semaines dégagées complètement pour la campagne. »
Une nouvelle mobilisation pourrait commencer chez Ford, à partir du 23 janvier, alors que les syndicats craignent une liquidation « en douceur » du site qui emploie 950 personnes. Un défi pour le candidat qui devra gérer de front cette lutte sociale et sa campagne mais aussi peut-être une occasion de donner de la visibilité à sa candidature. « Ce ne sont ni Fillon ni Macron qui sont menacés de perdre leur boulot pendant la campagne », ironise-t-il.
Construire une résistance
« Le paradoxe c’est qu’on ne veut pas du poste de président, on l’a déjà dit, mais on veut faire entendre notre voix, explicite le candidat. Ce n’est pas pour autant une candidature-témoignage, on veut montrer qu’il y a d’autres perspectives possibles. Il y a des confrontations avec le camp social qui dirige à préparer. » Tandis que pour lui les candidats à la primaire socialiste « nous préparent à accepter des reculs sociaux », il faut construire une résistance. Alors que le parti a participé activement aux 4 mois de mobilisation contre la loi travail, il s’interroge sur les moyens de prolonger efficacement cette lutte sociale dans ses rangs.
Le 1er février, Philippe Poutou tiendra un meeting à Sciences-Po Bordeaux de 18 h à 20 h. Le 16 mars, il investira la salle municipale Son Tay à Bordeaux pour une nouvelle réunion publique.