BIODIVERSITELa population d'ortolans est bien sur le déclin

Sud-Ouest: La population d'ortolans est en déclin

BIODIVERSITEUne étude très attendue sur ce petit oiseau migrateur, dont la chasse est interdite en Europe mais tolérée dans les Landes, rapporte un déclin de l'espèce, sans qu'elle soit menacée pour autant...
Mickaël Bosredon

M.B. avec AFP

Attendue de longue date par les écologistes comme par les chasseurs, une étude scientifique sur la population d’ortolans, dévoilée vendredi dans les Landes, confirme le déclin de ces petits oiseaux migrateurs protégés qui font l’objet d’une chasse traditionnelle, illégale et controversée, dans le Sud-Ouest.

Selon cette étude cofinancée par le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN), le Conseil départemental des Landes, la région Aquitaine, la Fédération des chasseurs des Landes, l' association des chasses traditionnelles à la matole et le ministère de l’Environnement, 81.000 couples d’ortolans (dont 75 % proviennent de Pologne) empruntent chaque année en moyenne la route atlantique passant par le sud-ouest de la France.

Déclin de 20 à 30 % pour les oiseaux empruntant la route Atlantique

La tendance est au déclin, estimé entre 20 à 30 % de 2000 à 2014. Et actuellement, les populations nicheuses empruntant cette route atlantique diminuent en moyenne d’environ 1.500 couples chaque année, explique Frédéric Jiguet, du MNHN.

L’étude révèle que 90 % des bruants ortolans (« Emberiza hortulana ») passant en Europe, soit 4,3 millions de couples, empruntent une voie orientale, où le déclin atteint 10 à 20 %. Ces chiffres ont pu être déterminés grâce à des photomètres géolocalisateurs fixés sur une cinquantaine d’oiseaux, des données génétiques et d’isotopes stables.

« Pas de risque d’extinction »

Pour Frédéric Jiguet, « ces taux de déclin ne justifient pas un risque d’extinction estimable » selon les règles de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui recense les espèces menacées. « On a maintenant une base objectivée avec un rapport scientifique » sur ce sujet très polémique, s’est félicité le préfet des Landes, Frédéric Périssat.

« C’est la preuve scientifique du déclin, il faut donc une tolérance zéro », fait valoir Georges Cingal, président de l’association de défense de l’environnement Sepanso Landes. La chasse à l’ortolan est interdite en France depuis 1999 mais une certaine tolérance, pour moins de 30 cages et cinq appelants, a longtemps été observée dans le département, où des condamnations ont cependant été récemment prononcées contre des chasseurs.

Les chasseurs veulent maintenir leurs traditions

Du côté des chasseurs, la lecture n’est pas tout à fait la même. « Il y a des éléments favorables et d’autres moins. Notre intérêt est de préserver l’espèce mais aussi de maintenir nos traditions. On présentera des propositions », a réagi Jean-Jacques Laguë, président de l’Association des chasses traditionnelles à la matole (petite cage permettant de piéger l’oiseau).

L’étude est publiée alors même que la Commission européenne, après deux avertissements, vient d’annoncer qu’elle formait un recours contre la France devant la Cour de justice européenne sur la chasse aux ortolans, illégale dans l’UE.

Un mets prisé naguère par François Mitterrand

Pour le sénateur socialiste landais Jean-Louis Carrère, « on peut conjuguer absolument la protection de l’ortolan avec la poursuite de coutumes auxquelles nous sommes très attachés. » Selon l’élu, il faudrait « un plan de gestion européen pour cette espèce » et déterminer le seuil d’ortolans chassés à ne pas dépasser.

Mets prisé, entre autres, par François Mitterrand, l’ortolan qui est engraissé quelques semaines, noyé dans l’armagnac puis cuisiné, est plébiscité par de grands chefs français (Michel Guérard, Alain Ducasse…) qui ont réclamé une dérogation - une fois par an - afin de sauvegarder cette tradition culinaire.