Pourquoi autant d'anciens Girondins sont-ils devenus consultants?
FOOTBALL•Les anciens des Girondins de Bordeaux sont nombreux à avoir troqué les crampons pour le micro…Laetitia Dive
Outre leurs heures d’entraînement au , qu’ont en commun Bixente Lizarazu, Gaëtan Huard, Christophe Dugarry et Johan Micoud ? Tous sont aujourd’hui consultants à la télévision. Ce nombre important de commentateurs girondins est-il le fruit du hasard ? « Ce doit être parce qu’il y a une mafia bordelaise dans la communication ! », plaisante Johan Micoud, champion de France avec Bordeaux en 1999.
Il faut dire que pour un footballeur retraité, les possibilités de reconversion sont limitées : quand certains choisissent de devenir entraîneur, les autres prennent le chemin des studios.
Des terrains aux studios
Elie Baup a, lui, alterné les deux métiers. Lorsqu’il est devenu coach des Girondins en 1997, il venait de Canal Plus : « J’ai commencé en 1996 après ma sortie de Saint-Etienne. C’était les premières années où tous les matchs étaient retransmis. Puis j’ai enchaîné avec les Girondins. A chaque fois que j’avais une coupure entre deux mandats d’entraîneur, je revenais à la télé ». L’actuel consultant de beIN Sports admet cependant qu’ «entraîner a toujours été la priorité ».
Au milieu des années 90, Charles Biétry est directeur des sports chez . Il y impulse une nouvelle tendance : le duo journaliste-ancien footballeur pour commenter les matchs. C’est à cette époque que Gaëtan Huard fait ses premières apparitions sur la chaîne, sur demande du journaliste. « J’ai commencé en 1997 et je suis resté dans le monde de la télévision depuis ». Aujourd’hui, l’ancien gardien, détenteur du record d’invincibilité en Ligue 1 (1176 minutes), alterne entre et la radio du club girondin .
Rester neutre
Ce passage des terrains aux studios est parfois un défi. « Je me contente d’analyser ce qu’il se passe dans le stade », explique Johan Micoud. L’ancien milieu de terrain reconnaît que la tâche était moins aisée lorsqu’il a dû commenter un match de Bordeaux : « Je ne vous cache pas que j’étais content quand ils gagnaient. Mais j’essaie d’avoir de la réserve ». Il s’agit en effet de trouver son ton, tout en restant impartial. Christophe Dugarry a ainsi , parfois accusé de mauvaise foi par les amateurs de foot (et on vous passe les insultes).
aGaëtan Huard raconte avoir lui aussi essuyé des critiques: « Je ne regarde pas car je sais que beaucoup vont dire « ce n’est pas normal, il est trop Bordelais ». (Gagné, y'a pas besoin de chercher longtemps)
Après, je ne vais pas transformer un bon match de Bordeaux en mauvais match de Bordeaux pour prouver le contraire ! Même si, au fond de moi, mon cœur est à Lens, Marseille et Bordeaux». Et lorsque deux de ses anciens clubs s’affrontent ? « J’espère le nul ».
Cette connivence peut aussi avoir ses avantages : « Ca facilite les échanges avec eux. On sait ce qu’ils ressentent, on connaît l’ambiance des vestiaires, les joueurs, il y en a certain qu’on suit depuis longtemps », raconte Elie Baup. Celui qui a mené les Girondins raconte l’attachement qu’il a gardé pour ceux qu’il côtoyait à Bordeaux : « Quand j’en voyais un qui montait, ça me touchait. On reste attaché aux gens, même longtemps après. Et en tant que consultant ça nous permet d’avoir des analyses plus abouties parce qu’on les connait intimement ».
« On sait ce que c'est »
C’est donc leur expérience des terrains qui fait la différence au micro : « On comprend leur ressenti, l’obligation de résultat, le retour à la maison la tête basse quand on n’a pas été bon, la peur d’être montré du doigt ou sifflé, l’entraînement du lendemain avec le coach qui s’énerve. On sait ce que c’est d’être dans un stade hostile où 80.000 personnes encouragent l’équipe adverse », se souvient Gaëtan Huard.
Cette tension, il dit l’avoir d’autant plus ressentie en tant que gardien : « On a la pression du tableau d’affichage ». Et il poursuit : « L’ensemble du club dépend de vous : quand un club est rétrogradé, il subit de fortes pressions financières. Et ça, il faut le vivre pour savoir ce que c’est ».
« Aujourd'hui c’est plus difficile d’être naturel »
Devenu consultant en 2009, juste après avoir mis fin à sa carrière pro, Johan Micoud pointe des évolutions dans la façon d’aborder le foot: « A mon époque, il y avait beaucoup moins de commentateurs, beaucoup moins de médias et donc beaucoup moins de conneries qui étaient dites sur nous ».
A l’heure où réseaux sociaux et médias suivent au quotidien les faits et gestes des sportifs, beaucoup de clubs verrouillent leur communication : « Les joueurs communiquent différemment, remarque l’ancien milieu Girondin. Comme tout est décortiqué - le moindre geste, le moindre mot- aujourd'hui c’est plus difficile d’être naturel ». Gaëtan Huard partage cet avis : « Dans les médias, certains veulent juste faire du buzz. Mais à force de bombarder les joueurs, c’est tout le monde du foot qui se referme ».