Bordeaux : L'ancien maire du Taillan condamné à un an de prison avec sursis, pour harcèlement moral
JUSTICE•Ce mercredi, le tribunal a reconnu coupable Ludovic Freygefond de harcèlement moral au préjudice de son ancien directeur de cabinet, à qui il a envoyé 438 mails amoureux...Elsa Provenzano
Ludovic Freygefond, ancien maire du Taillan Médoc et ancien secrétaire départemental de la fédération du parti socialiste en Gironde a été condamné à un an de prison avec sursis, alors que le procureur avait requis 6 mois avec sursis, et deux ans de privation de ses droits civiques. Il devra aussi verser à la victime 53.000 euros au titre du préjudice matériel et 15.000 au titre de préjudice moral.
Il comparaissait devant le tribunal ce mercredi après la plainte pour harcèlement moral déposée par son ancien directeur de cabinet, Alexandre Metzinger, dont il était éperdument amoureux et qu'il a assailli de 438 mails en rapport avec ce transport, entre septembre 2009 et mars 2012, date de la démission d'Alexandre Metzinger.
«Un procès à charge pour Freygefond»
«C'est un jugement très sévère après une enquête à charge et un procès à charge. Mais je reste combatif et je ne me laisserai pas salir», a réagi Ludovic Freygefond après l'annonce de la décision du tribunal. Son avocat, maître Jean Gonthier, a précisé que son client allait faire appel de cette décision.
Le conseil de la victime François de Coutencin, a estimé que ce procès avait «une vocation de libération» pour son client et estime que le tribunal «a tiré les conséquences d'un véritable abus de pouvoir d'un élu dans la toute-puissance, qui a eu des conséquences dramatiques».
438 mails en toile de fond du procès
Six mois après l'embauche comme directeur de cabinet du maire du Taillan, d'Alexandre Metzinger, fraîchement diplômé de Sciences Po et âgé de 25 ans, les relations entre les deux hommes changent. «Il y a des envois de mails indécents évoquant des sentiments amoureux et demandant des faveurs sexuelles malgré des refus répétés», constate la présidente du tribunal Cécile Ramonatxo.
Le prévenu envoie 67 courriels en 2009, 132 en 2010, 109 en 2011 et 30 en 2012. Plusieurs passages ont été lus lors de l'audience «Si tu veux essayer avec un garçon, je suis là..» et «J'ai besoin de cette relation physique entre nous.» Le procureur Jean-Louis Rey parle de «pratiques relativement hards» évoquées par le prévenu dans ces mails.
« Pas découragé », selon la défense
«J'ai reconnu avoir envoyé ces mails mais c'était dans un contexte particulier car nous étions amis en dehors du travail, on a partagé beaucoup de choses sur nos vies intimes», raconte du bout des lèvres Ludovic Freygefond, à la barre, après avoir reconnu qu'il était «très amoureux de ce garçon». Il précise que des mails non versés au dossier font état de réponses amicales, cordiales de la part d'Alexandre Metzinger. «Il n'est pas découragé, il lui dit qu'il est hétérosexuel et c'est tout! Il n'y a pas de signal clair et net d'arrêter!», estime maître Jean Gonthier, estimant que l'ambiguité a été entretenue.
La présidente note qu'il reçoit, à toute heure du jour et de la nuit, des mails qui mélangent les désirs sexuels de son supérieur hiérarchique et la gestion de la mairie. Dans certains courriers il promet aussi de belles perspectives au jeune homme, lui disant qu'il pourrait lui succéder et même «devenir ministre» un jour. Mais le prévenu réfute tout chantage affectif, mettant en avant les qualités professionnelles du jeune homme.
«Je savais qu'une démission serait lourde de conséquences»
«Quand ça a commencé j'étais sidéré mais je me suis dit que ça allait se tasser. Je savais très bien qu'une démission serait lourde de conséquences pour ma carrière. D'ailleurs je vis aujourd'hui dans une ville que je n'ai pas choisie et je ne fais pas le métier pour lequel j'ai fait des études», a témoigné le jeune homme, devenu comédien à Paris, et qui n'a pas caché ses ambitions professionnelles à l'époque. Il a souffert d 'un état dépressif suite à ces faits, a fait deux tentatives de suicide et s'est scarifié
Quand il fait part de son envie de démissionner, Ludovic Freygefond insiste pour qu'il ne continue pas sa carrière politique en Gironde. «Si tu postules sur un poste politique je prendrai ça comme un affront » lui écrit-il.