« Le pire stagiaire » : Greg Guillotin et JNR racontent les coulisses de la caméra cachée phénomène
WEB•En seulement deux jours, la vidéo a été vue plus de 6 millions de fois sur YouTubeClio Weickert
L'essentiel
- Depuis sa mise en ligne jeudi, la dernière caméra cachée du comédien Greg Guillotin provoque un raz-de-marée sur les réseaux sociaux.
- Une séquence marque particulièrement les esprits : une réaction soudaine du rappeur qui a totalement pris de court l’équipe de tournage, et bouleversé les spectateurs.
- « 20 Minutes » vous dévoile les coulisses de cette caméra cachée qui ne s’est pas déroulée comme prévu.
Depuis sa mise en ligne jeudi sur YouTube, la dernière caméra cachée de Greg Guillotin provoque un véritable raz-de-marée sur Internet. Pendant près de 50 minutes, la vidéo met en scène l’humoriste dans son rôle de « pire stagiaire » pour la chaîne C8. Sous les traits de son personnage de fils à papa – Louis Vignac –, il fait vivre un calvaire à JNR, un jeune rappeur de 20 ans du nord de la France, qui ignore qu’il s’agit d’un canular (à la différence de ses proches, tous complices). Sous couvert d’un stage d’observation pour découvrir le travail de l’artiste, le stagiaire au comportement détestable, enchaînant mépris, racisme et grossophobie, met à l’épreuve les nerfs du jeune artiste, au sang-froid remarquable.
Une vidéo vue plus de six millions de fois en 48 heures, se classant dès jeudi en tête des tendances sur YouTube. Le « piégé » lui, a vu les compteurs de ses clips et de ses réseaux sociaux exploser, conséquences d’un coup de projecteur inattendu. « On savait que ça allait buzzer parce que Greg a une grande communauté, mais à ce point on n’était pas prêts, explique l’artiste. Je suis encore sonné et dépassé, mais c’est un bon buzz et les réactions des gens me font trop plaisir ». Et pourtant, les choses ne devaient pas forcément se dérouler de cette façon.
« La chaîne ne voulait pas froisser le public »
Initialement, cette caméra cachée devait être diffusée le 28 mai sur C8 mais est déprogrammée à la dernière minute. « J’ai eu les explications sur la non-diffusion du 3e épisode, écrivait l’humoriste sur Twitter. Il a simplement été jugé trop touchy par la chaîne par rapport à l’actu ! »
De son côté, C8 expliquait à Puremédias avoir agi par « précaution ». Contactée par 20 Minutes ce vendredi, la chaîne a simplement précisé « qu’au vu du climat tendu qu’il y avait à cette époque, par rapport aux inégalités sociales, la chaîne ne voulait pas froisser le public ». Il faut dire qu’au cœur de cette vidéo dévoilée deux mois plus tard, une séquence marque particulièrement les esprits : une réaction soudaine du rappeur qui a totalement pris de court l’équipe de tournage, et bouleversé les spectateurs. « On ne s’attendait pas à ce que ça prenne une dimension sociale si forte », reconnaît Greg Guillotin au lendemain de la mise en ligne.
« Mon personnage est de toute façon détestable de base »
Au départ, le pitch n’était ni plus ni moins que la confrontation de deux mondes, celui d’un jeune fils à papa gâté, friqué et abject, face à un jeune rappeur qui essaye de percer. Une situation très caricaturale, mais c’est le but. « On a joué sur un clivage très classique de la comédie française », précise l’humoriste. Greg Guillotin pousse alors le trait à fond, n’hésitant pas à multiplier les sorties méprisantes, racistes, et les clichés sur les « jeunes de banlieues ». « En poussant le curseur aussi loin et en disant de telles choses, cela permet d’obtenir de belles réactions de la part des piégés, explique-t-il. Plus je suis horrible, plus on se dit que la personne est classe de réagir comme ça. Mon personnage est de toute façon détestable de base, il représente le racisme, mais tout le monde le sait, d’autant qu’il est déjà connu. C’est Louis Vignac qui est ridicule, et face à lui on a une personne qui a des réactions exemplaires ».
Face à lui, JNR reste en effet quasi imperturbable. « Dans la vraie vie je suis patient, j’aime bien réfléchir avant d’agir », dit-il. Insupportable, le stagiaire lui fait tout de même vivre un enfer. « Le jour où je me fais piéger, c’est comme dans un film. Une journée qui ne veut pas finir, j’en ai marre et je suis à bout, mais je me contiens, raconte-t-il. Je me dis que ce n’est qu’un petit bourge, riche et égoïste, qui ne pense qu’à lui. Mais justement c’est un défi pour moi, car même si la personne est un peu bizarre je suis obligé de rester concentré sur mon travail ». Ces proches, tous complices du stagiaire, détendent aussi l’atmosphère et canalisent l’artiste. JNR prend donc son mal en patience, lui fait écouter sa musique, les coulisses du tournage d'un clip… Jusqu’au point de rupture.
« On est des Noirs et des Arabes »
A la toute fin du canular, de faux policiers débarquent brusquement dans le studio d’enregistrement où se trouvent JNR, ses proches, le stagiaire et les faux journalistes, et mettent la main sur des armes. Des armes à feu factices, dissimulées au préalable par Greg Guillotin et ses complices. Pris de panique, le rappeur, qui n’a pourtant rien à se reprocher, prend subitement la fuite sous le regard interloqué des piégeurs. Rattrapé par un cameraman, il s’explique : « On est des Noirs et des Arabes (…) je ne veux pas me mêler au truc ». Une réaction incontrôlée et une scène glaçante. « C’est l’instinct, analyse à froid le rappeur. Je ne sais même pas comment l’expliquer. Je savais que je n’avais rien à voir dans ça, mais comme je suis tous les jours au studio je me suis dit qu’on allait forcément me mêler à ça, et j’ai pris la fuite direct. »
Greg Guillotin quant à lui, reste sur le moment sans voix : « On ne savait pas ce qu’il se passait, je ne savais même pas qu’il y avait un cadreur avec lui. Pour moi c’était une catastrophe, on ne pouvait pas aller au bout du piège, je me disais que la fin était horrible. J’étais en sueurs. C’était une fin un peu triste, et qui partait en queue de poisson, donc gros moment de panique ». Et ce n’est qu’après coup, lors du montage des images, que le piégeur découvre les propos de JNR après sa fuite. « Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il dise ça. On est dans une vérité et on sort du truc scénarisé. Ça m’a fait encore plus prendre conscience que nous, nous ne sommes pas concernés pas ça, et que c’est un quotidien difficile pour eux. Et ce qui est triste aussi, c’est qu’à la fin quand la police passe les menottes à JNR, il est résigné ». Le « canular » n’est-il pas parti trop loin ? Si la séquence semble globalement avoir ému les spectateurs, le malaise est proche…
« Ça reste une blague, il ne faut pas aller voir plus loin »
De son côté, Greg Guillotin ne pense pas avoir dépassé les limites : « C’était tellement un événement imprévu, ce n’est pas comme si on l’avait écrit comme ça en voulant provoquer cette réaction. Là c’est quelque chose qui nous a complètement échappé, c’est la vie qui rentre dans l’histoire. On s’est posé la question de mettre cette séquence ou non dans l’épisode, on avait peur que ça donne une mauvaise image, de notre prisme à nous, on se disait que ça montre qu’il fuit et qu’il ne respecte pas "l’ordre". Et après on s’est dit que si, que c’était ça tout le sel de l’épisode et c’est ça qui donne une dimension sociale. On avait zéro calcul. Et ça semble sorti d’un film hollywoodien. »
Et quid de JNR, victime de ce canular ? Malgré le stress de la situation, l’artiste n’en tient pas rigueur au piégeur. « Franchement je n’étais pas bien, je ne savais pas comment ça allait se passer, mais je ne peux pas lui en vouloir », assure-t-il calmement. Pour lui, cette caméra cachée reste un bon souvenir et de bons moments de rigolade. « Ça reste une blague, et puis ce n’est pas comme si mes amis n’étaient pas dans le coup… Ça reste une blague, il ne faut pas aller voir plus loin », estime-t-il, ajoutant, « je ne regrette pas du tout, c’était génial et ça me fait propulser, je suis au top, tout le monde est content. »
Ravi de cette rencontre et d’avoir pu aider la carrière du rappeur, Greg Guillotin quant à lui prévoit d’autres caméras cachées du « pire stagiaire ». Il prépare également un long-métrage, « le piège d’une seule personne, mais sur une longue durée ».