DIVERTISSEMENT« C’est toujours pas sorcier » reboote la vulgarisation scientifique

« C’est toujours pas sorcier » reboote la vulgarisation scientifique à la télévision

DIVERTISSEMENTDepuis décembre 2019, « C’est toujours pas sorcier » marche dans les pas de « C’est pas sorcier » et explore les sciences avce un nouveau casting d'animateurs
Mathilde Loire

Mathilde Loire

L'essentiel

  • France Télévisions a lancé en décembre dernier un nouveau programme de vulgarisation scientifique, C’est toujours pas sorcier.
  • Inspirée de l’émission culte C’est pas sorcier, ce nouveau programme est incarné par Max Bird, Cécile Djunga et Mathieu Duméry.
  • 20 Minutes a visité les coulisses de l’émission.

Six ans après la fin de sa diffusion, C’est pas sorcier a enfin un successeur. Max Bird, Cécile Djunga et Mathieu Duméry explorent les pyramides, l’écosystème des abeilles ou les glaciers dans C’est toujours pas sorcier, la nouvelle émission de vulgarisation scientifique de France Télévisions. CTPS est diffusée sur la plateforme jeunesse de France Télévisions, Okoo, et depuis le 4 janvier le samedi à 20 h 35 sur France 4, et sur France 5 le mercredi à 16 h 55.

Le programme reprend le concept de l’émission scientifique culte, diffusée sur France 3 de 1993 à 2014. Chaque épisode déroule une enquête scientifique d’un nouveau trio : Max, le scientifique, Cécile, l’exploratrice, et Mathieu, le boute-en-train. Ils sont assistés de SAMI, pour Système d’apprentissage multimédia indépendant, une box qui les assiste dans leurs recherches. L’émission est réalisée en grande partie dasn un studio, à Saint-Ouen, où 20 Minutes a pu observer les coulisses du programme.

Une cabane remplace le camion

Ce mardi, Max Bird, Cécile Djunga et Mathieu Duméry terminent de jouer la scène de fin d’une émission sur les dents. Les deux premiers, assis sur la petite terrasse de la cabane qui leur sert de labo, assistent au retour de Mathieu. Cette cabane confortable a remplacé le camion dans lequel Jamy Gourmaud réalisait ses expériences et démonstrations. Chaque enquête part généralement d’une discussion dans la cabane, qui conduit Cécile et Mathieu à se lancer sur le terrain. Max, lui, reste en plateau pour expliquer le sujet du jour, assisté de SAMI et parfois de Mathieu.

La cabane a remplacé le camion dans « C’est toujours pas sorcier ».
La cabane a remplacé le camion dans « C’est toujours pas sorcier ». - Mathilde Loire

L’équipe a trois jours de séquences « cabane » prévus cette semaine – soit quatre émissions différentes. S’y ajouteront ensuite les reportages de Cécile Djunga et Mathieu Duméry. « On tourne comme au cinéma, décor par décor, costume par costume », explique David Montagne, le réalisateur. Une fois les images nécessaires pour l’émission sur les dents en boîte, l’assistant-réalisateur fait s’activer les animateurs : « On va se changer, on se met en volcan ! » Les animateurs se changent, se remaquillent, l’accessoiriste change quelques objets de place, et c’est parti pour les scènes d’ouverture et de fin de l’épisode sur les volcans. En régie, sur une table, de grosses maquettes de volcans attendent l’après-midi. Tandis que Cécile Djunga tournera des scènes sur fond vert dans un autre studio, Mathieu Duméry et Max Bird resteront dans la cabane.

Emission scriptée à l’avance

L’ambiance est détendue. Avant chaque scène, les trois animateurs répètent leur texte « à l’italienne ». « Ça tourne ! », lance une voix. Ils se lancent. Le texte est fluide mais… « C’était mauvais », balance Cécile Djunga une fois la scène terminée. « Il y a un truc qui vient pas… » Tous trois répètent leurs répliques, proposent des modifications à David Montagne et Coline Tison, la rédactrice en chef. La deuxième prise est plus fluide, plus drôle ; la troisième sera la bonne.

Chaque émission est scriptée à l’avance, à la virgule près. L’écriture des émissions est un travail conjoint entre les équipes de journalistes de Coline Tison, qui préparent les sujets, et un auteur, Yohann Zaoui, qui travaille le scénario. « C’est un programme qui est à la croisée des chemins entre un magazine très didactique et une fiction, s’enthousiasme David Montagne. Il y a un fil tendu d’intrigue, qui fait que chaque découverte donne envie de continuer à regarder. » Un procédé inspiré de C’est pas sorcier : « Jamy avait ce truc magique avec lequel il arrivait à attraper les gens et les accrocher, et on ne voulait plus lâcher l’émission », se souvient Max Bird.

Des éléments en hommage à « C’est pas sorcier » sont disséminés sur le plateau.
Des éléments en hommage à « C’est pas sorcier » sont disséminés sur le plateau. - Mathilde Loire

L’ombre de C’est pas sorcier n’est jamais loin. Dans la cabane, sur une étagère, est posé un modèle réduit de son fameux camion. Les trois animateurs ont tous regardé, plus jeunes, le programme présenté par Jamy Gourmaud. Max Bird l’avait d’ailleurs invité dans un épisode de son émission sur YouTube, Idée reçue, tandis que Mathieu Duméry a travaillé, un temps, sur C'est pas sorcier. L’équipe de CTPS entend toutefois faire les choses à sa façon. « Je ne regarde pas les anciens épisodes de C’est pas sorcier, explique Coline Tison. Sinon, il y a le risque d’aboutir aux mêmes plans, aux mêmes angles. Les journalistes les regardent parfois, pour vérifier qu’ils n’avaient pas déjà fait la même chose, ou pour voir comment ils ont résolu certains angles. »

Considérations écologiques

Et CTPS vit avec son époque. L’émission aborde régulièrement les avancées scientifiques et technologiques par le biais de SAMI, et les considérations environnementales sont présentes dans quasiment tous les sujets. Parfois en filigrane, parfois de manière plus évidente, comme dans les épisodes sur les abeilles ou la fonte des glaciers. « A partir du moment où on parle de sciences, on est obligés de parler écologie », estime Max Bird. Le vulgarisateur, qui s’est fait connaître sur YouTube, milite pour la protection de l’environnement depuis plusieurs années. Quant à Mathieu Duméry, il vulgarise avec Lénie Cherino, depuis septembre 2014, les enjeux environnementaux dans Les Chroniques écologiques du Professeur Feuillage.

« Ils font partie d’une génération de talents pour partie biberonnés par Fred et Jamy. C’est une filiation naturelle », estime Ronan de Longraye, directeur délégué aux programmes jeune public hors animation chez France Télévisions. Cécile Djunga, humoriste et animatrice télé belge, « dynamique et curieuse de tout », complète le trio. « On avait besoin d’incarnants qui collent aux aspirations du programme, qui cherchent à comprendre le monde pour le changer. » Et qui disposent de plusieurs cordes à leur arc : avoir le goût de la vulgarisation, et pouvoir jouer la comédie en insufflant l’humour nécessaire à un divertissement. L’alchimie est bien là. Les blagues fusent entre les prises, sous le regard amusé des techniciens.

Cécile Djunga, Mathieu Duméry et Max Bird incarnent « C’est toujours pas sorcier ».
Cécile Djunga, Mathieu Duméry et Max Bird incarnent « C’est toujours pas sorcier ». - Mathilde Loire

« C’est comme un bon Astérix, estime Mathieu Duméry. On n’est pas Goscinny, bien sûr ! », précise l’animateur sous les rires de ses camarades. « Mais on fait des blagues, qu’un enfant va prendre au premier degré sans y penser, tandis qu’un adulte pourra comprendre la référence. » Max Bird insiste : leur émission « ne s’adresse pas spécialement aux fans de C’est pas sorcier ». « C’est un nouveau public, de nouveaux enfants », confirme Cécile Djunga. « Les gens de notre génération réagissent d’abord sur le ton nostalgique, pensant qu’on ne peut pas toucher à l’original… Mais finissent par mettre leurs enfants devant », affirme Mathieu Duméry.

« Se réinventer sans profaner »

Ronan de Longraye voit CTPS comme « un programme nounou, devant lequel les parents peuvent mettre les enfants et savoir qu’ils peuvent les y laisser ». Ce projet était en gestation depuis deux ans : les équipes de France Télévisions souhaitaient recréer un programme de vulgarisation scientifique, et se sont appuyées sur une marque « bien installée » en reprenant C’est pas sorcier. « On était hyper attendus au tournant, d’autant qu’il y a eu des tentatives non abouties de relances avant nous, rappelle Ronan de Longraye. On devait créer un programme dans les pas de nos aînés, et se réinventer mais sans profaner. » CTPS garde en ligne de mire sa mission « de service public », selon Ronan de Longraye : parler de sciences aux jeunes, de manière accessible.

Expériences, démonstrations et reportages sont au programme de « C’est toujours pas sorcier ».
Expériences, démonstrations et reportages sont au programme de « C’est toujours pas sorcier ». - Mathilde Loire

Les trois animateurs refusent de se laisser impressionner par l’aura de leurs prédécesseurs. D’autant qu’ils sont habitués à construire leurs projets avec moins de moyens : « Sur YouTube, ou dans un spectacle, on est tout seul, on doit tout décider. Depuis que j’ai commencé CTPS, j’ai eu du mal sur certaines vidéos parce qu’il n’y avait personne pour m’aider à prendre une décision », raconte Max Bird, tandis que ses camarades acquiescent. « Quand on est habitués à l’économie YouTube, on a l’habitude de tout faire à la fois. Là, on peut déléguer et se concentrer sur le rôle d’animateur », renchérit Mathieu Duméry. Pour Cécile Djunga, la principale différence avec la scène « est l’interactivité, on n’a pas de retour immédiat. On espère que les sujets vont marcher, mais on doit attendre la diffusion. On commence enfin à avoir des retours du public, donc on va pouvoir évoluer. »