«Engrenages»: La série change presque tout pour rester fidèle à elle-même en saison 7
ENQUETE•Nouvelle directrice d’écriture, nouveaux personnages et nouvelle enquêtes, la saison 7 d'« Engrenages », diffusée ce lundi sur Canal +, réussit à se renouveler sans perdre son essence
Anne Demoulin
Un an après la fin de la saison 6, les flics, magistrats et avocats d’Engrenages reprennent du service. La 7e saison de la série emblématique de Canal+, diffusée à partir de ce lundi à 21h05, entame un nouveau cycle. « Quand on arrive en saison 7, un certain nombre de sujets a déjà été abordé. Il faut se renouveler », raconte Marine Francou, la directrice d’écriture.
Cette saison 7 sonne le passage de relais entre Anne Landois, qui a marqué la série en signant avec son équipe l’écriture de plusieurs saisons, et Marine Francou. « Quand j’ai coécrit un épisode de la saison 6, je ne savais pas du tout que cette proposition me serait faite », se souvient-elle. A la fin de la saison 6, la production lui propose de prendre la direction de l’écriture. « J’avais un fort attachement depuis longtemps à cette série. C’était un peu vertigineux, mais j’en ai eu très envie. Ce qui était important, c’était de le réussir à ma manière. »
aMarine Francou a imposé sa méthode, « l’écriture à plusieurs scénaristes en atelier ». Une technique qu’elle avait expérimentée avec succès sur Un Village français. « Pendant plusieurs mois, on s’est réunis dans une salle de la production avec une équipe de quatre auteurs pour bâtir les arches de cette saison, en partant toujours de l’intimité des personnages », explique la scénariste. Ce travail collégial a permis d’écrire plus vite les 12 épisodes qui composent la saison et « d’impliquer tout de suite d’autres auteurs. Du coup, on est plusieurs à prendre possession de l’histoire ».
Un nouveau domaine d’enquête
Une fois le parcours des personnages définis, les scénaristes choisissent le domaine de l’enquête. « Dans Engrenages, l’intime des personnages se raconte à travers elle », souligne Marine Francou. Des affaires comme celles des braqueurs en col blanc qui auraient détourné des caisses de l’Etat 1,6 milliard d’euros de TVA sur les quotas carbone ou encore celle de « la fièvre jaune », qui a abouti au démantèlement d’un réseau de blanchiment de l’argent de la drogue par des grossistes du « Sentier chinois », à Aubervilliers. « Ces affaires de blanchiment montraient des réseaux qui connectent des gens avec des profils très différents, des trafiquants de drogue, des banquiers, des conseillers en placements fiscaux, des politiques, des étudiants, tous reliés par une même valeur, l’argent », résume-t-elle.
Cette intrigue a confronté d’un côté les institutions policières et judiciaires que servent nos héros et qui manquent de moyens, et de l’autre, la délinquance financière qui organise de façon toujours plus efficace la fraude fiscale. Bref, une arène intéressante au « moment où le pouvoir politique et les grandes institutions manquent cruellement de moyens et que cela menace la cohésion sociale », estime la scénariste. Pour explorer ce domaine particulier du monde de la finance, en plus des consultants habituels – Engrenages est écrit avec l’aide de policiers, magistrats et avocats –, « on a eu l’aide spécifique de quelqu’un qui connaît bien ces sujets-là, parce que cela ne s’improvise pas », raconte la scénariste.
Un nouveau meurtre
Outre cette nouvelle intrigue, Engrenages prend un douloureux virage [Attention spoit !] au tout début du premier épisode, avec le décès du commissaire Herville, retrouvé mort dans un restaurant chinois du 13e arrondissement. « L’idée de faire mourir un personnage très fort comme Herville n’est pas venue de gaieté de cœur, mais d’une nécessité dramaturgique. Vu l’état dans lequel sont Laure et Gilou à la fin de la saison 6, le drame intime qu’ils vivent, il fallait, pour qu’ils se remettent à travailler ensemble, une enquête à laquelle aucun des deux ne peut échapper », analyse la scénariste.
Après le « départ réussi » de Tintin en saison 6, la saison 7 introduit également un nouveau héros, Ali Amrani (Tewfik Jallab), jeune recrue de la DPJ, idéaliste et sportif. Le personnage d’Ali est né du fait que « la police est l’une des institutions qui réussit le mieux la mixité et la série ne le racontait pas du tout. Mais on n’avait pas envie de tomber dans les clichés et ce n’est pas parce qu’il est maghrébin que toute sa personnalité se définit autour de ça », souligne Marine Francou. Même si tout les oppose, l’amitié unit Ali à Gilou. « Les jeunes dans la PJ n’envisagent pas leur métier comme leurs aînés. Ils veillent à leur équilibre personnel et sont assez à cheval sur la procédure et moins enclins à franchir les lignes comme nos personnages historiques. Il y a là un conflit de génération », détaille encore Marine Francou.
La saison 6 avait laissé les héros d’Engrenages en état de crise profonde. Cette nouvelle saison va les montrer « dans un moment d’extrême vulnérabilité », mais aussi « montrer comment ils reviennent tous à la vie ». Cette saison 7 marque, autant pour la série que pour ses héros, un nouveau départ. Pour preuve, même Joséphine va partir à la reconquête de son humanité.