televisionUn ex-journaliste de Canal+ condamné à verser 150.000 euros au groupe

Canal+ : Un ex-journaliste condamné à verser 150.000 euros au groupe après avoir brisé sa clause de silence

televisionDans un documentaire, le journaliste d’investigation Jean-Baptiste Rivoire dénonçait les méthodes de Vincent Bolloré, régulièrement accusé d’ingérences dans les médias qu’il contrôle
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Le journaliste d’investigation Jean-Baptiste Rivoire a été condamné à verser plus de 150.000 euros à son ancien employeur Canal+ par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt pour avoir rompu une « clause de silence » ou de « non-dénigrement », ont annoncé les deux parties.

« La justice vient de me condamner à payer 151.500 euros » au groupe Canal+, a déclaré Jean-Baptiste Rivoire mercredi soir sur X (ex-Twitter), annonçant vouloir faire appel de cette décision datée du 22 février. « Fin 2021, j’avais osé critiquer l’interventionnisme éditorial de Vincent Bolloré dans Le système B », un documentaire de Reporters sans frontières, a-t-il rappelé.

« La liberté des journalistes » menacée

Or, « comme plus de 120 journalistes français ayant quitté I-Télé, Canal+, Europe 1, le JDD ou Paris Match, j’avais été contraint, suite à l’arrivée de Vincent Bolloré » à la tête de ces médias, de « signer des clauses de silence entravant gravement la liberté d’informer », a-t-il expliqué, précisant que, dans son cas, ces clauses « s’appliquaient à vie ».

« La direction de Canal+ et [son PDG] Maxime Saada voulaient m’empêcher de dévoiler les coulisses de l’éradication de "l’esprit Canal+" » entre 2015 et 2021, a-t-il affirmé. « Cette lourde condamnation (…) handicape le développement de notre média indépendant Off investigation », lancé en 2021, s’est-il inquiété.

Pour ses avocats, Mes William Bourdon et Vincent Brengarth, « cette procédure constitue une entrave indéniable à la liberté d’expression et à la liberté de la presse. Elle représente un précédent particulièrement alarmant qui menace directement la liberté des journalistes en les mettant sous la pression de sanctions économiques disproportionnées », ont-ils réagi ce jeudi dans un communiqué.

Ses avocats « abasourdis »

Auditionné le même jour à l’Assemblée nationale par la commission d’enquête sur les fréquences TNT, le PDG du groupe Canal+ Maxime Saada est revenu sur cette condamnation. Selon lui, Jean-Baptiste Rivoire a « touché plus de 400.000 euros » dans le cadre d’un vaste plan de départs volontaires lié aux difficultés économiques de la chaîne cryptée, auquel ont souscrit quelque 500 personnes.

« Il a souhaité toucher une indemnité qui allait au-delà du plan de départ. Cette indemnité était liée à ce qu’on appelle du non-dénigrement », a poursuivi le patron de Canal+. « Quand vous dénigrez, ce qu’il a fait, immédiatement, on va au procès », a ajouté Maxime Saada, soulignant que « rien ne forçait Jean-Baptiste Rivoire » à signer la clause invoquée.

Les avocats du journaliste se sont dits « abasourdis » par les propos du PDG de Canal+. Celui-ci « a cru pouvoir révéler le montant de la somme acceptée par M. Jean-Baptiste Rivoire dans un cadre transactionnel, en dépit de la confidentialité de ces informations », ont indiqué Mes Bourdon et Brengarth, qui se « réservent le droit d’agir en justice compte tenu de ces déclarations. »

Ingérences dans les médias

Dans Le système B, diffusé en octobre 2021 sur les réseaux sociaux, l’ex-rédacteur en chef adjoint du magazine « Spécial investigation » de Canal+ revenait sur les méthodes de Vincent Bolloré, régulièrement accusé d’ingérences dans les médias qu’il contrôle via le groupe Vivendi.

Une procédure avait alors été initiée à son encontre par la société Nulle part ailleurs production, une filiale de Canal+, chaîne qu’il a quittée en 2021, après plusieurs années de dures négociations.