La guerre entre Kate Middleton et Meghan Markle, mise en scène misogyne des tabloïds britanniques
PEOPLE•Les médias britanniques alimentent la chronique d'une rivalité entre les femmes des princes William et Harry depuis plusieurs semaines...Ophélia Pinto
Le Brexit approche. Dans trois mois, il sera effectif. Et dans ce contexte de crise politique majeure pour le gouvernement britannique, les tabloïds n’ont d’yeux que pour… une prétendue rivalité entre les belles-sœurs Kate et Meghan, la duchesse de Cambridge et la duchesse de Sussex. Après plusieurs années de relative tranquillité, marquées par des mariages et des enfants, l’actualité de la famille royale tourne, du point de vue de journaux people du pays, autour de cette querelle.
Il semblerait que les Britanniques aient bien besoin de se changer les idées selon Jamil Dakhlia, professeur en sciences de l’Information et de la Communication, spécialiste de la presse people : « Il peut y avoir une lassitude du côté du public par rapport au débat sur le Brexit, il n’y a peut-être pas la même vigilance, la même attention en tout cas, donc ça laisse de la place pour tous les événements considérés comme plus frivoles, plus légers. » Ainsi, les une tapageuses et scoops tonitruants s’accumulent.
Une Kate « introvertie » contre la « sexuelle » Meghan
Si on en croit la presse britannique, depuis plusieurs semaines, les tensions entre Kate Middleton et Meghan Markle seraient évidentes. Ce serait pour cela que Harry et son épouse, enceinte de leur premier enfant, ont décidé de s’exiler de Kensington Palace où ils cohabitaient avec William et Kate, pour rejoindre Windsor. Alors avoir reçu de nombreuses louanges lors de son entrée dans la famille royale en mai dernier, Meghan Markle est devenue la cible de critiques. Surnommée la duchesse capricieuse, elle serait à l’origine de plusieurs démissions au sein du personnel de la maison royale. Pour The Sun, elle aurait même fait craquer la gentille Kate.
Personnalités, tenues, attitudes… Les médias britanniques ont pris l’habitude de comparer et opposer de manière caricaturale les deux duchesses. Pour Daily Mail, « ce sont deux personnes très différentes » et qui « ne s’entendent pas particulièrement ». The Sun va plus loin dans le cliché sexiste et décrit une Kate « introvertie » à la « sexuelle » Meghan… « Chacune occupe un peu le même créneau dans l’imaginaire collectif, mais il ne peut y avoir de place que pour une seule, analyse Jamil Dakhlia. Ce sont des roturières qui ont réussi à intégrer la famille royale. Avec Meghan Markle on a une sorte de répétition de quelque chose qui était déjà arrivé. Il y a eu un premier mariage avec une roturière, là, il y a un deuxième mariage avec une roturière donc ça force la comparaison. Logiquement, il y a dans la répétition de ce type d’événement l’idée qu’il y en a une de trop. Il s’agit de savoir laquelle occupe le mieux cette fonction. »
Vision phallocratique de la société
La mise en scène médiatique des tensions supposées entre les deux femmes révèle la misogynie des tabloïds. Deux femmes seraient forcément incapables de s’entendre, conditionnées à se faire concurrence et à se méfier les unes des autres. Certains titres sont allés plus loin en prétendant que la guerre des belles-sœurs avait un impact néfaste sur la bonne entente entre Harry et William, usant du poncif misogyne selon lequel les femmes sont des personnages diaboliques. Selon Jamil Dakhlia, « il y a toujours cette idée qui traverse la presse people et les représentations de l’imaginaire collectif qui est que les femmes entre elles sont extrêmement dures, en rivalité. Cela renforce une vision phallocratique de la société selon laquelle les femmes sont incapables de s’entendre et qu’il faut un arbitre masculin pour les départager. »
En cette période de fêtes, la presse people britannique projette sur la famille royale les tensions que connaissent nombre de familles au moment de Noël. Certains titres ont ainsi annoncé la décision du Prince Harry de ne pas participer à la traditionnelle chasse au faisan du 26 décembre… à cause de Meghan qui défend la cause animale. « On suit la famille royale comme un feuilleton, où on se concentre sur les événements heureux mais aussi sur tout ce qui est disruptif, explique Jamil Dakhlia. Et évidemment ça fait beaucoup plus parler car ce sont des aspérités qui suscitent le débat social. Elles posent des questions à l’ensemble de la société notamment comment on gère son couple, etc. On a l’impression que l’on est concentré sur les problèmes avant tout mais il y a quand même une donnée objective, qui est l’ouverture de la famille royale au monde des gens ordinaires. »