Lorsque le marchand William Finch et son compagnon, le capitaine Keeling, débarquèrent sur cette île mystérieuse au large de l’Afrique, ils décidèrent d’avancer plus avant et de l’explorer. Ils se retrouvèrent entourés de créatures traversant en groupes la forêt. Ils n’avaient jamais rien vu de pareil et ne savaient absolument pas quel nom donner à ces créatures, jusqu’à ce que le capitaine Keeling se décide pour “la magnifique bête”.

Quatre cents ans plus tard, cette description reste valable. Aidé de Keeling, Finch est l’auteur du premier document écrit connu évoquant les lémuriens de Madagascar. Pour les naturalistes qui les ont étudiés, et pas seulement ceux à la queue annelée décrits par Finch et Keeling, ces animaux ont toujours été des créatures aussi enchanteresses que le territoire qui les abrite.

Des créatures uniques au monde

Sur une île deux fois plus vaste que la Grande-Bretagne, mais détachée des autres masses continentales depuis environ 90 millions d’années, les animaux de Madagascar ont évolué pour devenir des créatures que l’on ne trouve nulle part ailleurs sur Terre. Les plus remarquables d’entre elles sont les lémuriens, qui constituent plus de 15 % des espèces de primates, répartis sur une surface qui représente moins de 0,4 % de celle de la Terre.

La vie sur l’île convenait aux anciens primates et la nourriture fournie par les arbres était suffisante pour favoriser l’évolution de très nombreuses espèces, chacune d’entre elles pouvant se repaître des fruits variés. Sur leur île paradisiaque, sans avoir à se mesurer à des primates plus avancés, comme les singes et, jusqu’à il y a 2000 ans, aux hommes, les lémuriens ont pu développer une diversité incroyable qui n’aurait pas été possible ailleurs.

Des espèces essentielles

Les lémuriens jouent un rôle essentiel dans l’écosystème malgache car ils dispersent des graines dans l’île et l’aident ainsi à rester verte. En effet, la plupart des graines sont déposées loin de leur arbre d’origine, entre 100 à 500 m, lors des déplacements des lémuriens dans les forêts pour fourrager et rejeter les graines indigestes. Certaines espèces, comme le lémur aux yeux turquoise, se nourrissent d’insectes et de champignons et aident ainsi à contrôler la prolifération de certaines espèces.

On pense que c’est par accident que les lémuriens sont arrivés à Madagascar, qu’ils ont dérivé et traversé la mer sur du bois flottant et autres tapis de végétation, envoyés contre leur gré loin du continent africain pour un voyage qui a dû durer des semaines. De forts courants ont dû aider à la traversée du canal du Mozambique large de 400 km sur sa partie la plus étroite. Le plus étonnant, c’est que l’on découvre encore aujourd’hui de nouvelles espèces.

Du nouveau à découvrir

La génétique a permis aux scientifiques de faire la différence entre des espèces mystérieuses qui nous semblaient identiques. En 1994, seulement 33 espèces avaient été identifiées, mais une étude récente estime que le nombre total d’espèces et de sous-espèces de lémuriens s’élève bien au-dessus de 110, peut-être même 125. Au cours de la première décennie du XXIe siècle seulement, 21 nouvelles espèces ont été découvertes.

Tout ceci laisse entrevoir des perspectives alléchantes : peut-être que, quelque part sur cette île enchanteresse qu’est Madagascar, il existe encore de nouvelles espèces de lémuriens qui attendent d’être découvertes.

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