Marceline Bodier, bookstagrameuse et contributrice du groupe de lecture 20 Minutes Books, vous recommande « Contrôle » d’Olivier Liron, qu'elle a interviewé. Sa nouvelle est éditée le 6 septembre 2024 dans la collection Vrilles de la revue Zone Critique.

Sa citation préférée :

« Par un banal travers d’écrivain, incapable de vivre le réel autrement qu’à travers le prisme du récit que je peux en faire, j’ai pensé : « Un jour, je raconterai dans un livre que, ce jour-là, ma mère m’a pris dans ses bras, pour la première fois depuis longtemps ». »

Pourquoi ce livre ?

• Parce qu'après avoir fait le récit, dans Einstein, le sexe et moi, de sa participation victorieuse au jeu télévisé Questions pour un champion, l'auteur revient cette fois sur le jour de la sortie du livre. A l'époque, Olivier Liron fait de la figuration dans des films tout en touchant le RSA, doit se rendre à la CAF pour rembourser ses dettes à la suite du contrôle qu’est venu faire un agent plusieurs mois plus tôt pour vérifier qu’il était « vraiment pauvre ». « Heureusement, ma solitude était en règle », se rassure-t-il. Mais hélas… qui aurait pu prévoir l’extravagant degré de zèle de son visiteur ?
• Parce que j’ai retrouvé avec grand plaisir l’originalité d’Olivier Liron : des mots qui mélangent humour et poignant pour raconter un quotidien éclairé par « sa différence », celle d’un autiste Asperger, qu’il a décrite dans Einstein, le sexe et moi. Il y expliquait que cette différence fait qu’il « trouve qu’il est difficile de s’imaginer dans la peau d’un autre ». Pourtant, il réussit à merveille à nous mettre dans sa peau pour nous faire comprendre que face aux tracasseries administratives, peu importe qui nous sommes : l’absurdité est la même… et rien ne nous empêche d’en rire.
• Parce que Contrôle est une novella qui se lit en un quart d’heure, mais permet quand même à son auteur de nous donner un aperçu panoramique de l’envers du décor de notre société : avoir fait des études prestigieuses comme Normale Sup ne protège pas de la pauvreté ; écrire des romans ne protège pas des atermoiements avant d’envoyer un emoji pelote de laine à un match sur Tinder ; être victime d’un contrôle administratif aberrant n’empêche pas de s’interroger sur les rêves du contrôleur. « Les écrivains n’inventent jamais rien », a dit Balzac… il pensait sans doute déjà à Contrôle en écrivant ces mots !

Olivier Liron, comment avez-vous eu l'idée d'écrire « Contrôle » ?

Cette nouvelle, que j’espère amusante, raconte la journée du 6 septembre 2018. Le même jour, c’est la sortie de mon nouveau roman, qui va rencontrer un grand succès… et j’ai rendez-vous à la CAF, la Caisse d’allocation familiales, pour régulariser ma situation administrative ! C’est une journée complètement loufoque. Je m’amuse aussi avec le mythe de l’écrivain à succès, en montrant le décalage entre le prestige accordé à la littérature et la vie réelle des auteurs.

La collection Vrilles publie des textes très courts, « en prise avec les grands enjeux de notre époque ». En quoi ce format change-t-il du roman ?

Le format court impose d’être percutant ! Mais il se prête bien à l’humour, à la poésie aussi. C’est un exercice difficile et passionnant pour un écrivain.

Cette collection, portée par la revue Zone critique, permet de découvrir des plumes contemporaines formidables...

L’avantage est que ça se lit aussi très vite. J’aime l’idée que les lecteurs dévorent le livre en une seule fois, presque instantanément. Un peu comme on écouterait une chanson !

Et si vous aviez une recommandation à faire à un auteur ou une autrice qui débute ?

Y croire, toujours ! Et s’armer d’une bonne dose d’humour… J’en profite pour remercier toutes les personnes qui me soutiennent et m’encouragent à écrire depuis le départ !

L’essentiel en 2 minutes

L’intrigue. La mère d’Olivier Liron lui a offert 200 euros pour qu’il s’achète un ou deux pulls pour son anniversaire. Mais la CAF ne l’entend pas de cette oreille : il est au RSA, c’est donc une aide illégale… verdict, 9567 euros de pénalité administrative ! Et le pire, c’est que ce n’est pas un roman…

Les personnages. Olivier Liron croise un faux Frédéric Beigbeder, qui s’avère être le vrai François Busnel, tranquillement attablé au restaurant. Ne ratez surtout pas la dédicace qu’il imagine pour lui ! « La pire […] du monde », dit-il. A moins que ce ne soit la plus en harmonie avec l’absurdité de cette journée ?

Les lieux. Vous êtes déjà allés à la CAF ? Vous devriez y aller avec Olivier Liron : votre arrivée se transformera en entrée à un concert de The Cure. Et n’oubliez surtout pas de convier sa mère : sans elle, « le labyrinthe administratif serait absolument sans issue ». On le croit sans peine !

L’époque. Ce 6 septembre 2018 « ne ressemble à rien de connu », même si on remonte à la nuit des temps grâce à une plante immortelle, la sphaigne de Magellan, sujet préféré de la mère d’Olivier Liron. Vous êtes perplexes ? Pourtant, quand on lit Contrôle, tout devient logique. Même l’improbable.

L’auteur. Olivier Liron, auteur de romans à succès, a relevé le défi du format court en s’appuyant sur son expérience personnelle pour dépoussiérer quelques mythes sur l’image de l’écrivain en France. Découvrez-en plus dans les réponses qu’il a bien voulu apporter à mes questions !

Ce livre a été lu avec l’envie de vous faire découvrir un texte, mais aussi toute la collection dans laquelle il est publié, Vrilles, lancée par Zone critique, média qui revendique l’art comme « véritable outil de compréhension du monde ». De compréhension, et avec Olivier Liron, de dédramatisation !

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