Marceline Bodier, bookstagrameuse et contributrice du groupe de lecture 20 Minutes Livres, vous recommande Le manuscrit MS620 de Claire Bauchart, paru le 4 février 2022 aux Éditions Filature.
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Sa citation préférée :

«  Notre société a tendance à beaucoup trop minimiser les bienfaits de la rêverie.  »

Pourquoi ce livre ?

• Parce que la source de toute l’histoire remonte à 1896 : une femme, Herta Mertil, a été condamnée à la déportation dans un bagne de Nouvelle-Calédonie pour le meurtre de son mari. Ce n’était pas n’importe quelle femme : elle avait créé le « Groupe français d’études féministes » et était l’autrice d’écrits féministes. Lors du procès, elle a expliqué que son mari, le père de sa fille, voulait l’entraver dans ses publications. Mais était-ce suffisant pour le tuer ? Elle a emporté son secret dans la tombe… non sans laisser un message codé qui s’avère indéchiffrable pendant plus d’un siècle.
• Parce que Joséphine, leur fille, a vécu la vie dont a été privée sa mère après sa condamnation : libre, éprise de fêtes, en élevant sa fille Suzanne dans le culte d’une grand-mère qu’elle n’a pas connue et dont elle lui a transmis l’amour, les idées progressistes et l’idée qu’elle avait été victime d’une erreur judiciaire – contre toutes apparences. Comment grandir dans ces conditions ? Que transmettre à la génération suivante, celle d’Émile, si ce n’est le message, dont personne n’a le code ? Une grande chaîne de transmission, mais qui n’a rien d’évident…
• Parce que c’est donc une histoire de transmission intergénérationnelle, sur trois générations de femmes puis un homme : transmission d’un traumatisme, mais aussi, de manière indissociable, d’un idéal féministe militant. Le fait que les deux se contredisent et se mélangent fait toute l’originalité de l’intrigue : les descendants doivent faire à la fois avec les combats que leur a légués leur aïeule, et son héritage meurtrier – ou du moins, condamné. De quoi faire du rétablissement de la vérité, quelle qu’elle soit, le combat de leurs vies… combat qui reste hélas longtemps sans issue.
• Parce que dans une famille qui hérite d’un tel mystère, toutes les transmissions sont possibles : celle du goût de la liberté et de la fête, mais aussi l’envie de s’exiler dans un paradis, ou encore celle de faire une carrière universitaire dans les langues anciennes (qui ont le bon goût d’être déchiffrables, elles)… toutes, sauf celle qui permet d’aller réellement au bout de la compréhension du manuscrit. De là à se dire que le désir de vérité est forcément ambivalent quand on redoute ce à quoi elle nous confrontera, il n’y a qu’un pas que le livre franchit de toutes les manières possibles !
• Parce que ce sont finalement deux femmes bien d’aujourd’hui qui vont percer le mystère. Aucune d’entre elles n’a de lien avec la famille d’Herta, mais toutes deux sont ambitieuses et ont quelque chose à prouver : l’une veut résoudre avant tout le monde une affaire exceptionnelle pour développer sa chaîne YouTube consacrée aux grandes affaires criminelles, l’autre veut prendre sa revanche après avoir été écartée des dossiers prestigieux dans sa société de déchiffrage et de sécurité informatique. Finalement, ce sont peut-être elles, les véritables héritières d’Herta…
  

L’essentiel en 2 minutes

L’intrigue. Un manuscrit chiffré par une femme de caractère, déchiffrés par les efforts successifs de trois femmes et d’un homme, à quatre époques (les années 1890, 1980, 2010, 2020), sur quatre continents (l’Océanie, l’Amérique, l’Asie, et l’Europe). Autant dire que l’intrigue est menée tambour battant !

Les personnages. Le livre déploie ses personnages sur plus d’un siècle, mais les personnages principaux ne sont pas humains : ce sont une tasse de chocolat chaud, des bougainvilliers, un manuscrit indéchiffrable, une chaîne YouTube… et un livre de Jules Verne qui gagne à être connu : La Jangada.

Les lieux. Dans le livre, tous les voyages ont un but précis autour du manuscrit. Mais on n’en savoure pas moins des ambiances contrastées : l’exotisme fleuri de Nouméa, la bibliothèque de la George Washington University, les restaurants de Singapour. Et la « Péniche » d’un célèbre institut parisien !

L’époque. Ce sont 120 ans d’histoire du féminisme qui sont évoqués au travers de cas particuliers : de la féministe militante qui devait se battre contre tous ses contemporains, à ses lointaines descendantes qui finissent par s’affronter entre elles… mais qui la comprennent.

L’auteur. Claire Bauchart est très jeune, mais elle a déjà une vie littéraire bien remplie : journaliste, elle a coécrit un témoignage avec une femme de détenu, puis publié deux polars. Aujourd’hui, avec Le manuscrit MS620, elle montre une nouvelle facette d’un talent décidément prometteur.

Ce livre a été lu avec l’impression de voir défiler les images du futur film qu’on imagine déjà très bien sur la course au manuscrit MS620. Imaginez votre casting, et c’est parti !

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