peine de mortQui est Amir Tataloo, le pionnier du hip-hop iranien condamné à mort ?

Qui est Amir Tataloo, le rappeur incontournable du hip-hop iranien condamné à mort ?

peine de mortPionnier de la scène hip-hop underground persan et rappeur favoris de la jeunesse libéral iranienne, voici le portrait d’Amir Tataloo
Léa Zacsongo-Joseph

Léa Zacsongo-Joseph

L'essentiel

  • Amir Tataloo est un rappeur iranien populaire, signé par Universal Music Group, mais interdit dans son pays et condamné à mort pour « blasphème » par le régime iranien qui l’accuse d’inciter la jeunesse à s’opposer au gouvernement.
  • Malgré la censure, il a réussi à captiver une génération en quête de changement avec sa musique mêlant hip-hop, RnB et pop, abordant des sujets politiques et légers, ce qui lui a valu plusieurs arrestations.
  • Exilé puis extradé en Iran, il risque la peine capitale pour « insulte au prophète » Mahomet.

Son visage et son corps sont une toile de peinture, ses textes politiques, et son combat pour la liberté d’expression pourrait bien lui coûter la vie. Voici l’histoire d’Amir Hossein Maghsoudloo, plus connu sous le nom d’Amir Tataloo. Premier artiste iranien signé par Universal Music Group, ce chanteur est bien plus qu’un simple rappeur admiré par la jeunesse iranienne. Il est devenu l’ennemi de la République islamique, qui l’accuse d’inciter les jeunes à s’opposer au gouvernement et de promouvoir la prostitution.

Ces accusations lui ont valu plusieurs arrestations et, finalement, une condamnation à mort pour « blasphème ». Retour sur le parcours de cet artiste hors norme, au cœur d’un régime autoritaire.

Un artiste qu’on veut faire taire

Interdit de radio, de télévision ou de toute diffusion officielle en Iran, Amir Tataloo n’a jamais été accepté par les autorités de son pays. Rejeté par le Ministère de la Culture et de l’Orientation Islamique, l’artiste de 37 ans a pourtant réussi à se forger une place de choix dans le cœur de la jeunesse iranienne grâce à sa musique mêlant hip-hop, RnB et pop. Pionnier de ces genres underground, il a su captiver une génération en quête de changement. Son titre Nuclear Energy, accompagné d’un clip soutenant le programme nucléaire iranien, est même devenu l’une des recherches Google les plus populaires en persan. Abordant aussi bien des sujets politiques que légers, cet artiste tatoué de la tête aux pieds a toujours dérangé le pouvoir et n’a jamais obtenu de licence pour exercer son métier dans son propre pays.

Né à Majidieh, à Téhéran, Amir Tataloo s’exile à Istanbul en 2018, pensant échapper à la répression. Mais en 2023, il est arrêté par la police turque et extradé vers l’Iran, où il est accusé de « propagation de la corruption et de la prostitution ». Devenu la cible d’un régime déterminé à faire taire sa voix, Tataloo avait pourtant été -un temps- courtisé par les politiciens conservateurs comme un moyen de connecter avec une jeunesse libérale. En mars 2024, lors de son dernier procès, il est finalement condamné à la prison.

Ennemi de la République islamique

Accusé à plusieurs reprises d'« encourager la jeune génération à la prostitution », « faire de la propagande contre » la République islamique et « diffuser des contenus obscènes sous forme de clips et de chansons », Amir Tataloo n’en est pas à son premier procès. Mais c’est l’accusation d'« insulte au prophète » Mahomet qui lui a valu une condamnation à mort, prononcée le dimanche 19 janvier 2025, selon le journal Etemad, l’un des rares médias réformateurs et indépendants encore actifs en Iran.

Cependant, ce jugement n’est pas définitif et pourrait faire l’objet d’un appel. Un scénario déjà vécu par Toomaj Salehi, un autre rappeur iranien qui, après plus d’un an et demi de détention, a échappé à la peine capitale à laquelle il avait été condamné pour avoir soutenu le mouvement de protestation de 2022. « La vraie mort est celle de se résigner au désespoir », écrivait Toomaj Salehi dans ses textes, un message auquel Amir Tataloo peut s’identifier en espérant probablement un dénouement similaire à celui de son confrère.