« Il n’y a pas de formule magique pour gérer l’après-succès », dévoile Nuttea

Nuttea : « Il n’y a pas de formule magique pour gérer l’après-succès »

interviewComment survivre à plus d’une décennie sans album, quand le succès commercial est derrière soi ? À l’occasion de la sortie de « Tribulations », son sixième album, Nuttea nous livre sa recette pour perdurer
Octave Odola

Octave Odola

L'essentiel

  • Avec Tribulations, Nuttea signe un sixième album studio, onze ans après le dernier.
  • Ce grand nom du reggae français a marqué les années 2000 avec ses tubes. Le succès s’est ensuite estompé, mais sa carrière s’est poursuivie.
  • Comment exister sans sortir pendant une décennie ? Comment gérer l’après-succès commercial ? Le quinquagénaire nous répond, avant son concert le 6 décembre prochain à La Place, au forum des Halles.

A l’heure des plateformes de streaming, une pause de plus d’une décennie entre deux albums sonne comme une éternité. Onze ans, c’est le temps qui sépare Mister Reggae Music de Tribulations, le sixième album de Nuttea sorti le 25 octobre dernier.

Ce grand nom du reggae français, aux tubes indémodables ( « Elle te rend dingue », « Trop peu de temps »…), a connu le succès du grand public dans les années 2000.

Avant une traversée du désert, et un parcours désormais plus confidentiel, mais pas moins intéressant. Un quart de siècle après l’album générationnel Un signe du temps, le quinquagénaire est retourné en cabine. En pensant à son public, et surtout pour alimenter un peu plus sa passion de toujours, la scène. L’artiste guadeloupéen se produira vendredi 6 décembre à La Place, au forum des Halles.

Comment fait-on pour continuer d’exister sans sortir d’album pendant une aussi longue période ?

On continue à être sur scène, tout simplement. Pour moi, c’est le nerf de la guerre. En faisant 40 à 50 dates par an, tu vois du monde, tu n’as pas le sentiment d’être en retrait ou à l’arrêt. Je tourne sur des scènes assez différentes, dans des festivals reggae, rap, mais aussi plus généralistes. Je me produis aussi en concert et en sound system. C’est pour ça que je ne considère pas ça comme une véritable absence, j’ai été bien occupé pendant cette décennie.

Est-ce de cette longue période sans album qu’est née l’envie de mêler plusieurs générations d’artistes sur Tribulations ?

Non ce n’était pas volontaire, je ne l’ai pas pensé dans ce sens-là. J’ai contacté des artistes de la génération actuelle, que je connais, j’ai aussi fait appel à des artistes de ma génération. C’est la force des choses plus qu’une volonté qui a provoqué ça. Cet album, j’ai commencé à y penser il y a environ cinq ans. J’ai commencé à enregistrer des chansons sans pression, et j’ai fini par me retrouver avec beaucoup de morceaux, il a fallu faire des choix pour aboutir à un ensemble cohérent.

Lorsqu’on a connu un très gros succès grand public, comment fait-on pour persévérer lorsque l’engouement retombe ?

A partir de 2007, j’ai été obligé de m’arrêter quelques années, parce que j’avais besoin de me reconstruire. Je me suis séparé de ma maison de disque, de mon manager, de ma meuf. Ça a été un tournant.

J’ai recommencé à me produire sur scène en 2010, et depuis je n’ai pas arrêté. Mais cette pause-là, elle n’était pas forcément due au succès commercial, elle était dû à une séparation globale, chacun avait besoin de prendre sa route.

Je pense qu’il n’y a pas de formule magique pour gérer l’après-succès, ça se traverse vraiment selon la personnalité de l’artiste. Je continue ma vie, je poursuis ce que je sais faire. Ce qui change, c’est juste que je me sens beaucoup plus libre musicalement.

Ça veut dire qu’il n’y a pas de nostalgie, ou d’amertume en repensant à cette période faste ?

Quand j’ai commencé la musique, mon but ce n’était pas de devenir populaire et connu. Moi, mon ambition, c’était juste d’être un artiste reggae respecté par les amateurs de cette musique. Ce côté grand public (il souffle), je ne l’ai pas trop calculé.

Mon plus gros accomplissement, c’était de vivre du reggae. Vivre de la musique que j’aime, c’était déjà un truc de fou. Le succès, c’était une cerise sur le gâteau, mais ce n’était pas le moteur. Ce qui comptait, c’était de durer, et ce n’est pas forcément avec le grand public que tu dures. En tout cas pas pour un artiste comme moi.