« J’aurai l’étiquette Star Academy à vie, l’important est que j’en ajoute d’autres », estime Patxi Garat
INTERVIEW•Révélé par « Star Academy » en 2003, Patxi Garat vient de sortir « Le monde est beau », quatorze ans après son précédent album en français. « 20 Minutes » a rencontré l’auteur, compositeur et interprètePropos recueillis par Fabien Randanne
L'essentiel
- Le monde est beau, le nouvel album de Patxi Garat est sorti fin septembre.
- « C’est un album d’aujourd’hui, qui parle de nous tous, de nos trajectoires collectives, de comment on fait pour vivre ensemble et les questions qu’on se pose tous », résume l’artiste auprès de 20 Minutes.
- Candidat de « Star Academy » en 2003, il confie « l’étiquette est toujours là ». « Mais, ajoute-t-il, elle est devenue une émission culte, elle fait partie de la pop culture. Le regard qui est porté dessus a changé au fil du temps. L’étiquette restera jusqu’à la fin, l’important est de faire d’autres choses qui permettent de rajouter des étiquettes. »
Patxi Garat fait dans la méthode Coué. Il a choisi d’intituler son nouvel album, sorti fin septembre, Le monde est beau. « Evidemment, si on regarde ce qu’il se passe actuellement, c’est compliqué. Mais il faut dépasser ça, essayer de prendre de la hauteur et de regarder le monde autrement. Il faut, malgré tout, trouver des motifs de satisfaction ainsi que de la beauté dans le monde et parmi les gens qui le composent », précise à 20 Minutes l’auteur, compositeur et interprète de 43 ans. Mais l’artiste n’est pas un béat naïf, les questions des injustices, de la précarité et des préoccupations environnementales traversent plusieurs textes du disque qui comprend aussi son lot de chanson d’amour, dont la très efficace Qu’est-ce que je suis pour toi ? « C’est un album d’aujourd’hui, qui parle de nous tous, de nos trajectoires collectives, de comment on fait pour vivre ensemble et les questions qu’on se pose tous », résume-t-il.
Il s’est écoulé quatorze ans entre la sortie de votre précédent album en français (« Amour Carabine » en 2010) et celui-ci. Pourquoi ?
La vie, le parcours de vie… Peut-être que j’avais moins envie de monter sur scène. Je voulais faire d’autres choses. J’ai fait beaucoup de théâtre, puis j’ai écrit un long moment pour les autres, c’est très agréable de faire ça. J’intellectualise peu ce que je fais, j’essaie simplement de vivre au jour le jour en me demandant ce que j’ai envie de faire…
Quel a été le déclic pour vous atteler à ce nouvel album ?
J’ai commencé à travailler dessus il y a cinq ans. J’écris des chansons tous les jours - ou, en tout cas, je suis sur des chantiers de chansons tous les jours. A partir de 2019, j’ai eu envie de les chanter moi-même, j’en mettais de côté pour moi. Ça s’est fait naturellement. La dernière chanson que j’ai écrite, c’est Le monde est beau, qui est venue à la toute fin alors que l’album était presque terminé et ça a éclairé ce qui avait été écrit, ça résumait tout ce qui était dans le disque, c’est pour ça que je l’ai choisie comme titre. La toute première, c’est Qu’est-ce que je suis pour toi ?
Il y a trois ans, vous étiez revenu avec « En basque », un album de reprises de classiques de la chanson française en basque. Qu’est-ce qui vous avez poussé à vous lancer dans ce projet ?
Pendant le confinement de 2020, j’étais à Biarritz et je me suis mis à reprendre des chansons en basque. Cela fait longtemps que j’avais envie de chanter dans cette langue, qui est ma langue maternelle, et je n’avais pas encore trouvé la bonne approche. L’idée des reprises collait à mon discours de double identité, de double culture. Cela venait percuter l’amour que j’ai pour la culture française, la littérature, le cinéma, et mes origines basques, ma culture première. C’est un album ultra-intime, qui me ressemble absolument parce que ce sont des chansons que j’aime [Ne me quitte pas, Allo maman bobo, J’ai demandé à la Lune, La Grenade…]. Cela a été très bien accueilli alors que je ne savais pas si ça allait intéresser. C’est aussi ce qui m’a encouragé à poursuivre mon projet d’album en français, à en faire quelque chose.
Comment qualifieriez-vous votre rapport à votre identité basque ? Est-il intime ? Politique ? Ou autre ?
C’est de l’ordre de l’intime, évidemment. C’est dans le corps, c’est en moi. La première chanson que j’ai reprise, c’est Aline de Christophe, quand il est décédé. J’ai eu la chance de le connaître un peu et, étrangement, la douleur ressentie et la tristesse s’expriment chez moi en basque. Cette langue me ramène aux racines, à l’intérieur, à l’instinct primaire, à l’enfance, au commencement, puisque c’est ma langue maternelle. Au-delà de ça, je ne sais pas si c’est politique, mais en tout cas un engagement culturel. Je prépare un album avec des chanteurs, je dirais « territoriaux », de différentes régions et cultures pour essayer de faire un album de langues régionales, parce que c’est nécessaire, on vient tous de quelque part, on est tous riches de plusieurs origines. Et puis, c’est mon quotidien, je vis la moitié du temps à Biarritz où je parle basque. C’est là constamment, mais pas plus pas moins que le français, pour moi ce sont deux cultures totalement mélangées et imbriquées.
Sur votre nouvel album, il y a une chanson qui rend hommage à Biarritz. C’est un passage obligé pour un auteur et interprète de chanter « sa » ville, comme l’ont fait par exemple Benjamin Biolay, Dick Annegarn ou Miossec avant vous avec « Lyon presqu’île », « Bruxelles » et « Brest » ?
Effectivement, sur Biarritz il n’y a pas tant de chansons que ça. Il y en a une de Luis Mariano des années 1950. Il y a eu Roche de Sébastien Tellier évoquant « Biarritz en été », mais il y est plus question de son expérience de villégiature. Ma chanson parle de Biarritz et de ses habitants, elle dit ce qu’on peut y voir parfois : ce ciel sombre qui arrive en l’espace d’un quart de seconde et fait basculer la journée dans la nuit, le ciel bleu en orage. Et malgré tout, le Palais est toujours éternel, la Grande plage est toujours là. Elle représente aussi le Pays basque tout entier avec cette volonté de toujours rester debout, d’avancer. C’est un peuple de marins, de la montagne, de grands voyageurs…. Elle raconte comment on surmonte les difficultés, cette capacité-là est peut-être la qualité que je préfère chez les Basques.
Il y a dix ans, vous écriviez et composiez « Jour 1 » pour Louane, qui est devenue un tube. Il y a eu un avant et un après cette chanson pour vous ?
Clairement. C’est la première fois que je faisais une chanson qui rencontrait le cœur des gens et c’est assez perturbant, dans le bon sens, de se dire qu’on est entré dans leur vie par ce biais-là. Tellement de chansons ont porté ma vie, m’ont aidé, m’ont donné du courage ou de l’énergie. Louane et moi avons vécu cette aventure ensemble, c’était son premier album, c’était le commencement aussi pour elle, et on a gardé ce lien fort. Quand je lui ai proposé de chanter Fauves en duo avec moi sur le nouvel album, elle a accepté et ça m’a touché. Je trouve que nos voix se mélangent bien en plus.
Elle a été révélée par « The Voice », vous par « Star Academy »… C’est cela qui vous a rapprochés ?
Je n’en ai pas l’impression. Je dirais que c’est surtout sa spontanéité, sa joie de vivre communicative et sa voix, surtout, qui m’a complètement renversé. Elle a fait une prise sur Fauves, peut être une deuxième histoire d’assurer le coup, mais tout était dans les premiers mots chantés. Elle a une capacité à émouvoir, à toucher, à être tout de suite dans ce qu’elle fait.
Une nouvelle saison de « Star Academy » commence samedi, si on vous invitait à aller y chanter ou rencontrer les élèves, vous accepteriez ?
Bien sûr, avec plaisir. Je garde un très chouette souvenir de ce moment-là. C’était en 2003, ça a duré quatre mois au château, six en tournée, donc c’était une aventure d’un an. C’était d’une douceur, d’une insouciance, d’une joie absolue. Alors, oui, ça me ferait plaisir de retrouver ce château ou ce plateau.
Vous avez l’impression d’avoir toujours une étiquette « Star Academy » collée à vous ?
Oui, elle est toujours là. Mais « Star Academy » est devenue une émission culte, elle fait partie de la pop culture. Le regard qui est porté dessus a changé au fil du temps. L’étiquette restera jusqu’à la fin, l’important est de faire d’autres choses qui permettent de rajouter des étiquettes.